Québec renonce à la vaccination obligatoire en santé
La Presse Canadienne|Publié le 03 novembre 2021Le ministre de la Santé, Christian Dubé, estime être rendu à la limite de l’effort possible et que de suspendre les travailleurs non vaccinés aurait un impact trop important sur la prestation de soins. (Photo: La Presse Canadienne)
Québec — Le ministre de la Santé, Christian Dubé, estime être rendu à la limite de l’effort possible et que de suspendre les travailleurs non vaccinés aurait un impact trop important sur la prestation de soins.
«Pour plusieurs québécois, dont moi, ça reste incompréhensible que des travailleurs de la santé ne veulent pas se faire vacciner. Comme ça semble un noyau dur, je pense qu’il faut vraiment faire quelque chose et, malheureusement, notre réseau de la santé, dans notre situation actuelle, ne peut pas se passer de ces personnes-là», a soupiré le ministre Dubé, visiblement résigné, en conférence de presse mercredi.
Depuis Glasgow, où il participe à la COP26, le premier ministre François Legault a eu la même réaction d’incompréhension, mais il a pleinement assumé la décision: «Ça me choque pour être bien honnête parce que j’ai de la misère à comprendre que quelqu’un qui a étudié en santé refuse de se faire vacciner alors que les experts sont unanimes dans le monde pour dire que c’est la chose à faire pour éviter d’attraper la COVID et éviter de la donner à d’autres personnes. Ce n’est pas une situation qui est idéale pour moi, mais je prends la décision qui est responsable.»
Les non-vaccinés sous haute surveillance
Selon les données dévoilées par le ministre Dubé, 97% des travailleurs de la santé sont maintenant vaccinés. Parmi les quelque 14 000 non-vaccinés, 8000 travaillent sur le terrain et de ceux-ci, 5000 employés (infirmières, préposés aux bénéficiaires, techniciens et autres) sont en contact direct avec les patients.
M. Legault a reconnu qu’à 97% «un plafond semble avoir été atteint». Il a qualifié le refus des réfractaires d’«inadmissible», mais a répété que la décision était la sienne: « J’ai pesé le pour et le contre et, de façon responsable, malheureusement, on va être obligés de garder ces employés, sinon il y aurait des ruptures de service ».
Québec entend redéployer ces travailleurs pour éviter qu’ils soient en contact avec des patients vulnérables.
La totalité des employés non vaccinés, incluant ceux qui ne sont pas sur le terrain, devront être soumis à un régime de dépistage très strict à raison de trois tests par semaine. Ceux qui refuseront d’être dépistés seront suspendus sans solde. Par ailleurs, les primes COVID et les primes de rétention leur seront refusées.
La vaccination sera cependant obligatoire pour tous les nouveaux employés, mais plus pour les employés actuels.
«La moins pire des décisions»
Christian Dubé a précisé que de suspendre l’ensemble des employés non vaccinés aurait, selon les simulations du ministère, provoqué des réductions de service ou des réorganisations impliquant des fermetures temporaires de services dans plus de 500 cas.
«On est en train de prendre la moins pire des décisions. ce n’est pas une décision qu’on aime prendre, mais à un moment donné c’est ça qu’il faut gérer», a déclaré le ministre Dubé.
«On passe maintenant de la vaccination obligatoire au dépistage obligatoire», a-t-il résumé.
En Écosse, François Legault a fait écho à son ministre en invoquant la balance des inconvénients: «Il y a un risque, mais il y a un risque plus grand, si on manque d’infirmières, si on n’est pas capables de soigner les Québécois. Donc, c’est une balance d’inconvénients et malheureusement (…) on a un réseau qui est très, très fragile et on ne peut pas se permettre de perdre ce 3%. Ce qu’on a surtout évalué, ce sont les ruptures de service et c’est évident que ce n’est pas acceptable de manquer de personnel pour soigner les Québécois.»
97 % ce n’est pas un échec
«Il ne faut pas voir ça comme un échec, au contraire », a plaidé le directeur national de la santé publique, le docteur Horacio Arruda, qui prenait place aux côtés du ministre. « On n’aurait probablement pas obtenu le 97% si on n’avait pas mis la vaccination obligatoire.»
Le docteur Arruda a répété une phrase souvent entendue depuis le début de la pandémie, à savoir que « le risque zéro n’existe pas, mais on arrive à un risque qui est tout à fait acceptable et l’inverse, avoir moins de personnel, on mettrait en péril certains services ».
Christian Dubé a abondé dans le même sens: « Aujourd’hui, d’être à 97%, c’est un succès. Maintenant qu’on a atteint 97 %, ce qui reste (de non-vaccinés), on va garantir aux Québécois que ces gens-là vont être dépistés trois fois par semaine.»