Maison des aînés: un projet d’envergure qui va bon train
Léa Villalba|Édition de la mi‑novembre 2021(Photo: 123RF)
RÉSIDENCES POUR AÎNÉS. Pour remédier aux conditions parfois désastreuses des CHSLD, et à la suite de l’hécatombe vécue dans ces derniers lors de la première vague de COVID-19, en 2020, Québec a mis sur la table son projet de Maisons des aînés : 46 nouveaux lieux de vie, plus spacieux et « davantage adaptés aux aînés » pouvant accueillir jusqu’à 3468 personnes, dont 2600 dès l’automne 2022. Un plan ambitieux qui ne fait cependant pas l’unanimité.
« C’est une vraie révolution, ce projet. Non seulement on va offrir de beaux espaces de vie, mais on change aussi toute la philosophie de l’hébergement public pour les aînés », explique la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants, Marguerite Blais. En effet, l’idée derrière les Maisons pour aînés est d’améliorer le cadre de vie des résidents, de leur offrir de plus grands espaces individuels, notamment une douche, une chambre spacieuse, mais aussi de les intégrer à la vie environnante. « Il y aura des jardins thématiques, des marchés, des fermes… Certaines Maisons vont accueillir des organismes communautaires. De plus, on intègre vraiment la Maison au cœur de la ville ou du village où elle est construite. Ça permet aux aînés de se balader dans la rue principale, d’aller manger dans un petit restaurant, etc. », ajoute la ministre.
Pour garantir un espace plus grand et intime, les Maisons des aînés ne dépasseront pas 12 chambres chacune, contrairement aux centres d’hébergement de soins de longue durée (CHSLD), qui en comptent parfois jusqu’à 30. L’aspect médicalisé sera aussi modifié. « Le poste de garde va être aboli. Les chariots de linge et de médicaments eux, se feront en coulisses. Tout sera incorporé dans les murs pour que les Maisons des aînés soient de vrais espaces de vie et non des hôpitaux », élabore Marguerite Blais.
Actuellement, 34 de ces nouveaux milieux de vie sont en construction, et ceux de Lévis, Saint-Jean-sur-Richelieu et Rivière-du-Loup sont parmi les projets les plus avancés. « On a fait une étude populationnelle pour savoir où étaient les besoins les plus criants, explique la ministre. Il y aura au moins une Maison des aînés dans chaque région du Québec. »
Des coûts en hausse
Au départ, ce sont 30 Maisons des aînés qui ont été imaginées par le gouvernement Legault. L’achat de terrains supplémentaires a fait grimper le coût du projet. Estimé à 1 milliard de dollars (G$) en campagne électorale, le projet phare de la Coalition avenir Québec s’élève désormais à 2,4 G$.
En plus du coût immobilier, les différentes installations ont aussi dû s’adapter à la crise sanitaire afin de garantir davantage de sécurité, tant pour les employés que pour les résidents. « On a ajouté 100 millions pour des lavabos, pour ajouter aussi des vestiaires pour le personnel de santé, agrandir les salles de repos, utiliser du matériel moins poreux pour faciliter la désinfection rapide… », énumère Marguerite Blais.
Enfin, le Plan québécois des infrastructures 2021-2031 prévoit 2 G$ pour ajouter plus de 3000 places en CHSLD grâce à la reconstruction et la rénovation « majeure » de CHSLD vétustes. « On souhaite aussi que les CHSLD, RI, RTF et autres milieux de vie publics s’ajustent à la culture qu’on développe dans les Maisons des aînés », conclut la ministre qui vient de déposer une politique pour les soins de longue durée.
Un projet contesté par certains
Plusieurs associations pour aînés voient d’un bon œil ce nouveau projet d’hébergement. « Il faut offrir de vraies conditions de vie à ceux qui ont construit le Québec », déclare Pierre Lynch, président de l’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraités (AQDR).
Cependant, il trouve dommage que peu de personnes puissent en bénéficier. « On aurait pu multiplier le nombre de résidences, qu’elles soient adéquates et moins luxueuses, se désole-t-il. À Laval, on va construire deux Maisons des aînés, dont une de 96 places… C’est beaucoup d’argent pour peu de gens et ça ne règle en rien le problème de liste d’attente, à savoir près de 300 personnes à Laval. » Présentement, les listes d’attente s’étendent de 12 à 18 mois selon les régions.
De plus, Pierre Lynch regrette que l’on n’ait pas assez investi dans le maintien à domicile, « moins cher et est plus efficace ». « Moins de 7 % du budget de la Santé est consacré au maintien à domicile. Au Danemark, on parle de 60 %. On a du chemin à faire », déclare-t-il.