Julien Moquin, diplômé en génie industriel de Polytechnique Montréal, fait partie de l’équipe gagnante de la compétition d’entrepreneuriat des Jeux de génie 2019. (Photo: courtoisie)
MOIS DU GÉNIE. On dit que de participer à la compétition d’entrepreneuriat des Jeux de génie du Québec équivaut à suivre un cours universitaire complet. Samuel Arsenault et ses acolytes le confirment. L’automne dernier, les quatre étudiants en génie de l’École de technologie supérieure (ÉTS) ont investi plusieurs dizaines d’heures dans la fastidieuse préparation à cette compétition, dont le thème était « De la terre à nos assiettes ». L’objectif : mettre au point une technologie capable de renverser les tendances actuelles dans l’industrie agroalimentaire, « une des premières sources d’émissions de gaz à effets de serre », peut-on lire dans le cahier du participant.
Le jeu en aura toutefois valu la chandelle. Grâce à son prototype très convaincant, la délégation a non seulement permis à son alma mater de remporter cette compétition en janvier, mais elle a aussi mis la main sur une des rares places du programme Accélération du Centech, l’accélérateur d’entreprises technologiques de l’ÉTS qui commanditait l’épreuve. « Concrètement, cela signifie que nous pourrons amener plus loin notre projet lors de l’été 2020. Nous disposerons de 12 semaines pour peaufiner E-Sac et, nous l’espérons, passer [au programme suivant du Centech] Propulsion, qui dure deux ans », explique Samuel Arsenault, étudiant de deuxième année en génie industriel.
En quoi consiste E-Sac ? Il s’agit d’un service de consigne de sacs réutilisables, sous forme de bornes distributrices, qui permet de se procurer ledit accessoire, puis de le ramener après utilisation. Mine de rien, cela réduirait de beaucoup la mise en circulation de cet accessoire polluant.
Nouvelle compétition
En 2020, la compétition d’entrepreneuriat des Jeux de génie n’en était qu’à sa deuxième édition. Malgré sa relative nouveauté, elle n’a pas tardé à faire sa place dans l’agenda du plus important rassemblement étudiant de génie du Québec, racontent Eduard Paraschivescu et Philippe Daneau, cofondateurs de la compétition. « C’est une épreuve qui s’inscrit dans l’air du temps ; on parle plus que jamais de l’entrepreneuriat et de son importance. Surtout, elle interpelle des étudiants qui ne s’y retrouvaient pas nécessairement, dans la compétition de la machine robotique, qui fait figure d’épreuve maîtresse des Jeux », soulignent ces ex-participants.
La compétition d’entrepreneuriat se divise en trois volets distincts, soit le développement et la production d’un prototype, la rédaction d’un plan d’affaires complet et la préparation d’un court discours de vente (le fameux pitch) afin de convaincre de trois à cinq juges triés sur le volet. Les délégations participantes – elles étaient sept en 2020 et neuf en 2019 – planchent pendant tout l’automne sur leur prototype et leur plan d’affaires avant de réaliser leur pitch en janvier, lors des Jeux de génie. Fait intéressant : la grille d’évaluation met davantage l’accent sur le plan d’affaires et la présentation (25 % chacun), des compétences connexes au métier d’ingénieur, que sur le prototype (20 %).
« Ça reflète le caractère particulier de cette compétition, tout en envoyant un message fort : de nos jours, l’Ingénieur, avec un grand « I », se doit d’être polyvalent. Il ne peut plus se contenter d’être un excellent technicien; il doit aussi être capable de bien communiquer, de bien vendre ses idées, de bien cibler un besoin et un marché… », estiment Eduard Paraschivescu et Philippe Daneau. Selon eux, les compétences générales cultivées par les participants à cette initiation ludique à l’entrepreneuriat représentent un avantage sur le marché du travail. « C’est assurément un plus pour leur curriculum vitæ, de même que pour leur réseau de contacts. »
Fibre entrepreneuriale
Julien Moquin est bien placé pour le savoir. Le diplômé en génie industriel de Polytechnique Montréal fait partie de l’équipe gagnante des Jeux de génie 2019, dont le thème était l’amélioration de la qualité de vie au quotidien. Avec ses six comparses, il a mis au point le WaterWall, un dispositif en circuit fermé qui récupère, filtre, réchauffe et renvoie l’eau de la douche qui, autrement, aurait été évacuée par le drain. « Nous visions surtout les marchés comme l’Europe, où l’eau coûte cher », précise celui dont l’équipe aurait investi environ 1500 heures dans ce projet.
Malgré le fait que sa technologie n’a finalement jamais vu le jour, Julien Moquin estime être ressorti gagnant de ce remue-méninge. « Ça m’a entre autres permis de constater qu’il n’est pas nécessaire d’avoir une idée parfaite dès le départ. La vision romantique de l’inventeur foudroyé par un coup de génie, ça n’existe pas », tranche-t-il. « Je me suis découvert une fibre entrepreneuriale dont j’ignorais la vigueur. Ce n’est pas rien », conclut celui qui portera d’ailleurs le chapeau d’organisateur de l’édition 2021 de la compétition d’entrepreneuriat des Jeux de génie.