Qu’allez-vous retirer de vos priorités afin de faire place à ces initiatives? (Photo: Airfocus pour Unsplash)
EXPERTE INVITÉE. Avec l’arrivée de la nouvelle année, je suis certaine que les membres de votre équipe ont la tête pleine d’idées à déployer. La question qui tue s’impose: qu’allez-vous retirer de vos priorités afin de faire place à ces initiatives? Autrement, ça peut vite tourner au vinaigre.
Tanya, par exemple, est confrontée à un tel dilemme.
Juste avant les vacances des Fêtes, deux de ses employés ont accompli la même tâche, créant ainsi de la frustration et de la confusion dans l’équipe. Cette semaine, une partie importante d’un projet n’a pas été complétée. Son collègue a cru, à tort, que quelqu’un d’autre l’avait accomplie. Résultat, c’est tombé entre deux chaises et personne ne s’en est occupé. Quelle galère!
C’est manifeste que l’équipe de Tanya a besoin d’aide; bien que tout le monde travaille fort, les projets n’avancent pas. Les enjeux de communications sont multiples, les priorités confuses (et changeantes) et la déception de la direction envers l’équipe est palpable. Le climat de travail s’envenime; ont fini par croire que certains sont de mauvaise foi.
Pour résoudre la situation, les propositions de solutions fusent de partout.
Ce dont cette équipe a toutefois réellement besoin, c’est d’une réflexion stratégique, d’établir ses priorités et de prendre de difficiles décisions.
D’en faire moins (et non plus).
Par où commencer?
D’abord, elle doit prendre un temps d’arrêt et faire le point
Vous êtes prêts? 1, 2, 3… on arrête. Pas facile!
À (re)lire: Ralentir pour mieux collaborer, possible?
Lorsqu’il n’y a pas d’ordonnancement fréquent des priorités, les équipes créent de nombreux projets qui finissent par ratisser trop large et perdre en efficacité. L’enfer est pavé de bonnes intentions.
Rappelons-nous que nous avons toujours plus d’idées que ce que nous sommes capables de déployer. La vie est jalonnée d’occasions propices au lancement de nouveaux projets comme le début d’année, les anniversaires, les bilans, les activités de consolidation d’équipe, de réflexion stratégique, ou les objectifs annuels.
Nous sommes alors prompts et énergisés à l’idée de déployer ces nouvelles initiatives. On oublie toutefois au passage de s’attarder aux projets que nous allons cesser de faire, à ce que nous allons retirer de notre liste collective. Résultat: on surestime notre capacité à exécuter des tâches et les priorités se mélangent.
Comment naviguer des conditions de réflexions imparfaites?
Dans un monde idéal, l’équipe de Tanya se retirerait en retraite stratégique pour quelques jours et serait accompagnée d’un consultant spécialisé en la matière. Supposons que leur réalité est toute autre: l’intensité des opérations ne permet pas aux membres de l’équipe de tout arrêter et leurs budgets ne prévoient pas de ressources financières pour mener un tel exercice. Alors, que faire?
L’équipe peut revoir ses priorités même si la situation n’est pas parfaite. Voici quelques avenues à sa disposition:
- se libérer que deux heures à la fois pour assurer le maintien des opérations
- se rencontrer virtuellement, du bureau ou en télétravail
- s’arranger seul, pas de consultant et pas d’analyse de marché
Commençons par la fin; quel est le résultat escompté?
Qu’importe comment s’y prendra l’équipe, le résultat final souhaité doit être résumé dans un document de deux ou trois pages. On doit y retrouver quels seront les projets que nous allons accomplir dans le prochain cycle (d’un an par exemple), qui sera responsable de ces projets et qui sera mandaté pour l’aider, avec quel budget et selon quel échéancier.
L’analogie à retenir: passer d’une moissonneuse-batteuse à un train. Vous vous souviendrez qu’une moissonneuse-batteuse est le très large équipement utilisé par les cultivateurs pour récolter le blé à l’automne. C’est un appareil qui fait plusieurs mètres de large et qui avance très lentement (l’usure de cette machine ne se compte pas en kilomètre parcouru, mais bien en minutes d’utilisation). En d’autres mots: beaucoup de projets conduits simultanément; peu (ou pas) de finalisation.
Le train en revanche et effilé et rapide. L’efficacité et la rapidité d’une équipe sont tributaires de sa capacité à prioriser quelques projets, à mobiliser ses ressources pour accélérer son développement puis passer au projet suivant. Donc peu de projets menés simultanément, mais qui seront complétés bien plus rapidement.
Comment structurer la démarche?
Dans un deuxième temps, on doit partager la vision commune de la réalité actuelle et future de l’équipe.
Consacrer les premières rencontres à clarifier la vision collective de la réalité actuelle. C’est le moment de poser des questions puissantes pour susciter des réflexions porteuses. Éviter de vous lancer rapidement dans l’élaboration de listes de projets. Outil facilement accessible à cet effet: une analyse SWOT (forces, faiblesses, opportunités et menaces).
Truc du métier 1: les forces et faiblesses correspondent à la réalité interne de l’équipe alors que les opportunités et menaces documentent la réalité externe (exemple : le marché). Éviter de les mélanger.
Truc du métier 2: le SWOT est un outil (pas une finalité). L’important est l’ordonnancement des projets qui suivra l’exercice. Éviter d’insister démesurément sur cet outil.
Truc du métier 3: de façon à objectiver la réflexion, il est utile de se partager de nouvelles informations. Avant les rencontres, même à petit budget, il est possible de:
- Consulter les clients pour valider leurs besoins à venir et leur perception de nos forces et faiblesses
- Analyser les chiffres de ventes; être au clair avec les territoires, les produits ou services et les clients les plus et les moins profitables
- Sonder les équipiers, évaluer leur expérience employée, s’intéresser à leur vision des relations avec les clients et les pistes d’amélioration
- Documenter les procédures et technologies pour identifier des occasions d’amélioration
À cette étape, l’objectif est de faire émaner des constats pour anticiper les opportunités de demain.
Compléter le plan d’action
L’équipe doit finalement choisir et prioriser ses projets et compléter son plan d’action (le document de deux ou trois pages décrit précédemment).
Truc du métier 4: ne pas terminer l’exercice sans avoir fait la difficile démarche de retirer des projets et de rédiger la liste des bonnes idées que nous ne ferons pas tout de suite.
Il n’y a pas de raison pour une équipe de se priver de compléter une réflexion stratégique, de prendre soin d’elle et de veiller à son efficacité. Ce ne sera pas facile, surtout de rédiger cette deuxième liste! Idéalement, un maximum de 10 personnes co-responsables se prêteront à la démarche. Une réflexion stratégique demeure une approche éprouvée pour consolider l’équipe et optimiser ses pratiques.