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La Banque d’Angleterre monte encore son taux

AFP|Publié le 16 juin 2022

La Banque d’Angleterre monte encore son taux

La BoE tablait encore en février sur une augmentation de 1,25% du produit intérieur brut (PIB) en 2023. Elle anticipe désormais une contraction de 0,25% l'an prochain, après une première chute du PIB dès le dernier trimestre cette année. (Photo: Getty Images)

Londres — La Banque d’Angleterre (BoE) a annoncé jeudi une cinquième hausse consécutive de son taux directeur, à 1,25%, nouveau record depuis 2009, pour lutter contre l’inflation qui devrait selon elle dépasser 11% sur un an au Royaume-Uni en octobre.

La BoE n’a pas décidé d’augmenter ses taux de plus de 0,25 point, contrairement à la Réserve fédérale américaine, mais elle «sera particulièrement attentive aux indications de pressions inflationnistes persistantes, et répondra si nécessaire avec force», promet-elle dans les minutes de sa réunion.

Les prévisions pour la croissance et l’inflation n’ont pas été revues en détail lors de cette réunion, mais alors que l’inflation a grimpé en avril à 9%, un record depuis 40 ans, la BoE table désormais sur un pic à «plus de 11%» en octobre, quand le plafond régulé des prix de l’électricité sera revu à la hausse.

Comme les États-Unis ou la zone euro, les prix montent au Royaume-Uni en raison des perturbations des chaînes de production causées par la pandémie de COVID-19 et par la flambée des cours de l’énergie depuis le début de l’invasion russe de l’Ukraine.

Mais le pays, qui a débuté la hausse de ses taux fin 2021, fait également face à un ralentissement de sa croissance, avec une deuxième contraction mensuelle consécutive de l’activité économique en avril, et la BoE prévoit désormais une baisse de 0,3% du PIB au deuxième trimestre, avant un recul encore plus marqué à la fin de l’année.

Une croissance atone qui empêche donc la BoE de se montrer plus déterminée, contrairement à la Réserve fédérale américaine (Fed) qui a relevé mercredi son taux directeur de trois quarts de point, une première depuis 1994. 

La Banque centrale européenne (BCE) a tenu le même jour une réunion exceptionnelle pour tenter de rassurer sur le marché de la dette européenne tout en maintenant sa hausse des taux prévue en juillet.

Mais «l’augmentation des prix des services aux consommateurs, qui est plus directement influencée par les coûts locaux que celle des prix des biens, s’est accentuée ces derniers mois», reconnaît la BoE.

«Les difficultés à recruter restent élevées et la demande de travailleurs aussi», ajoute-t-elle, décrivant le marché du travail comme «toujours tendu», même si le taux de chômage est légèrement remonté au Royaume-Uni sur les trois mois achevés fin avril, à 3,8%.

Le Royaume-Uni digère notamment les conséquences du Brexit, qui a perturbé la venue de travailleurs européens, tandis que la reprise post-pandémie entraîne une forte demande et une guerre des salaires.

Trois des neuf membres du Comité de politique monétaire (MPC) ont cependant voté pour une hausse des taux de 0,5 point, comme en mai, jugeant que «la politique monétaire doit s’opposer avec fermeté au risque posé par la tendance récente de hausse des salaires, de décisions de montée des prix par les entreprises et d’attentes d’inflation» durable.

Malgré les hausses consécutives des taux depuis cinq réunions, la livre britannique souffre des perspectives moroses pour l’activité économique: elle chutait de 1% après les annonces de la BoE.

 

La banque centrale suisse crée la surprise en resserrant sa politique monétaire

Zurich — La banque centrale suisse a créé la surprise jeudi en relevant son taux directeur d’un demi-point au lendemain d’une hausse drastique de la Réserve fédérale américaine, prévenant que d’autres relèvements pourraient être nécessaires pour lutter contre l’inflation.

La Banque nationale suisse (BNS) a relevé son taux directeur à -0,25%, a-t-elle indiqué dans un communiqué à l’issue de sa réunion trimestrielle de politique monétaire.

Figée dans un statu quo monétaire ultra-accommodant avec un taux immuablement à -0,75% depuis 2015, la Banque centrale suisse a pour la première fois depuis cette date infléchi son discours en remettant l’accent sur l’inflation face à l’emballement qui sévit mondialement depuis l’invasion de l’Ukraine.

Si le taux directeur, passé en territoire négatif en 2015 pour la première fois, y reste, il s’agit néanmoins de sa première hausse depuis 2007.

«Nous avons décidé de relever les taux d’un demi-point, car des signes indiquent que l’inflation s’étend désormais à des biens et services non directement touchés par la guerre en Ukraine et par les conséquences de la pandémie», a expliqué Thomas Jordan, son président, lors d’une conférence de presse à Berne. 

«Nous voulons de cette manière contrer la pression inflationniste accrue», a-t-il déclaré, soulignant que «ce resserrement des rênes monétaires doit empêcher l’inflation de s’étendre en Suisse».

 

D’autres relèvements possibles

L’inflation en Suisse est plus faible que dans les autres économies, mais dépasse depuis février l’objectif de la BNS qui fixe le seuil de stabilité à 2%. En mai, elle a encore accéléré pour monter à 2,9%. 

La force du franc suisse avait jusqu’à présent aidé à freiner le renchérissement des produits importés. S’il avait bondi après l’invasion de l’Ukraine, il s’est depuis comparativement «déprécié en valeur pondérée par le commerce extérieur», a précisé le président de la BNS, expliquant que ce facteur avait pesé dans la décision de relever le taux directeur.  

Pour 2022, la banque centrale a relevé sa prévision d’inflation à 2,8%, après l’avoir déjà augmentée à 2,1% lors de sa précédente réunion trimestrielle en mars. Elle a également fortement augmenté sa prévision pour 2023, à 1,9% (contre 0,9% auparavant). 

«Il n’est pas exclu que de nouveaux relèvements de taux soient nécessaires dans un avenir proche pour stabiliser à moyen terme l’inflation», a prévenu la BNS dans le communiqué détaillant sa décision. 

Elle a cependant laissé sa prévision de croissance pour la Suisse inchangée, à 2,5% pour 2022. 

Ce resserrement de taux, qui s’appliquera aussi aux avoirs que doivent lui confier les banques et institutions financières, s’appliquera à compter du 17 juin.

Il intervient au lendemain d’un tour de vis de la Réserve fédérale américaine qui a procédé à sa plus forte hausse de taux depuis 1994 en les relevant de trois quarts de point. Mais elle devance la Banque centrale européenne (BCE) qui avait de son côté fait part la semaine dernière de son intention d’entamer un cycle de hausse de ses taux directeurs en juillet. 

De nombreux cambistes s’attendaient à ce que la BNS commence à infléchir sa politique monétaire, mais plutôt une fois la hausse des taux de la BCE lancée.

«La décision de la Banque nationale suisse de rejoindre ses homologues dans la lutte contre la hausse de l’inflation, en adoptant une politique monétaire plus stricte, a donné tort aux marchés», a réagi Ricardo Evangelista, analyste chez ActivTrades, dans un commentaire de marché. 

A 7h55, heure du Québec, le franc suisse gagnait plus de 1,4% face au dollar et plus de 1,9% face à l’euro.

Selon David Oxley, économiste européen chez Capital Economics, il possible que la BNS remonte son taux directeur à zéro, «ou peut-être même en terrain positif» avant la prochaine réunion trimestrielle en septembre, compte tenu de «la vitesse» à laquelle le paysage est en train de changer au niveau des politiques monétaires, a-t-il présumé dans un commentaire de marché.