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Pierre Cléroux

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Pierre Cléroux

Expert(e) invité(e)

Une baisse des taux retardée?

Pierre Cléroux|Mis à jour le 18 juin 2024

Une baisse des taux retardée?

(Photo: 123RF)

EXPERT INVITÉ. La Réserve fédérale américaine a récemment annoncé ses couleurs. Confrontée au rebond de l’inflation qui a grimpé à 2,7% sur un an en mars dernier, alors qu’elle semblait pourtant sur le bon chemin pour finalement revenir à l’objectif de 2%, la Fed a non seulement décidé au début mai de maintenir ses taux d’intérêt, mais a aussi tenu à souligner qu’ils pourraient rester élevés plus longtemps que prévu. 

Cette décision aura-t-elle également pour effet de retarder la baisse tant attendue des taux d’intérêt au Canada? Si plusieurs craignent une telle situation, il n’y a pourtant pas lieu de s’en inquiéter. Il apparaît en effet clairement que la Banque du Canada annoncera comme anticipée une première baisse des taux dès cet été, en juin ou en juillet, donc avant la Fed qui devrait repousser une telle annonce jusqu’à l’automne.

 

Légende urbaine

Contrairement à la croyance populaire, la banque centrale canadienne n’a pas besoin de s’aligner sur les décisions de la Réserve fédérale en matière de taux d’intérêt. Si les deux institutions ont mené une politique monétaire similaire ces dernières années, avec des hausses de taux successives jusqu’en juillet 2023, c’était bien évidemment pour freiner la forte inflation qui sévissait aux États-Unis et au Canada. 

Mais la situation est différente aujourd’hui alors que, contrairement aux États-Unis, l’activité économique canadienne a perdu de son élan depuis un certain temps déjà et que l’inflation se retrouve sous la barre de 3% et à l’intérieur de la fourchette cible pour la première fois en quelque deux ans et demi. La Banque du Canada, qui prendra sa décision en fonction de la situation au pays, sera donc plus encline à réduire les taux d’intérêt dans les prochaines semaines. 

Les espoirs d’une baisse de taux prochaine aux États-Unis ont en effet été brisés par la trop bonne performance de l’économie américaine qui a connu une forte croissance de 2,5% l’an dernier, comparativement à 1,1% au Canada. Les consommateurs ont grandement contribué à cette vigueur, alors que le marché de l’emploi est demeuré solide et que le taux de chômage est resté faible à 3,8%. Encore aujourd’hui, le marché de l’emploi reste trop tendu au goût de la Fed. Le secteur privé a créé 192 000 emplois en avril, ce qui est moins qu’en mars, mais plus que prévu. Les investissements des entreprises et gouvernementaux ont aussi alimenté l’activité économique, contrairement à la situation au Canada. 

L’économie américaine ralentit, enfin!

On s’attend toutefois à ce que la croissance américaine s’atténue en 2024, comme l’indique la croissance de 1,6% enregistrée au premier trimestre. Les dépenses en biens de consommation ont en effet ralenti au cours des trois premiers mois, alors que les consommateurs ont épuisé leurs épargnes. Un nombre grandissant d’entre eux peinent même à payer les achats faits sur leurs cartes de crédit et les défauts de paiement de certains prêts ont aussi augmenté. Autre signe avant-coureur: les investissements des entreprises et gouvernementaux sont aussi en baisse. 

Les politiques américaine et canadienne de taux d’intérêt, qui ont évolué en tandem ces deux dernières années, ne suivront donc pas la même cadence dans les prochaines semaines. Mais ce n’est que partie remise, alors que la Fed devrait emboîter le pas dès cet automne et que l’écart de taux ne durera donc pas trop longtemps. Les répercussions sur le taux de change devraient ainsi s’avérer limitées.

 

 

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