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Un déficit d’attention racial persistant dans les entreprises

Karl Moore|Publié le 27 octobre 2021

Un déficit d’attention racial persistant dans les entreprises

La question se pose: comment inverser les préjugés d’attention sur le lieu de travail ? (Photo: Cytonn Photography pour Unsplash)

BLOGUE INVITÉ. La diversité ethnique favorise les possibilités d’apprentissage en rassemblant une variété de perspectives, d’expériences et de savoir-faire. En dépit de ces bienfaits, des statistiques indiquent qu’il y a des disparités raciales en ce qui concerne la reconnaissance des opinions. Selon une nouvelle étude, les Américains blancs ont tendance à accorder moins d’attention à leurs pairs noirs, même lorsque c’est dans leur propre intérêt.

Le professeur adjoint à l’université du Texas à Dallas et chercheur à l’université Columbia, Sheen S. Levine, est l’auteur principal de cette recherche. Il explique que plusieurs personnes issues de minorités avec qui il s’est entretenu ont estimé que la promotion de la diversité leur a permis de trouver un emploi. Cependant, elles ne se sont pas toujours senties réellement intégrées.

L’étude expérimentale menée sur plusieurs années a porté sur plus de 2 500 travailleurs et travailleuses américains de race blanche. Les participants se sont fait présenter un puzzle conçu pour évaluer leur prise de décision autour de celles de collègues fictifs, dont les réponses étaient nécessaires à la résolution du puzzle.

En variant la race des collègues, les chercheurs ont pu noter si les participants étaient plus susceptibles de négliger les réponses d’un groupe racial. M. Levine ajoute que les personnes sondées percevaient les membres noires de leur équipe comme des égaux dès lors qu’on les informait de leurs compétences, diplômes universitaires ou des prix qu’ils auraient remportés. Toutefois, leurs réactions indiquent que le fossé comportemental persiste, car ils demeurent moins tentés de suivre les suggestions.

«Cet écart en comportement disparaît une fois que [les participants blancs] ont l’occasion d’interagir de manière répétée avec leurs collègues noirs et auraient vu par eux-mêmes la manière dont ils résoudraient les problèmes, dit-il.»

Les chercheurs qui ont amorcé leur recueil de données en 2017 se sont demandé si les efforts grandissants des initiatives d’équité, de diversité et d’inclusion auraient perturbé leurs premiers résultats. Ils ont donc reproduit leur expérience en 2020.

« Nous nous doutions qu’après le réveil qui a suivi le meurtre de George Floyd, il y aurait peut-être eu un renversement dans ce phénomène, affirme M. Levine. Malheureusement, nous avons constaté que ce n’est pas le cas. Il n’y avait aucune différence entre les résultats recueillis en 2017 et ceux recueillis en 2020 en matière de déficit d’attention racial.»

La question se pose : comment inverser les préjugés d’attention sur le lieu de travail ? Selon M. Levine, on ne devrait pas se contenter d’uniquement accueillir la diversité ou de mettre en valeur les compétences des collègues noirs. 

« Le conseil pratique est qu’il n’y a pas de solution rapide et facile au déficit d’attention raciale, et cela peut expliquer pourquoi les initiatives de diversité, la formation à la diversité et la formation aux préjugés implicites ne fonctionnent souvent pas, dit le chercheur. Plutôt que de tenter un programme qui résout le déficit d’attention raciale, nous nous intéresserons à l’interaction continue et aux indicateurs insidieux qui sont intégrés dans l’environnement organisationnel.»

L’étude suggère que ce qui entraîne un changement effectif des impressions raciales est l’expérience directe des réalisations de ses pairs. C’est en apprenant progressivement à connaître ses collègues de différentes ethnies en travaillant côte à côte que nous pouvons nous défaire des préjugés qui nous dictent nos actions.

Quelle est la leçon à tirer pour les entreprises ? L’accélération des initiatives en matière d’équité raciale n’aboutira pas en des résultats durables. Les efforts de diversité qui se limitent à regrouper des personnes d’ethnies différentes ne suffisent pas forcément pour résoudre les disparités raciales en matière de reconnaissance entre collègues. C’est en s’encourageant mutuellement à écouter activement nos collègues et à apprendre d’eux que nous pouvons élargir nos possibilités d’apprentissage pour devenir de meilleurs employés, dirigeants et personnes.

 

Karl Moore et Stéphanie Ricci. Karl est professeur agrégé dans la Faculté de gestion Desautels de l’Université McGill. Stéphanie est étudiante en journalisme à l’Université Concordia.