(Photo: 123RF)
INDUSTRIE MINIÈRE. Le Québec a un territoire riche et diversifié en ressources minérales, qui sont déjà exploitées ou qui ont le potentiel de l’être. L’industrie minière comprend trois phases de transformation. La première est l’exploitation de mines, la seconde est la transformation de minerais en alliages ou en composants, tandis que la troisième est la fabrication d’équipements, comme des batteries pour les voitures électriques.
Or, le Québec est aujourd’hui concentré sur la première transformation. Saura-t-il se tourner également vers la deuxième et la troisième transformation, au fait que la demande mondiale pour les minéraux critiques et stratégiques (MSC) devrait connaître une forte croissance d’ici 2050 ?
Le Québec produit et valorise 17 métaux ainsi que 14 minéraux non métalliques, selon le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles. Un potentiel qui peut être développé à bien plus grande échelle, affirme la PDG de l’Association minière du Québec, Josée Méthot. «On peut certainement se positionner pour la deuxième et la troisième», dit-elle.
À ses yeux, la conjoncture géopolitique est favorable, plusieurs industries dans le monde voulant diversifier leurs sources d’approvisionnement et réduire leur dépendance à la Chine, qui contrôle l’essentiel de la chaîne de valeur des MCS.
«Il faut attirer des usines de transformation de minéraux au Québec, et les inciter à acheter nos matières premières», souligne Josée Méthot.
Une terre riche en MSC
Le Québec est déjà un fournisseur de MCS.Des minières produisent du nickel, du niobium et du graphite, tandis que d’autres essaient de développer des projets de lithium, de vanadium et, à plus long terme, de terres rares, qui sont utilisés par exemple pour la fabrication de téléphones intelligents. La filière québécoise du lithium (Galaxy Resources, Sayona Québec, Corporation Lithium Éléments Critiques, Nemaska Lithium et Lithium Amérique du Nord) éprouve toutefois des difficultés depuis deux ans en raison de la baisse des prix.
Nemaska Lithium et Lithium Amérique du Nord sont d’ailleurs sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies.
Les MCS comprennent aussi l’aluminium, une filière où le Québec est déjà un leader.
Il abrite neuf alumineries d’une capacité de production de 2,8 millions de tonnes par année. Cela représente 90 % de la production canadienne, qui arrive au quatrième rang mondial après la Chine, la Russie et le Moyen-Orient (Barheïn et Arabie saoudite).
Six filières intéressantes
Dans une analyse publiée en 2019, le gouvernement Legault estime qu’il y a surtout «un potentiel à exploiter», en particulier dans six filières de MCS : graphite; cobalt et éléments du groupe du platine ; niobium ; titane et vanadium ; lithium et éléments de terres rares
Dans la filière du graphite, par exemple, le Canada est le troisième pays producteur (4,3 %) après la Chine (68 %) et le Brésil (8 %), selon l’agence United States Geological Survey.
Par contre, le Québec est un petit joueur, comptant une seule mine active, celle d’Imerys Graphite et Carbon, au Lac-des-Îles, dans les Laurentides. Deux minières, Nouveau Monde Graphite et Mason Graphite, ont toutefois des projets miniers.
Les terres rares sont aussi une filière intéressante, même si le Québec et le Canada n’abritent aucune mine. Il y a par contre des projets de première et de deuxième transformation.
La SOQUEM, une société d’État québécoise, essaie de mettre en valeur le gisement de terres rares de Kwyjibo, sur la Côte-Nord, tandis que la britanno- colombienne Commerce Resources détient le gisement d’Ashram, au Nunavik, au nord de Schefferville.
Ressources Géoméga, une PME québécoise qui possède le gisement de terres rares Montviel, dans la région du Nord-du-Québec, veut d’abord construire une usine à Saint-Bruno, en Montérégie, afin de recycler et de traiter d’anciens aimants permanents de terres rares que l’on trouve dans les éoliennes et les voitures électriques.
«La pandémie a mis notre projet sur la glace, mais on espère pouvoir construire l’usine plus tard en 2020», dit le président et chef de la direction Kiril Mugerman. Son usine pilote, à Boucherville, a déjà recyclé et traité d’anciens aimants permanents.
La stratégie de Ressources Géoméga est particulière. Au lieu de mettre en valeur son gisement, la société préfère miser tout de suite sur la deuxième transformation. Pourquoi ? Plus vite elle produira des oxydes de terres rares au Québec, plus vite elle pourra attirer des entreprises capables de faire des alliages, voire attirer des sociétés capables de fabriquer des composants (aimants permanents) ou des équipements (des moteurs de voitures électriques), explique Kiril Mugerman.
C’est à partir de ce moment-là que Géoméga planifierait de mettre en valeur son gisement Montviel, car le Québec aurait alors une filière de terres rares complètes dans les trois formes de transformation (extraction, transformation, fabrication).