Mélissa Robitaille: favoriser la mixité de genre et de génération
Ruby Irene Pratka|Édition de la mi‑mars 2022Mélissa Robitaille a pris le flambeau de l'entreprise aux côtés de son frère, Jean-Philipp, en 2016. (Photo: Sylviane Robini)
INDUSTRIE DE LA CONSTRUCTION. Pendant ses études au collégial, vers 2001, Mélissa Robitaille a commencé à travailler à Syscomax, une entreprise de construction spécialisée en projets clé en main fondée par son père, Sylvain Robitaille. Rien ne présageait que la jeune femme, alors aspirante pharmacienne, allait y bâtir sa carrière. «À ce moment-là, c’était clair que ça ne m’intéressait pas,» se rappelle-t-elle avec le sourire.
Cependant, elle a continué à y travailler, et elle s’est peu à peu rendu compte que cela l’interpellait plus que ses études en sciences. Quand elle a parlé à son père de son désir de rester dans le monde de la construction, elle se souvient d’avoir eu « une drôle de réception ».
Consultez tous nos textes pour la Journée internationale des femmes
«Mon père disait “je ne te donnerai pas l’emploi de la secrétaire” et j’ai répondu “l’emploi qui m’intéresse, c’est le tien”», raconte-t-elle. Au cours des années suivantes, elle a découvert la comptabilité, la gestion des projets, la surintendance et les ventes.
En 2016, Sylvain Robitaille décide de passer le flambeau; Mélissa et son frère, Jean-Philip, sont nommés coprésidents de l’entreprise basée à Mirabel. «La construction est un beau milieu, assure celle qui est également directrice générale de Syscomax. Tu as tellement de fierté de voir un bâtiment sur lequel tu as travaillé. C’est valorisant d’engager des gens et de les voir évoluer, de pouvoir dire : “Avec mon équipe, je vais pouvoir faire tel projet”.»
Le fait d’avoir deux personnes relativement jeunes, dont une femme, à la direction de l’entreprise est devenu un facteur d’attraction pour de potentiels employés, selon la coprésidente. Syscomax emploie actuellement une cinquantaine de personnes, dont environ 40% de femmes.
«Faire un pas de plus»
De son propre aveu, Mélissa Robitaille a fait face à des défis en tant que femme dans un milieu masculin. Elle a dû «développer une carapace» en début de carrière, et elle remercie encore aujourd’hui les mentors, plusieurs hommes et une femme, qui l’ont soutenue dans son cheminement.
Celle est qui présidente du CA de la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec depuis 2020 croit que la situation a beaucoup évolué depuis ses débuts, notamment grâce au nombre croissant de femmes embauchées par les entreprises. Elle se désole toutefois du fait que bon nombre d’entre elles ne restent pas longtemps dans l’industrie après leur formation, car «là où le bât blesse, c’est la rétention».
Mélissa Robitaille aimerait voir davantage de sensibilisation à la diversité sur les chantiers et dans des centres de formation, «pour que les gens comprennent que c’est normal de ne pas y voir seulement des hommes blancs».
Elle observe quelques signes encourageants, dont un changement de mentalité au sein de la relève. La cheffe d’entreprise espère voir les choses s’accélérer dans cinq ou dix ans, alors que la relève se retrouvera dans des positions de leadership. «Le rajeunissement et la diversité dans des postes de leadership [permettront] de casser certains stéréotypes qui traînent», précise-t-elle.
À son avis, le fait que des personnes d’âges différents occupent ces positions «permet les échanges, une vision nouvelle et apporte une plus grande ouverture à la diversité de toutes sortes, [car] une mixité de genre et de génération dans les postes de leadership permet de centrer la discussion sur les gens et leurs compétences».
«Idéalement, j’aimerais qu’on arrête de parler en termes d’hommes, de femmes et de personnes issues de la diversité, déclare-t-elle. Nous sommes des personnes qui sont là pour faire un travail.»