L'administration Biden veut que l'avantage fiscal pour l'achat de voitures électriques soit valide pour les véhicules assemblés aux États-Unis. (Photo: Getty Images)
ANALYSE. Sans tambour ni trompette, les politiques protectionnistes des différentes administrations à Washington sont en train «d’américaniser» tranquillement les chaînes d’approvisionnement de l’Amérique du Nord.
Cette américanisation fait en sorte que les entreprises canadiennes et mexicaines doivent investir de plus en plus aux États-Unis afin de continuer à avoir accès au marché américain.
Cet enjeu crucial sera abordé à coup sûr lors du sommet des «Trois amigos», qui débute ce jeudi à Washington entre le Canada, les États-Unis et le Mexique.
Oubliez le trumpisme et le protectionnisme de l’ex-président Donald Trump à la sauce républicaine.
Ces politiques –qui vont à l’encontre de l’esprit du libre-échange nord-américain– ont commencé à voir le jour sous l’administration démocrate de Barack Obama.
Après la grande récession de 2007-2009, elle a renforcé le Buy American Act (favorisant les achats de biens du gouvernement fédéral) et le Buy America (s’appliquant aux achats afférents aux transports évalués à plus de 100 000 $US).
L’administration Trump en a rajouté une couche. Elle a forcé la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) afin d’y inclure des clauses renforçant le contenu américain dans les projets financés par des fonds fédéraux.
Depuis un an, l’administration Biden n’a fait que poursuivre ces politiques bipartisanes, notamment avec son projet pour la vente des voitures électriques aux États-Unis, un sujet qui inquiète au plus haut point l’industrie automobile au Canada.
Des voitures électriques assemblées aux États-Unis
Dans son plan de relance économique (qui favorise la transition énergétique), la Maison-Blanche veut faire en sorte que son crédit d’impôt de 12 500$US pour favoriser l’achat de ces véhicules aux États-Unis ne soit valide que pour les voitures assemblées dans des usines américaines.
Si elle voit le jour, cette mesure aurait un impact majeur sur les fabricants de voitures électriques au Canada, qui seront désavantagés par rapport aux fabricants américains, affirme Véronique Proulx, PDG de Manufacturiers et exportateurs du Québec.
«Ça va vouloir dire que des entreprises canadiennes vont devoir s’installer aux États-Unis pour continuer à avoir accès au marché américain», dit-elle.
Comme plusieurs observateurs, Véronique Proulx, estime qu’il faudrait plutôt avoir une approche commune continentale, en mettant en place un «Buy North American».
Cette politique favoriserait une production et des achats locaux, mais sur une base continentale, et non pas américaine. La PDG de MEQ est toutefois consciente que c’est un projet à long terme.
Car, si cette approche est souhaitable sur le plan économique, la concrétiser en politique publique dans un avenir prévisible est une autre paire de manches.
À l’approche des élections de mi-mandat en novembre 2022 puis de l’élection présidentielle en novembre 2024, on voit mal comment l’administration Biden pourrait reculer complètement sur ces politiques populaires auprès de l’électorat aux États-Unis.
«L’Amérique d’abord», dit le fameux slogan de Donald Trump, qui est devenu bipartisan au sud de la frontière.