Une PME crée des vêtements pour parler de santé mentale
La Presse Canadienne|Publié le 04 février 2021Juan Rincon et Samuel Choquette, les entrepreneurs derrière la PME de vêtements et d'accessoires Kool Apparel. (Photo: Ho-Kool Apparel, pour La Presse canadienne)
En pleine semaine nationale de prévention du suicide et pendant que la santé mentale collective est mise à rude épreuve, une toute jeune PME québécoise tente de faire sa part en véhiculant ses messages bienveillants, un vêtement à la fois.
Il y a un peu plus d’un an, trois jeunes entrepreneurs se lançaient dans la création d’une ligne de vêtements véhiculant un message de sensibilisation à l’importance de prendre soin de sa santé mentale. La PME Kool Apparel a depuis remis 8000 $ à divers organismes dédiés à la cause et les fondateurs ont l’intention de mettre toute la gomme pour accélérer la croissance de l’entreprise en 2021.
Trois colocataires et étudiants de l’Université de Sherbrooke, Juan Rincon, Samuel Choquette et Étienne Penelle créent ensemble le projet Kool Apparel à l’hiver 2019. Ils planchent sur l’entreprise de vêtements guidés par une philosophie de bien-être, d’authenticité et de normalisation du discours autour de la santé mentale.
La première collection de chandails et d’accessoires est lancée en septembre de la même année. Au cours de la première année d’activité de l’entreprise établie à Granby, Juan Rincon et Samuel Choquette ont décroché leur diplôme de kinésiologie de l’Université de Sherbrooke. Puis, Étienne Penelle a choisi de se consacrer à ses études en génie mécanique et a quitté l’entreprise après avoir contribué à la mettre sur les rails.
Malgré la pandémie, les embûches qui accompagnent le démarrage d’une entreprise et les rebondissements dans leurs vies respectives, les jeunes entrepreneurs ont tout de même réussi à remettre 8000 $ en dons à divers organismes. Ils ont notamment soutenu le Mouvement santé mentale Québec, Mon shack, mes choix, mon avenir, Oasis santé mentale Granby et région, Humain avant tout et Suicide action Montréal.
« On trouvait ça important de supporter les organismes qui sont là, qui font une super job, mentionne Samuel Choquette. On ne se verse pas de salaire encore, on réinjecte tout pour faire croître la compagnie, mais on ne voulait pas attendre trois ans ou cinq ans avant de faire des dons. »
La PME promet de verser au minimum 10 % de ses profits à divers organismes dédiés à la cause de la santé mentale.
Et si le duo d’entrepreneurs ne se verse pas de salaire, la paye vient des témoignages reçus des clients. Ils racontent le témoignage d’une jeune fille qui porte son « hoodie » Kool chaque fois qu’elle se rend chez sa psychologue parce qu’il lui donne de la force et qu’elle dit se sentir moins seule.
Une mère a également partagé aux entrepreneurs que son fils s’ouvre et parle de santé mentale chaque fois qu’il porte les vêtements Kool qu’elle lui a achetés.
« C’est vraiment ça notre paye. Les gens se sentent soutenus dans ce qu’ils vivent », se réjouit Juan Rincon.
Adapter le message
On n’a probablement jamais autant parlé de santé mentale au Québec, mais les campagnes publicitaires à grande échelle n’atteignent pas toujours les bonnes cibles, observe Juan Rincon l’un des cofondateurs des vêtements Kool. Lui-même ayant vécu une importante dépression lors de ses études universitaires, il confie que le langage employé dans les messages de sensibilisation n’était pas adapté à son état d’esprit.
« J’avais trop de mécanismes de défense, j’avais une trop grosse carapace émotionnelle, ce qui faisait en sorte que le message était trop explicite. Il ne parlait pas mon langage, ça m’attaquait au lieu de me sensibiliser », partage-t-il.
Ainsi, la réflexion de départ des partenaires portait sur la recherche d’une approche qui aurait pu être efficace pour toucher un jeune adulte ou un adolescent n’arrivant pas à reconnaître qu’il a besoin d’aide et à en demander.
« Je pense que ce dont j’ai surtout manqué, ce sont des modèles », mentionne le jeune homme d’origine colombienne. « Je viens d’une culture plutôt machiste et en plus j’ai évolué dans le milieu du football, donc il n’y avait que de la rigidité émotionnelle », ajoute le diplômé en kinésiologie de l’Université de Sherbrooke.
Kool Apparel choisit donc de s’adresser au jeune public par la voie de l’art, en utilisant les vêtements comme médium de diffusion. Les gens qui portent les chandails ou les accessoires, dont le design est conçu par Juan Rincon et une équipe d’artistes, deviennent ainsi des ambassadeurs faisant la promotion de l’ouverture, de la vulnérabilité et de l’importance de prendre soin de sa santé mentale.
D’ailleurs avant même de s’adresser aux autres, le message vise la personne qui porte les vêtements. C’est pour cette raison que le logo « KOOL » se lit « LOOK » lorsque l’on regarde son reflet dans le miroir.
« La culture de l’apparence, c’est qu’on est constamment en train de regarder à l’extérieur », mentionne M. Rincon. La philosophie de Kool s’appuie entre autres sur une phrase empruntée au psychiatre et philosophe Karl Gustav Jung qui dit: « Qui regarde à l’extérieur rêve. Qui regarde à l’intérieur s’éveille. »
« Les gens n’ont pas besoin de penser qu’ils sont des ambassadeurs, ils n’ont qu’à être qui ils sont. On veut simplement rapprocher tout le monde de leur propre essence, leur propre vérité, leurs propres émotions et d’en être fiers. Aussitôt que tu atteins ça, automatiquement tu as un impact sur tout ce qui t’entoure », poursuit le jeune entrepreneur.