(Photo: 123RF)
À VOS AFFAIRES. Il est parfois difficile d’imaginer à quel point les répercussions de la pandémie peuvent nous affecter. Certes, on sait que ça coûte des centaines de milliards, mais, concrètement, dans les poches du commun des mortels, qu’est-ce que ça veut dire ?
Dans la dernière mise à jour de son analyse de scénario des chocs dus à la COVID-19 et à la chute des prix du pétrole, le Bureau du directeur parlementaire du budget (fédéral) projette notamment que le produit intérieur brut (PIB) du Canada subira une baisse de 12 % en 2020 par rapport à sa valeur de 2019. Cela constitue un record qui bat, à plate couture, celui de 1984-1985, où la baisse avait été de 8 %.
La valeur du PIB, c’est quelque 2 000 milliards de dollars (G $). Comment peut-on se faire une image de ce que cela représenterait dans la vie de tous les jours ? J’ai déjà écrit sur le sujet, mais je pense que c’est important d’y revenir.
Le PIB, c’est la mesure de la production d’un pays pendant une année. Afin de bien saisir les effets de la pandémie sur l’économie et les finances du Canada, on pourrait ramener les finances du gouvernement à celles d’une famille.
Pour arrondir les chiffres, prenons l’exemple d’une famille où son revenu est de 100 000 $. Si votre revenu familial est différent, ce qui est très probable, vous n’aurez qu’à ajuster proportionnellement les chiffres présentés. Comme je l’ai indiqué, la mise à jour nous dit que le PIB baissera de 12 %. Par contre, ce qui importe, pour l’État, n’est pas le pourcentage de réduction du PIB, comme tel, mais bien les répercussions de cette réduction sur les finances publiques.
Or, durant l’exercice 2019-2020, le fédéral a généré 341 G $ de revenus. C’est comme si notre famille avait une entreprise (son PIB) et générait un chiffre d’affaires de quelque 585 000 $ pour qu’il lui reste des bénéfices nets de 100 000 $, qu’elle peut dépenser. Une baisse du PIB de 12 % signifierait que son chiffre d’affaires est réduit à 515 000 $. Regardons maintenant son bénéfice net. Le gouvernement prévoit que ses revenus passeront de 341 G $ à 281 G $. C’est une baisse de 18 %. Notre famille aurait donc un revenu de 82 000 $ au lieu de 100 000 $. Une perte de 18 000 $.
Portée de l’impact
Ce chiffre ne mesure pas encore toute la portée de l’impact. Il faut aussi regarder les dépenses additionnelles qui sont causées par la pandémie. Alors que notre famille avait l’habitude de dépenser 107 000 $ (eh oui ! depuis quelques années, un petit 7 000 $ d’intérêts sur sa dette qui fait qu’elle dépense un peu plus qu’elle ne gagne), ses dépenses de 2020 grimperont, de façon exceptionnelle, à 156 000 $. Au net, notre famille a donc un revenu de 82 000 $ et des dépenses de 156 000 $. Elle a donc un déficit de 74 000 $. Ça, c’est les trois quarts d’une année de revenus ! Peu importe votre revenu familial, cette proportion s’applique à vous.
Évidemment, notre famille devra emprunter pour combler ce déficit. Celle-ci avait déjà un endettement de 208 000 $, en suivant toujours un scénario où la situation financière de la famille est comparable à celle du gouvernement. Elle y rajoutera donc 74 000 $ pour porter sa dette à 282 000 $. Ses frais d’intérêt passeront ainsi à 7 800 $ par année.
Est-ce intenable ? Peut-être pas. À un moment donné, notre famille devra faire quelque chose. Quand on dépense 8 % par année de plus qu’on ne gagne, ce quelque chose a un petit côté évident, mais, pour l’instant, réglons la crise.
EXPERT INVITÉ
Dany Provost est associé dans les cabinets Planium et Avanco. Il est directeur, Planification financière et optimisation fiscale chez SFL Expertise.