Pour l’une des premières fois, le gouvernement exprime que le Ministère devrait se concentrer sur les orientations et la mesure du rendement, et que c’est plutôt le réseau qui devrait mener les opérations. (Photo: Piron Guillaume pour Unsplash)
BLOGUE INVITÉ. Mardi dernier, le ministre de la Santé, Christian Dubé, nous présentait son plan de réforme du système de santé pour les prochaines années. Contrairement à la poutine habituelle, il a été notamment question de faire davantage de place au privé en santé. Il faut dire que puisque le secteur privé se fait démoniser année après année malgré tous les bénéfices qui lui sont associés, Christian Dubé présente une ouverture à une contribution accrue des entrepreneurs. Maintenant que les chaudrons sont sortis, il reste l’étape cruciale de préparer la soupe aux pois et d’ajouter des épices pour que le plan soit plus audacieux et complet.
Qui seront les trouble-fêtes?
Étant donné les 50 milliards de dollars versés annuellement au système de santé, il est impensable de continuer à se satisfaire d’un mammouth fiévreux manquant de dynamisme. La pandémie a mis en lumière les problèmes que nous connaissions depuis maintes années, à savoir le manque flagrant de lits d’hôpitaux, l’inflexibilité du système face aux travailleurs de première ligne, la culture du cloisonnement entre professions et le manque de transparence en ce qui a trait aux données, pour n’en nommer que quelques-uns.
Demandez à n’importe quel psychologue, la première étape de résolution d’un problème est d’en prendre véritablement connaissance. Étape faite. Maintenant, il faut se lever du fauteuil, se regarder dans le miroir, et travailler sur soi. Le plan proposé met sur papier plusieurs solutions, et nous devons maintenant les appliquer et le rendre plus complet.
Toutefois, qui dit changement dit opposition et scepticisme. Même si les changements proposés dans le cadre du plan de refonte sont bénéfiques. Après tout, on parle de financement axé sur le patient (enfin!), d’ajout de lits d’hôpitaux, de contribution accrue des cliniques privées de santé, de décloisonnement des professions, et tout cela en maintenant l’universalité du système.
L’histoire nous prouve toutefois que des groupes, que ce soit par exemple les partis d’opposition ou les syndicats, finissent par ralentir le changement et créent un clivage entre les réformes appliquées et le désir de la population d’avoir accès à un meilleur système de santé. Pendant ces chicanes de famille, la population québécoise continue de compter plus de 157 000 patients sur la liste d’attente pour une chirurgie, dont 35% attendent depuis plus de six mois.
Les solutions manquantes
Loin de moi l’idée de ternir les efforts du ministre dans son début de réformes nécessaires, mais si nous souhaitons réellement libérer le potentiel du système de santé et fournir aux travailleurs les moyens de leurs ambitions, le gouvernement doit aller beaucoup plus loin dans sa refonte.
En plus des solutions proposées, il faut lever l’interdiction de souscrire une assurance duplicative pour la population, puis celle qui empêche la pratique mixte. Si les citoyens étaient libres de souscrire une assurance privée dupliquant les soins couverts par le régime public, et ensuite de faire affaire avec la clinique de leur choix, nous contribuerions, entre autres, à désengorger le système public et les patients trouveraient davantage leur compte.
Pour ce qui est de la pratique mixte, il faut cesser d’empêcher les médecins de pratiquer à la fois dans le système géré par le gouvernement et celui géré par les entrepreneurs. À ceux et celles qui craignent un exode des médecins vers le secteur privé, répondons que si cette mesure est jumelée à l’élimination des quotas dans les facultés de médecine et si on simplifie le processus d’intégration pour les médecins formés à l’étranger, leurs craintes devraient être bien moindres!
De surcroît, tout en maintenant l’universalité du système, on devrait inclure davantage d’entrepreneurs dans la gestion des établissements de santé, et faciliter la création d’hôpitaux gérés entièrement par le secteur privé. Et ce, rappelons-le, sans que les patients aient à sortir un sou pour leurs soins. L’État continue à être l’assureur par défaut, et la gestion est déléguée aux entrepreneurs. Ai-je réellement à vous convaincre que le gouvernement n’est pas spécialisé dans la gestion?
C’est d’ailleurs ce type de réformes qui a permis à l’Allemagne, à la Suède, au Royaume-Uni et à la Suisse de jouir de systèmes de santé beaucoup plus efficaces que le nôtre, tout en améliorant l’accès aux soins.
Pour l’une des premières fois, le gouvernement exprime que le Ministère devrait se concentrer sur les orientations et la mesure du rendement, et que c’est plutôt le réseau qui devrait mener les opérations. Ce désir de décentralisation est rafraîchissant, et se matérialisera seulement si des entrepreneurs et des gestionnaires du secteur privé sont impliqués dans les réformes. Souhaitons maintenant que les bottines suivent les babines, et qu’on débute un réel processus de refonte.