Parcs industriels: les lieux qui multiplient les synergies
Maxime Bilodeau|Édition de la mi‑mars 2024L’usine de production de chocolat Barry Callebaut collabore ainsi avec l’entreprise de récupération alimentaire Prorec pour revaloriser des milliers de tonnes de matières organiques, comme des écailles de fève de cacao. (Photo: 123RF)
PARCS INDUSTRIELS. Les parcs industriels qui se démarquent ont comme point en commun de créer des dynamiques favorables à leurs entreprises locataires.
Moins d’une année après avoir contacté la MRC de Maria-Chapdelaine, la congèlerie Héritier ouvrait les portes de son usine flambant neuve à Normandin. Une décision d’affaires qui allait de soi ; la MRC cherchait à développer une zone d’activité industrielle à vocation agroalimentaire au cœur de l’immense plaine du nord du lac Saint-Jean. C’était en 2019.
Issue du regroupement d’une trentaine de producteurs propriétaires de la région, la congèlerie Héritier se spécialise dans la transformation et la congélation de fruits et de légumes nordiques, comme la camerise et la gourgane. « Comme elle venait d’être lancée [en 2018], il a fallu l’accommoder, et vite, raconte Luc Simard, préfet de la MRC de Maria-Chapdelaine. Une entreprise prête à investir, c’est maintenant ! »
Le défi ? Satisfaire ses besoins en rejets d’eau, lesquels explosent lors de la récolte de bleuets sauvages. « Les terrains industriels dotés d’infrastructures capables de traiter d’énormes volumes de manière ponctuelle manquaient auparavant dans la région », se souvient Sophie Grégoire-Tremblay, directrice du développement à la MRC de Maria-Chapdelaine.
L’histoire à succès de la congèlerie Héritier témoigne de la pertinence de l’entente de collaboration signée par les 12 municipalités de la MRC. Il y a une décennie, celles-ci ont en effet convenu d’unir leurs forces pour attirer des entreprises sur leur territoire, en se partageant par exemple les coûts des infrastructures, mais aussi les revenus. Elles forment depuis un parc industriel régional, un cas assez unique au Québec.
« Ce modèle de régie intermunicipale permet de créer de la richesse dans notre milieu, notamment en y attirant de la main-d’œuvre », indique-t-elle. Il s’agit d’un exemple probant de synergie industrielle à l’échelle régionale qui profite à tous. « Depuis sa mise en place, cette structure légale est synonyme de force d’investissement et d’attraction décuplée », affirme Luc Simard.
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Cette stratégie — l’action coordonnée dans le but de dynamiser le développement industriel — est appliquée un peu partout dans la province. La région de Victoriaville mise par exemple sur le développement durable depuis 2013, année de l’inauguration du premier parc industriel écologique du Québec. L’Écoparc industriel Daniel-Gaudreau a depuis été imité par d’autres, notamment à Drummondville.
« Pour être pertinent, il faut être différent, lance d’entrée de jeu Richard Croteau, directeur et commissaire industriel de la Corporation de développement économique de Victoriaville et sa région. Dans notre cas, cela passe par un engagement en faveur d’un développement économique responsable, lui-même ancré dans une expérience régionale de plus de 40 ans en matière de développement durable. »
Haut coefficient d’occupation au sol, faible empiétement sur les milieux naturels, présence d’infrastructures de mobilité active… Autant de caractéristiques de cet environnement industriel qui est d’abord une communauté d’esprit. « Les entreprises qui viennent s’y établir le font parce qu’elles sont soucieuses d’adopter des pratiques d’affaires écoresponsables », souligne-t-il, en référence à la réglementation en vigueur.
L’innovation est aussi la voie préconisée par la Cité de l’innovation agroalimentaire, à Saint-Hyacinthe. Avec sa superficie de près de 10 millions de pieds carrés, il s’agit du premier parc technologique consacré au secteur bioalimentaire en Amérique du Nord. On y retrouve des entreprises agroalimentaires, biotechnologiques et pharmaceutiques, mais aussi des établissements d’enseignement et des centres de recherche.
« L’importance accordée à la formation et à la R-D est ce qui nous caractérise. Les entreprises qui s’établissent ici évoluent dans un écosystème taillé sur mesure pour leurs besoins », fait valoir Karine Guilbault, directrice générale de Saint-Hyacinthe Technopole. L’organisme chapeaute le parc technologique, qui fête souffle d’ailleurs 20 bougies en 2024.
Cette proximité géographique rend entre autres possible l’émergence de symbioses agroalimentaires. L’usine de production de chocolat Barry Callebaut collabore ainsi avec l’entreprise de récupération alimentaire Prorec pour revaloriser des milliers de tonnes de matières organiques, comme des écailles de fève de cacao. De quoi lui permettre de devenir le premier producteur de chocolat durable d’ici 2025, un objectif qui lui est cher.