La formation sera un aspect important pour que l'industrie de la construction arrive à appliquer les nouvelles exigences écoénergétiques provinciales. (Photo: courtoisie)
INDUSTRIE DE LA CONSTRUCTION. La formation sera un aspect important pour que l’industrie de la construction arrive à appliquer les nouvelles exigences écoénergétiques provinciales, selon des spécialistes en efficacité énergétique. Architectes, ingénieurs, entrepreneurs, promoteurs et travailleurs de la construction tardent toutefois à se former et l’adaptation pourrait prendre encore quelques années.
Philippe Hudon, formateur en efficacité énergétique à Akonovia, a donné plusieurs centaines de formations, notamment par le biais de Contech Bâtiment (qui, tout comme Les Affaires, appartient à Groupe Contex). Il s’adresse principalement à des architectes et à des ingénieurs. Ce sont eux qui ont la responsabilité de s’assurer que les plans et devis respectent les normes. Pour l’instant, la demande provient effectivement surtout de ceux qui sont impliqués dans la conception des bâtiments.
«Le gros morceau qui est nouveau est tout ce qui touche les ponts thermiques à travers l’enveloppe», précise Philippe Hudon. Il ajoute que le Québec était «en retard» par rapport aux autres provinces en matière d’efficacité énergétique et que la réglementation met l’accent sur cet aspect. Le sujet est abondamment discuté dans les séances de formation.
Philippe Hudon offrira d’ailleurs en mars une formation en ligne qui se concentrera sur l’analyse des ponts thermiques et les pistes de solution. Ces dernières toucheront à l’assemblage des murs et à la sélection des matériaux. «C’est dans les conceptions de coupes de mur qu’il faut travailler», note Philippe Hudon. Il faudra également utiliser de nouvelles technologies et implanter de nouvelles façons de faire, notamment en ce qui concerne les balcons ou l’ancrage.
Guide à venir
La Régie du bâtiment du Québec (RBQ) publiera prochainement, en collaboration avec Transition énergétique Québec, un guide sur l’application de l’ensemble des nouvelles exigences écoénergétiques. «Il y a également des outils de simulation de la performance de l’enveloppe et de l’éclairage qui seront accessibles dans quelques mois», précise Nathalie Brisson, architecte à la RBQ.
Elle ajoute que des documents ont été remis aux différentes associations de l’industrie, qui pourront les utiliser et les adapter pour permettre la formation de leurs membres.
L’Association de la construction du Québec (ACQ) en est par exemple à élaborer un tableau comparatif pour ses membres entre une version plus vieille et une plus récente du Code national du bâtiment du Canada, duquel sont issues les nouvelles exigences au Québec en matière d’efficacité énergétique. L’organisme offre également de la formation et des conseils techniques sur les changements dans le Code de la construction du Québec.
Idéalement, l’ACQ aimerait que la période de transition dure 24 mois plutôt que 18 ou 12 mois. «Nous considérons que ce serait la bonne période de temps pour que l’information soit bien véhiculée auprès des entrepreneurs et pour que le marché puisse s’adapter aux nouveaux produits demandés», souligne son porte-parole Guillaume Houle.
Marco Lasalle, directeur du Service technique à l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ), indique que les changements toucheront plusieurs corps de métiers. «La formation, ce n’est pas très avancé présentement, ajoute-t-il. Le problème principal n’est pas vraiment les matériaux, mais de comprendre comment appliquer les nouvelles exigences et de bien se coordonner», croit le directeur. Il s’attend toutefois à ce que ceux qui auront à construire immédiatement après le 27 décembre soient prêts.
Philippe Hudon anticipe cependant que les mois de novembre et de décembre seront très occupés. «Nous sommes à une étape où les gens repoussent le problème en avant, avance-t-il. Je vais me faire appeler à la dernière minute, quand les gens vont se demander quoi faire pour conformer leur chantier qui commence le 1er janvier 2022.»
La bonne exécution
Si les concepteurs doivent intégrer les nouvelles normes écoénergétiques, les constructeurs devront ensuite suivre leurs instructions. Les entrepreneurs et la main-d’oeuvre devront donc assister à des formations pour s’assurer de la bonne exécution.
«Ça ne peut pas juste être de la formation du côté des architectes et des ingénieurs, souligne Roland Charneux, directeur de la firme de génie-conseil Pageau Morel. Il faut notamment s’assurer qu’il y a une enveloppe étanche, que c’est bien scellé partout et qu’il y a une continuité de la résistance thermique.»
«Si on a un très bon mur avec un bon isolant, mais qu’il y a de l’infiltration d’air à travers l’isolant, on a perdu l’avantage de ce qu’on avait fait, illustre-t-il. Il y a une qualité de maind’oeuvre qui sera requise si on veut que l’étanchéité soit un succès.»
«Pour l’instant, la demande en formation est surtout chez les concepteurs, souligne Philippe Hudon. Cette vague-là viendra plus tard, quand les projets vont être en soumission et auront intégré la réglementation, pense-t-il. C’est un marché qui est beaucoup en réaction aux événements.»