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BLOGUE INVITÉ. Nous sommes déjà à la fin de 2022 qui pourrait être décrite comme l’année des montagnes russes dans l’écosystème des start-ups.
Les trois premiers mois ressemblaient bizarrement aux fêtes dans le film « The Great Gatsby » dans les années 1920 tandis que les mois suivants ressemblent beaucoup au film « Titanic ».
Au cours du 1er trimestre, l’argent des investisseurs dans le capital de risque continuait de couler à flots, comme ce fut le cas en 2021. Nous parlions de valorisation démente pouvant dépasser vingt fois les revenus pour des entreprises avec de lourdes pertes financières. Le tout était principalement relié à la facilité pour les investisseurs d’emprunter de l’argent bon marché pour investir dans des actifs risqués. Les valorisations des start-ups montaient en flèche, car les montants des financements étaient toujours plus haut et malgré tout, les investisseurs se battaient pour mettre leur argent sur n’importe quel projet dès qu’ils affichaient des courbes de croissance magiques. Oui, oui, cette courbe magique qu’une start-up présente et qui fait que, sans réel plan clair, elle passera rapidement de 100 000$ de revenus récurrents à 12 millions $ en 2-3 années.
Nous avons souvent l’impression que les investisseurs en capital de risque sont appuyés par une foule d’analystes ultra intelligents et que si ceux-ci investissent ces sommes, c’est qu’ils ont de bonnes raisons de croire que cela sera rentable. Qui voudrait perdre de l’argent? Personne! Pourtant, la plupart des acteurs de ce jeu étaient dans la bulle sans trop le savoir. J’ai l’impression que lorsqu’on commence à entrer dans ce jeu de la survalorisation, il devient difficile de se rendre compte qu’on est activement dans une bulle et à quel stade de la bulle on se trouve. Et généralement, il est trop tard lorsque vous le réalisez! Ce fut le cas, encore une fois.
Puis la fête s’est arrêtée, brusquement!
Comme l’iceberg heurté par le Titanic, tout l’écosystème a été touché par la hausse des taux d’intérêt et un mélange de facteurs économiques dont l’inflation, le ralentissement de la croissance, etc. L’argent n’était plus facilement accessible, du moins aux conditions précédentes. Les investisseurs ont commencé à geler leur investissement, gardant majoritairement leur capital pour accompagner leurs entreprises en portefeuille pour lesquels ils avaient déjà trop payé et les fondateurs à la recherche d’argent frais étaient majoritairement ignorés. « Chacun pour soi » est devenu la nouvelle normalité!
Les valorisations supersoniques autrefois célébrées ont été divisées par au moins cinq, la ruée vers les investissements stoppés et les licenciements sont rendus monnaie-courante autant dans les start-ups que dans les grandes entreprises technologiques.
Le marché s’adaptait après avoir été surpris par ce changement brusque des conditions financières attractives. Les premières actions ont été un arrêt brutal des financements (à l’exception de ceux dont les processus s’approchaient de la fin). Les secondes consistaient en une analyse approfondie des changements en cours et des perspectives offertes. Et les troisièmes étaient la définition des nouvelles politiques d’investissement comme celle de Y Combinator.
Retour à la réalité
Quelques leçons peuvent être tirées pour ceux qui ont apprécié la bulle jusqu’à son explosion. Le principal est qu’une bonne entreprise est une entreprise durable répondant à un réel besoin et soutenue par une voie claire vers la rentabilité. Oui, la rentabilité. Elle n’a pas à être toujours priorisée dans le plan à court terme, mais une entreprise solide aura clairement défini un plan lui permettant d’atteindre la rentabilité à relativement court terme et se gardera toujours deux options ouvertes : poursuivre sur des pertes financières compte tenu du potentiel de retour sur investissement à court terme ou rapidement se tourner vers une croissance plus faible, mais permettant une rentabilité accrue.
Malheureusement, la rentabilité était devenue quelque chose de « pas du tout important » lors des dernières années lorsque l’argent tombait du ciel et je crois qu’elle aurait pu sauver beaucoup d’entreprises face à ce ralentissement.
Essentiellement, une entreprise vise à résoudre un problème et/ou à créer quelque chose de nouveau qui va faciliter la vie des gens. C’est généralement ce qui pousse le fondateur à se lancer. Au-delà de cela, une structure doit être mise en place permettant d’atteindre les ambitions de l’idée initiale ainsi que de générer un cycle financier rendant cette idée durable!
Votre stratégie à court et moyen terme devrait prévoir comment vous serez en mesure de générer suffisamment de revenus récurrents pour couvrir vos dépenses (incluant le coût des marchandises vendues, les coûts fixes et variables, les employés, etc.) et votre levée de fonds devrait ne pas servir à cela, mais bien à financer des projets futurs et la croissance.
Bien sûr, cela se produit rarement dans les premières années d’une start-up, mais à moyen terme, les éléments clés pourraient déjà être visibles. C’est le piège dans lequel les gens à l’intérieur de la bulle sont tombés.
Soyons sincères, les fondateurs ne peuvent pas présenter à un groupe d’investisseurs une entreprise reposant principalement sur la croissance en négligeant les perspectives de rentabilité sous prétexte que l’acquisition de clients est plus importante et qu’il n’est pas du tout nécessaire de se préoccuper de la rentabilité. Et les investisseurs ne devraient surtout pas financer ce type d’entreprises qui n’ont pas une base solide simplement pour des perspectives de probables prochains tours de table plus importants ou d’une hypothétique introduction en bourse.
Le bon moment pour revoir le système?
L’écosystème start-up n’est sans doute pas sorti des zones de turbulences. Cette fois est-elle la bonne pour repenser ce qui motive la durabilité de l’écosystème dans le respect de toutes les personnes impliquées? Tout comme dans le monde du travail pour lequel je parlais de la grande réconciliation, allons-nous finalement en venir à un écosystème plus stable et basé sur de bonnes valeurs et non pas sur l’entreprise qui fera le plus de bruit dans les médias?
Permettez-moi d’en douter!