Se divertir en misant en Bourse sur des athlètes professionnels
Martin Lalonde|Édition de la mi‑mai 2024En 2021, Fernando Tatis Jr. a signé un contrat de 14 ans d’une valeur de 340 M $US avec les Padres de San Diego, ce qui a permis à BLA de générer un rendement sur le capital investi de 27,2 M $US. (Photo: Getty Images)
EXPERT INVITÉ. En gestion de portefeuille, on dit que la valeur d’un investissement est égale à l’actualisation de ses flux monétaires futurs. Ce qui rend l’activité de choisir un titre ou une catégorie d’actifs si intéressante est que ces flux monétaires futurs sont inconnus et varient dans le temps.
Les gestionnaires de portefeuille ont donc comme objectif principal de trouver les perles qui se négocient à une valeur présente qui ne représente pas, pour de multiples raisons, les possibilités de croissance des revenus dans un avenir plus ou moins lointain.
Plus ces revenus ou profits sont incertains, plus grande est la possibilité de se démarquer et de trouver les investissements qui vont changer les choses sur le plan du rendement total.
En ce qui a trait à l’incertitude des revenus futurs, il n’y a pas beaucoup de domaines plus imprévisibles que celui des athlètes sportifs. Il suffit de revenir quelques années en arrière et d’analyser les choix de première ronde des différentes ligues professionnelles pour se rendre compte rapidement que les équipes se trompent, et se trompent souvent.
Afin de diminuer le risque pour les athlètes à fort potentiel, et aussi générer un rendement possible intéressant pour les investisseurs, un modèle innovant, mais aussi éthiquement discutable s’est créé. Il est donc possible depuis quelques années d’investir dans les revenus des athlètes «espoirs»des ligues sportives nord-américaines. Ces revenus ne se limitent pas seulement aux salaires et aux bonis de signature ou de performance. De nos jours, les sportifs de haut niveau peuvent aussi générer des revenus grâce à des contrats de marketing ou à des droits médiatiques.
Comme tout investissement, celui dans les revenus des sportifs comporte des risques. Le succès d’un placement dépend exclusivement de la performance future de l’athlète, qui peut être influencée par de nombreux facteurs, tels que les blessures, les changements dans l’industrie, etc. De plus, la gestion des contrats peut être complexe et nécessiter une expertise juridique très spécialisée.
Dans ce domaine. Big League Advantage (BLA) est une entreprise fascinante. Le concept est simple:verser aux joueurs de baseball de ligues mineures un paiement initial en échange d’un pourcentage de leurs futurs gains. L’arrangement n’est pas considéré comme un prêt. Les joueurs ne doivent rembourser la somme forfaitaire que s’ils parviennent à jouer dans les ligues majeures. S’ils échouent, BLA enregistre une perte. L’entreprise fonctionne donc de manière similaire aux sociétés de capital de risque.
Elle conclut plus de 100 accords par année.
Le joueur d’arrêt-court/champ droit Fernando Tatis Jr.a été le plus grand succès de BLA à ce jour. En 2017, il a accepté de verser environ 8 % de ses futurs gains en échange d’un paiement initial estimé à 500 000 $US, qu’il a reçu à l’âge de 17 ans et qu’il a dépensé pour son entraînement personnel, sa nutrition et son logement.
Avançons rapidement jusqu’en 2021. Tatis Jr.a signé un contrat de 14 ans d’une valeur de 340 M$US avec les Padres de San Diego, ce qui a permis à BLA de générer un rendement sur le capital investi de 27,2 M$US ! Ce succès initial a couvert la valeur totale du fonds inaugural de 26 M$US de BLA qui était réparti entre 77 joueurs.
Le succès de BLA a conduit à la création de deux fonds supplémentaires de 130 M$US et de 250 M$US, offrant aux investisseurs une exposition unique au monde du sport et augmentant les chances que d’autres joueurs de ligues mineures sans moyens financiers importants aient également la possibilité de réaliser leurs rêves.
Mais ce serait mal connaître nos voisins du Sud de s’arrêter à ce stade. Une nouvelle plateforme, appelée Vestible, a reçu en février l’aval des autorités réglementaires américaines pour permettre l’achat et la vente d’actions liées aux revenus de joueurs particuliers.
Les fans qui s’inscriront sur la plateforme pourront commencer par acheter des actions du secondeur en pleine ascension des Broncos de Denver, Baron Browning, qui entre dans la dernière année de son présent contrat en 2024, où il devrait gagner environ 3,1 M$US.
Vestible mettra en vente jusqu’à 100 000 actions à 10 $US chacune dans l’offre publique initiale de Baron Browning. En retour, le joueur s’engage à verser 1 % de tous ses gains financiers futurs à la plateforme, qui versera ensuite aux actionnaires des distributions sous forme de dividendes mensuels. Les actionnaires pourront aussi échanger les actions du joueur sur la plateforme.
De son côté, Baron Browning recevra 80 % des recettes de son introduction en Bourse.
Évidemment, je ne conseille nullement aux investisseurs d’intégrer ce type de placement à un portefeuille pour la retraite. Mais il est évident que c’est un produit intéressant ou à tout le moins divertissant pour les amateurs de sports. Imaginez des actions de Cole Caufield ou de Nick Suzuki ! est président-fondateur des Investissements Rivemont, une firme spécialisée en gestion privée traditionnelle et alternative.