Au Québec, le taux de chômage qui reste stable autour de 4,4%. (Photo: 123RF)
EXPERT INVITÉ. La question est sur toutes les lèvres, et ce, depuis un certain temps déjà: y aura-t-il une récession? Techniquement c’est possible… mais non! Je m’explique.
Après plusieurs mois d’incertitudes et d’une économie résiliente — marquée par des hausses successives du taux d’intérêt par la Banque du Canada qui souhaitait s’attaquer à l’inflation —, l’activité économique québécoise s’est finalement légèrement rétractée de 0,5% (- 0,2% au Canada) au cours du deuxième trimestre.
Or, advenant un autre recul de l’activité au cours des mois de juillet, août et septembre, l’économie connaîtrait alors un deuxième trimestre négatif consécutif. Dans sa définition simpliste, elle sera ainsi théoriquement en récession. Mais ce n’est pas une raison suffisante pour crier à la récession.
De nombreux économistes, et j’en suis, préfèrent une définition moins technique. Appelons ça le concept du verre à moitié plein, plutôt qu’à moitié vide. Nous considérons que seule une baisse généralisée et significative du PIB et de l’emploi permet de déterminer si une récession a bel et bien lieu. Le PIB réel américain, rappelons-le, a reculé en première moitié de 2022, mais sans grands dommages alors que le taux de chômage était à 3,8%, et donc, sans qu’on parle véritablement de récession.
En période de récession, on s’attend plutôt à des baisses marquées de la demande et des dépenses de consommation, des ventes au détail, de la production industrielle, des bénéfices des sociétés qui, mises ensemble, entraînent des licenciements et une hausse du chômage. Cet effet domino engendre des pertes de revenus et une réduction importante de l’activité économique.
Les signes de l’effet escompté des hausses de taux commencent certainement à se manifester. Le recul des dépenses d’investissement, le ralentissement de l’accumulation des stocks et la diminution des dépenses de consommation sont autant de facteurs qui ont contribué à la baisse du PIB le printemps dernier.
Les secteurs qui sont plus sensibles aux hausses de taux d’intérêt, comme la construction résidentielle, le commerce de détail et de gros, la foresterie ou encore l’hébergement et la restauration, ont connu un recul au cours du deuxième trimestre. Mais ces secteurs représentent le quart de l’activité économique québécois et la plus grande vigueur des autres industries et services, qui contribuent donc à hauteur de 75%, ont permis à l’économie québécoise de se tenir à flot et d’atténuer l’ampleur de la baisse du PIB.
Si la cause du ralentissement de l’activité économique ne fait pas dérailler fortement l’ensemble des différents maillons de l’économie, il est difficile de parler véritablement de récession. Or, force est de constater aujourd’hui que l’économie québécoise, avec son taux de chômage qui reste stable autour de 4,4%, est loin de connaître les fortes turbulences qui ont mené à la récession de 2020, causée par la pandémie mondiale, ou celle de 2008-2009, engendrée par la crise financière internationale.
La croissance économique devrait assurément rester faible au cours des prochains mois. Elle sera certainement alternée de trimestres positifs et négatifs, peut-être même consécutifs, qui témoigneront de son ralentissement et non pas d’une récession marquée. Car, oui, il y a bel et bien une différence.
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