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Vol d’identité: nous ne sommes qu’un numéro

Daniel Germain|Publié le 17 juillet 2019

Vol d’identité: nous ne sommes qu’un numéro

Durant mes vacances, en suivant l’évolution du feuilleton autour de cette fuite de données personnelles chez Desjardins, je m’estimais heureux d’être sur un autre continent (et dans une autre institution financière), loin du tumulte.

Là où je me la coulais douce, l’actualité était dominée par la canicule et par la conclusion de ce qu’on a appelé là-bas «l’affaire Vincent Lambert», une interminable saga judiciaire qui porte sur l’acharnement thérapeutique et le droit à mourir. C’est l’histoire d’une chicane de famille autour d’un homme dont la mort cérébrale ne faisait plus de doute, mais que sous l’insistance des parents on maintenait artificiellement en vie depuis des années. Un juge a finalement ordonné qu’on cesse les soins et qu’on débranche le pauvre homme.

Le récit du gigantesque vol de données chez Desjardins ne connaîtra vraisemblablement pas de conclusion aussi nette, du moins pas avant que le dernier des clients actuels ne soit mort lui aussi. Il persistera toujours une crainte, un doute. L’événement restera longtemps la cause présumée de toutes les usurpations du Québec. La coopérative n’avait donc pas d’autres choix, finalement, que d’offrir une forme de protection à vie à tous ses clients. Saluons la manière avec laquelle elle a répondu.

Sans vouloir atténuer la gravité du crime ni minimiser la responsabilité de l’institution financière, ce qui est arrivé chez Desjardins n’a rien d’inédit et pourrait se produire ailleurs. Tout part d’une intention malhonnête facilitée par des mesures de sécurité déficientes, mais il y a aussi un contexte favorable à ce genre de larcin.

Nous vouons un culte sans borne envers les technologies auxquelles nous sommes de plus en plus dépendants. Nous tissons autour de nous des systèmes qui nous exposent à des risques accrus de défaillance et de piratage. Dans le cas qui nous concerne, le réseau qui assure la fluidité de nos transactions permet également la fluidité de nos données. Sans cette technologie, il serait impossible de subtiliser et de revendre des quantités massives de renseignements personnels.

Il y a toujours moyen d’accroître la sécurité des infrastructures technologiques, c’est même un devoir quand tout le reste y repose. C’est avec pertinence que le patron de Desjardins a relevé le gênant anachronisme que représente le numéro d’assurance sociale (NAS), la clé qui permet de s’emparer de l’identité d’autrui. Il est assez préoccupant en effet qu’on puisse causer autant de dommage à l’aide d’un simple numéro à neuf chiffres.

Comme cela dépend des plus hautes instances, je n’entretiens pas trop d’espoirs de changement. L’histoire récente nous montre que l’État (au Canada du moins) a bien du mal à s’attaquer à des défis technologiques complexes, comme l’a démontré le fiasco du système de paie des fonctionnaires fédéraux ou encore l’incapacité de Québec à mettre en place, malgré des investissements massifs, un système de dossiers médicaux numériques.

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Si mon NAS était l’expression de mon moi

Comment aborder la question sans souligner nos contradictions en ce qui concerne nos renseignements personnels, offerts gracieusement à Google et à Facebook qui les exploitent jusqu’à l’os. Si nous ne divulguons pas nous-mêmes notre NAS à la planète, c’est qu’il nous identifie de la manière la plus désincarnée qui soit, un numéro. Il est muet quant à ce que nous distingue ou à l’image que nous voulons projeter.

Je suis sidéré (pour ne pas dire exaspéré) par l’intensité avec laquelle les gens révèlent des pans de leur vie sur les réseaux sociaux, leurs voyages, leurs amours, leurs maisons, leurs autos, leurs hamsters, leurs enfants… Si le NAS pouvait être le vecteur d’une humeur ou le révélateur d’un exploit, s’il pouvait parler ou mentir, s’il était mignon ou encore se beurrer la face de crème glacée, je parie qu’il serait partout sur Facebook, le NAS.

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On a mangé mes taxes

Je ne trouve pas d’explications au phénomène, à mon retour de vacances, j’ai constaté une petite nuée de moucherons gravitant autour de ma boîte à lettres. Il y en avait aussi à l’intérieur. Pourtant, rien ne traînait là pour les attirer, je n’y fais pas mûrir de bananes ou des melons.

Je me suis demandé si ça ne pouvait pas être la lettre qu’on y avait déposée, l’état de compte des taxes scolaires manipulé par un fonctionnaire aux doigts collants.

Par la petite fenêtre en plastique, j’ai constaté que ça grouillait dans l’enveloppe. Quand je l’ai ouverte, il y avait deux ou trois spécimens vivants parmi une dizaine de petits cadavres. Puis quoi? Mes taxes scolaires ont baissé!

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Écrivez-moi

Je reprends le «Courrier du portefeuille», alors n’hésitez à m’écrire si vous avez des préoccupations de nature financière qui pourraient donner lieu ici à une démonstration instructive.