Signe de l’engouement actuel pour le végétal, de plus en plus d’entreprises québécoises végétalisent un mur dans leurs locaux. Cependant, aménager des espaces de travail selon les principes du design biophile va plus loin que la simple installation d’un mur végétal. (Photo: Courtoisie)
ESPACES DE TRAVAIL. Végétalisation des murs, large apport en lumière naturelle, grandes fenêtres ouvrant sur l’extérieur… Le design biophile a le vent en poupe en matière d’aménagement des espaces de travail. Encore timide, cette tendance commence à faire des émules au Québec.
« La biophilie désigne la propension de l’humanité à aimer la nature, explique Hugo Lafrance, directeur de projet en développement durable au sein de la firme d’architecture Lemay. Il s’agit de refléter cette appréciation innée de la nature dans l’aménagement des espaces.»
Né aux États-Unis à fin du 20e siècle, ce courant gagne en popularité depuis quelques années, notamment sous l’impulsion du développement de la certification WELL. Accordée aux immeubles favorisant la santé et le bien-être des occupants, cette norme inclut la biophilie des lieux dans ses critères.
Fin janvier, Amazon a inauguré, à son siège de Seattle, trois sphères vitrées d’environ 30 mètres de hauteur abritant 40 000 plantes. Ces sphères accueillent des salles de réunion, des espaces où les employés peuvent venir travailler ainsi qu’une cafétéria.
Lemay a également adopté le design biophile pour aménager les nouveaux bureaux dans lesquels l’entreprise a posé ses cartons il y a environ trois mois.
Faire entrer la nature dans les bureaux
Signe de l’engouement actuel pour le végétal, de plus en plus d’entreprises québécoises végétalisent un mur dans leurs locaux. Cependant, aménager des espaces de travail selon les principes du design biophile va plus loin que la simple installation d’un mur végétal.
Pour Martine Drolet, associée et designer chargée de projet chez la firme d’aménagement de bureaux VAD, le design biophile ne se résume pas uniquement au vert. « Cela passe aussi par des textures rappelant l’écorce des arbres et le sable ou encore des bruits de chant d’oiseaux », dit-elle
« Dans les grands édifices, on peut créer de petites alcôves où l’on peut se retirer, comme le font naturellement les animaux, et contribuer à renforcer ainsi le sentiment de sécurité », ajoute M. Lafrance.
Chez Lemay, l’aire d’accueil est équipée d’un mur végétal de 20 mètres carrés, des bacs de plantes ont été disséminés sur les 95 000 pieds carrés qu’occupent les 350 employés, et ces derniers sont encouragés à verdir leur lieu de travail. Une ruche a aussi été installée à l’extérieur.
La lumière du jour privilégiée
L’accent a également été mis sur l’abondance de lumière naturelle. Jouxtant un parc linéaire, un mur du vieux bâtiment industriel où loge Lemay a été largement percé afin d’offrir une vue sur les arbres à au moins 90% des bureaux régulièrement occupés. « Les fenêtres peuvent s’ouvrir en grand pour faciliter la ventilation naturelle et entrer en relation avec l’extérieur en écoutant les oiseaux chanter et le bruit du vent dans les feuilles. »
Côté éclairage, Lemay a misé sur un système circadien programmé pour se calquer sur la course du soleil. Imitant l’évolution de la lumière naturelle au fil de la journée, il diffuse une lumière plus bleutée le matin et plus rougeâtre en fin de journée.
Fabrik8 affiche la même volonté de miser sur la lumière du soleil. Ce complexe de bureaux, dont la première phase de 125 000 pieds carrés devrait voir le jour à l’été 2019 dans le Mile-Ex, vise à décrocher la certification WELL. « Les espaces sont conçus pour être extrêmement lumineux, y compris dans les corridors centraux, explique Pierre-Antoine Fernet, président de Lima Immobilier, qui est à l’origine du projet. Tous les bureaux donneront sur une fenêtre.»
Des bienfaits pour les employés
Pour les entreprises qui font le choix du design biophile, les avantages sont multiples. Chez Lemay, le verdissement des espaces combiné aux efforts fournis pour assurer une bonne ventilation ont porté leurs fruits : l’air y est sain. Dans le cadre de son processus de certification LEED, l’entreprise a fait tester la qualité de son air, notamment la pollution aux composés organiques volatils (COV) et au formaldéhyde. « Résultat: on respect les normes les plus exigeantes », assure M. Lafrance.
À l’heure où la technologie est omniprésente dans nos vies professionnelles, offrir des environnements de travail qui intègrent des éléments naturels fait du bien à nos esprits surchargés. « Par rapport au technostress, cela aide à retrouver le calme, à se déconnecter et à mieux se concentrer sur le travail », souligne Mme Drolet. Des vertus zen que constate également M. Lafrance : « Le fait que notre cerveau ressente cette relation à la nature est propice au déploiement des facultés cognitives. »
Selon l’étude «The Global impact of biophilic design in the workplace», réalisée par Human Spaces en 2014, les employés évoluant dans ce type d’espace voient leur créativité augmenter de 15%. Ils rapportent également un niveau de bien-être supérieur de 15% par rapport à ceux qui ne sont aucunement en contact avec la nature sur leur lieu de travail.