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Où est le côté humain des ministres?

Le courrier des lecteurs|Mis à jour le 18 juin 2024

Où est le côté humain des ministres?

«Lorsqu’un ministre parle de pénurie de main-d’œuvre, c’est parce que son conseiller aux communications lui en a parlé!» (Photo: 123RF)

Un texte de Kévyn Gagné, CRIA, M. Sc., directeur des ressources humaines, Franklin Empire

COURRIER DES LECTEURS. Un ministre: ce n’est qu’un boss temporaire, de passage dans une entreprise dans laquelle personne ne veut de lui.

Il ne gère pas une équipe, mais bien un ministère, donc une entité non palpable, non identifiable, et responsable de rien puisque lorsque quelque chose bloque ou déraille, il n’y a ni accusé ni coupable.

Un ministre gère un budget; gère un déficit; gère des politiques publiques et des priorités, mais en aucun temps, un ministre ne gère des humains. Il délègue à ses hauts fonctionnaires et gestionnaires déjà bien établis, respectés et au fait des gens derrière les dossiers afin qu’ils effectuent le travail à sa place.

Pouvons-nous vraiment croire que nos ministres sont de bons boss?

En 2024, un président de compagnie, un VP, ou un directeur qui évacue l’humain de son style de gestion et de ses dossiers prioritaires afin de ne s’occuper que des aspects opérationnels et stratégiques est totalement déconnecté de la réalité du merveilleux monde du travail.

Historiquement, les députés et les politiciens étaient la voix du peuple! Avec le temps, la voix est morte et enterrée sous le système. De la gestion des politiques à la gestion des humains, un canyon existe. Au fil des décennies, la machine a grossi. Les relations de travail se sont complexifiées; des centaines de milliers de travailleurs se sont greffés au système public; et pendant ce temps, des générations de politicien se sont succédé et ont préservé leurs vieilles pratiques et leurs vieilles visions déconnectées de la réalité d’aujourd’hui.

Combien de fois, dernièrement, avons-nous entendu le ministre Bernard Drainville, le ministre Christina Dubé, et le superministre Pierre Fitzgibbon dire que la feuille de route d’un tel ou d’une telle personne parlait d’elle-même. Qu’il a su gérer d’une main de maître tel projet; a conclu tel «deal»; a géré des budgets X comme personne d’autre; qu’il a su prendre des décisions cruciales que peu de gens auraient été « game » de prendre ! Aucun ne doute sur ces sujets, mais rien à propos de l’appréciation de ses nombreux employés; rien sur la reconnaissance et ses bons coups envers ses employés. Et aucun ancien employé, uniquement des collègues politiciens, qui se lève pour vanter ses mérites, exploits et qualités humaines.

Mais rien sur sa gestion RH!

On parle souvent de grands bâtisseurs, mais rarement de grands ambassadeurs auprès de ses employés.

Les ministres sont tellement à l’écoute de leurs employés que ceux-ci attendent la fin de leur convention collective, habituellement tous les quatre ans, pour déclencher une grève et faire connaître leurs mécontentements puisqu’il semblerait que très souvent, les ministres n’ont pas assez de 1 460 jours pour comprendre leurs employés.

S’ils n’attendent pas la fin de leur contrat de travail, ils quittent la fonction publique. En 2022-2023, pas moins de 20% des effectifs du ministère du Tourisme et du ministère de la Famille ont volontairement quitté leur emploi. Ce taux était à 18,5 % au ministère de l’Éducation, et à 16,25% au ministère de la Santé et des Services sociaux pour la même période. À la SQ, ce taux était à 15% et à 14% à la SAAQ, tout comme au ministère des Finances. Mais que dire du 24% au Secrétariat du Conseil du trésor de madame Sonia Lebel, la «Big Boss» des négociations collectives de 2023 avec près de 600 000 employés?

Rappelons que, selon le site internet du Secrétariat du Conseil du trésor, le gouvernement confie au Conseil du trésor et à sa présidente l’établissement, la mise en œuvre et le suivi des orientations, des politiques, des programmes et des directives en gestion des ressources humaines.

Ça fait peur!

Près de 600 000 employés, mais ZÉRO Top Gun!

Les ministres, les ministères et leur machine seraient-ils incapables de développer leurs employés? De les comprendre? De les retenir? Pour se défendre ou pour justifier leur recrutement broche à foin, ils répètent toujours qu’ils vont chercher l’expertise qu’ils n’ont pas dans leur ministère ou qu’ils n’ont plus à la suite d’un exode des cerveaux vers le privé. Ils vont chercher l’expertise qu’ils n’ont pas eux-mêmes et perpétuent le cliché «Que les meilleurs savent s’entourer des meilleurs!». 

Qu’on ne me fasse pas croire que les ministres savent gérer du monde! J’attends des exemples, et non pas un seul exemple trouvé après avoir effectué une fouille archéologique, ou bien qu’on me fasse la démonstration du contraire de ce qui est ci-haut mentionné.

Lorsqu’un ministre parle de pénurie de main-d’œuvre, c’est parce que son conseiller aux communications lui en a parlé! Lorsqu’il parle de disciplinaire et d’imputabilité, c’est habituellement pour se défendre de son inaction devant la meute de journalistes. Lorsqu’ils parlent de flexibilité et mobilité de la main-d’œuvre, c’est parce qu’on les a breffés sur le sujet durant le scrum. Etc.

On va arrêter de se faire des histoires, un ministre qui sait gérer ses employés, c’est aussi rare que du Cheeze Whiz bon pour la santé!

 

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