(Photo: Headway pour Unsplash.com)
EXPERT INVITÉ. Si vous n’avez pas le courage de demander, la seule réponse que vous obtiendrez est «non».
Il y a quelques années, dans le cadre de l’acquisition d’une entreprise, l’avocat de la partie adverse m’a transmis un document qui contenait une foule de demandes que je considérais comme complètement loufoque et qui était très loin de l’accord verbal que j’avais eu avec le vendeur.
Rapidement, j’ai écrit au vendeur, copiant évidemment son avocat pour dire à quel point je trouvais cette proposition «merdique» et qu’il était clair que je n’allais pas accepter ses termes. La réponse de l’avocat fut à la fois simple, mais remplie de sens: «Monsieur Gagnon, si vous ne demandez pas, vous n’obtiendrez jamais». Sur le moment, j’avoue que cela m’a contrarié. Cependant, avec le recul, ma perception a évolué, et je considère désormais ce principe de «si tu ne demandes pas, tu es certain de ne rien obtenir» comme l’un des meilleurs conseils que l’on puisse recevoir. Pas seulement dans les affaires, mais dans la vie aussi!
Trop souvent, nous craignons simplement de demander quelque chose, de peur que l’autre partie se fâche (comme je l’ai fait contre cet avocat) ou encore de paraître déraisonnable. Mais d’après mon expérience, cela se produit que dans une minorité de cas. Dans la majorité des cas, lorsque j’ose demander ce que j’aimerais, je reçois comme réponse un «Oui» ou simplement une contre-proposition qui vise à combler la différence entre mes demandes et ce que l’autre partie souhaite. Au minimum, le fait d’avoir demandé permet à l’autre partie de comprendre mes motivations.
Un principe fort en vente
De manière surprenante, l’un des endroits où j’ai souvent vu le plus de difficulté à oser demander est dans la «vente». En effet, de nombreux vendeurs souvent par peur du rejet ou par souci de ne pas paraître trop insistants hésitent à poser des questions cruciales qui pourraient non seulement clore une vente, mais également ouvrir la porte à des propositions plus avantageuses. Pourtant, dans le domaine de la vente, le principe de «ne pas demander, ne pas obtenir» trouve une résonance particulièrement forte. Il est évident que, tout comme dans les négociations, ne pas exprimer clairement ses attentes ou ses besoins peut mener à des opportunités manquées.
Cette réticence à demander se manifeste de différentes manières: incapacité de demander au prospect s’il va signer, la peur d’offrir des produits et services supplémentaires ou une simple question comme «que puis-je faire pour conclure le dossier?». Le fait de ne pas demander nuit clairement au processus de ventes. Sans ces demandes, de nombreuses transactions potentielles restent inexplorées laissant ainsi échapper des opportunités d’affaires précieuses.
En effet, l’acte de demander dans le contexte de la vente ne se limite pas à l’achèvement d’une transaction, il s’agit également d’explorer les besoins du client, de découvrir des opportunités et de construire une relation de confiance et de compréhension mutuelle. Une question posée au bon moment peut révéler un besoin non exprimé menant à des propositions qui bénéficient à toutes les parties impliquées.
Ainsi dans la vente comme dans les négociations, le courage de poser des questions et de demander plus peut transformer une simple interaction en une opportunité d’affaire significative. Il est donc crucial pour les vendeurs de surmonter leurs appréhensions et de reconnaître que derrière chaque demande se cache un potentiel de succès et de croissance.
La manière de demander les choses
Évidemment, le fait de ne pas demander implique automatiquement de ne pas recevoir ce qu’on souhaiterait. En revanche, tout comme pour l’avocat dans ma transaction, il peut aussi être très maladroit de demander d’une mauvaise manière et le tout pourrait être perçu négativement. C’est pourquoi il est impératif de réfléchir aussi à la manière dont on demande les choses.
La façon dont vous formulez votre demande est essentielle et dépend largement du contexte. Plusieurs facteurs doivent être pris en compte: la nature de la demande, l’identité du destinataire, la qualité de votre relation, ainsi que la dynamique de pouvoir existante.
Demander quelque chose à votre patron est évidemment différent de demander la même chose à quelqu’un qui travaille pour vous. Demander quelque chose de crucial est différent de demander quelque chose qui ne vous importe pas vraiment. Vous devez considérer combien de capital relationnel vous pourriez dépenser dans «la demande» et si le fait de mettre quelqu’un en colère par inadvertance (et potentiellement de faire échouer toute la négociation) en vaut la peine.
Il est parfois impossible de prévoir comment une demande sera perçue. Plusieurs études ont démontré que la réception d’une demande peut varier grandement en fonction de facteurs contextuels — dont évidemment la manière de demander.
En plus de considérer à qui l’on s’adresse, il est crucial d’évaluer la situation. Dans certains contextes, un ton modeste peut être approprié, tandis que dans d’autres, une approche plus directe pourrait être privilégiée. La flexibilité et l’adaptabilité sont donc de mise, car certaines méthodes peuvent être plus efficaces pour certains que pour d’autres. Par exemple, si vous n’êtes pas certain de la réceptivité de votre interlocuteur, un excellent truc est de demander des choses en utilisant des questionnements comme «je me trompe peut-être, mais…», «ne pensez-vous pas que…» ou «peut-être que…». Cela laisse une ouverture à l’autre pour se positionner.
Je suppose que la conclusion évidente est que ce qui fonctionne pour certains d’entre nous n’est peut-être pas approprié pour nous tous. Ainsi, une grande partie de l’efficacité consiste à trouver votre style personnel. Et un autre élément important est d’être sensible au contexte et à la personne interrogée. Il y a beaucoup de variables à suivre ici, mais il y a une certitude: il faut demander.
Lancez-vous: il est vrai que demander ne vous garantit pas d’obtenir la réponse souhaitée. Mais si vous ne posez pas la question, la seule réponse que vous obtiendrez sera «non».
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