Profitons du contexte favorable au transport collectif
Jean-Paul Gagné|Édition de la mi‑octobre 2020Dans le cadre du projet de loi 66, la ligne bleue du métro doit être prolongée jusqu'aux Galeries d'Anjou. (Photo: Maxiem Caron pour Unsplash
CHRONIQUE. Le transport collectif est le parent pauvre de la mobilité des personnes dans le Grand Montréal. La banlieue s’étale et l’automobile s’impose toujours. La ville se prétend moderne, mais elle n’a pas de lien sur rail pour connecter son centre-ville et son aéroport. C’est une honte quand on se compare à l’Europe et à l’Asie.
Les planètes semblent toutefois s’aligner un peu plus en faveur du transport collectif.
Il nous fallait une autorité régionale. On l’a eue en 2017. L’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM) planifie, organise et finance le transport collectif dans le territoire de la Communauté métropolitaine de Montréal (82 municipalités, 4 millions d’habitants). Sa gouvernance fonctionne.
L’ARTM perçoit tout l’argent qui finance le transport collectif (subventions, titres de transport, taxes sur l’essence et l’immatriculation, publicité, redevances, etc.). Son budget est de 3,4 milliards de dollars (G $), soit 1,1 G $ pour les immobilisations et 2,3 G $ pour l’exploitation des réseaux, qui est faite par quatre opérateurs : la Société de transport de Montréal (STM), la Société de transport de Laval (STL), le Réseau de transport de Longueuil (RTL) et EXO, qui s’occupe du reste du territoire. Le Réseau express métropolitain (REM) deviendra le cinquième opérateur et il sera entièrement intégré à l’ARTM. Les redevances obtenues sur les sociétés commerciales situées à proximité de ses stations – 64 millions de dollars (M $) perçus jusqu’à maintenant ; maximum de 600 M $ sur 50 ans – seront transférées à l’ARTM en janvier 2021.
Accélérer des projets
Le projet de loi 66 que Québec vient de présenter permettra d’accélérer certains projets d’infrastructure, dont la ligne bleue du métro, qui sera prolongée de la station Saint-Michel jusqu’aux Galeries d’Anjou. Sa construction démarrera dès que l’on aura optimisé sa configuration. Au besoin, on réglera plus tard les contestations sur les expropriations.
De même, le noeud gordien sur le partage du terrain des Galeries d’Anjou pourra être dénoué. Alors que ses propriétaires, Cadillac Fairview et Ivanhoé Cambridge, cherchent à maximiser le revenu pouvant être tiré des expropriations, l’ARTM et la STM doivent s’assurer de payer un juste prix.
La STM y aura une station de métro et l’ARTM y gérera un terminus et un stationnement incitatif. Parce que le transport collectif coûte cher, aucune source de revenus ne doit être négligée. Il leur faut exploiter le plein potentiel commercial (redevances, droits aériens, partenariats avec le privé, etc.) de ce site, une stratégie qui était moins présente dans le passé. Ultimement, ce sont les usagers qui en profiteront.
Le projet de transport collectif électrique prévu sur la Rive-Sud sera lui aussi accéléré une fois terminée son optimisation (coût : 60 M $, payés par Québec) et s’il obtient le feu vert de l’ARTM et du gouvernement. On envisage l’aménagement d’un seul réseau, qui intégrerait le projet de tramway sur le boulevard Taschereau, qui relierait Brossard et Longueuil, et l’axe de la fameuse ligne jaune, qui ne se fera pas sous terre, mais en surface. En fait, ce pourrait être la continuation du tramway de la station de métro jusqu’à un site situé à proximité du cégep Édouard-Montpetit et du futur pôle Roland-Therrien, où 600 logements sont prévus.
Refonte tarifaire
Le projet de refonte tarifaire de l’ARTM est une autre initiative prometteuse. Les huit zones tarifaires actuelles seront réduites à quatre et les 17 grilles tarifaires seront fondues en une seule dans une même zone. Le titre « Tous modes » donnera accès à tous les modes (bus, métro, train, REM, transport adapté) dans une zone donnée, par exemple l’île de Montréal, ou encore dans deux zones, par exemple Laval et Montréal, ou même dans trois zones, par exemple, de la Couronne Sud à Montréal en passant par Longueuil. Le titre « Bus partout » permettra de se déplacer en bus dans les trois zones situées dans le territoire de l’ARTM pour un seul prix.
Très innovante et axée sur la simplicité et la flexibilité, cette structure tarifaire réduira les coûts pour certains usagers et rendra plus attrayant le transport collectif. La carte Opus, le téléphone cellulaire et les cartes de paiement offrent aussi d’autres moyens de faciliter la vie aux usagers.
La conscientisation accrue des citoyens à l’égard des changements climatiques, les bas coûts d’intérêt et la volonté de grands investisseurs de financer des projets d’infrastructures créent un contexte favorable au développement du transport collectif. Il serait dommage que les gouvernements ne saisissent pas cette occasion.