Ce soir-là de juillet, c'est fête ! C'est l'avant-première du film Ghostbusters version Moment Factory au Ciné-Parc ...
Ce soir-là de juillet, c’est fête ! C’est l’avant-première du film Ghostbusters version Moment Factory au Ciné-Parc Orford, en Estrie. Des centaines de voitures roulent au ralenti dans le champ afin de trouver un bon emplacement, entre deux poteaux lumineux aux lueurs ectoplasmiques ; parmi elles, de belles Américaines des années 1960 et même une réplique de la fameuse Ecto-1, l’ambulance Cadillac transformée en bolide équipé pour la chasse aux fantômes. Les parents sortent les chaises pliantes et vont se procurer un sac de popcorn, les enfants courent partout en poussant des hululements. Tout le monde se sent en sécurité, prêt à passer un bon moment empreint de nostalgie des années 1980, cette époque bénie où personne n’imaginait une pandémie planétaire possible : chacun étant en plein air à bonne distance les uns des autres, aucun masque n’est sorti, une douce insouciance s’installe tranquillement…
La nuit tombe, l’écran géant s’allume et le générique trépidant de Ghostbusters démarre à fond de train. Des cris de joie surgissent ici et là, vite suivis de cris d’horreur lorsque la bibliothécaire new-yorkaise croise soudain le fantôme d’une vieille lectrice assidue. Dans le champ, les jeux de lumière de Moment Factory, un studio montréalais de divertissement multimédia, rivalisent d’ingéniosité : les poteaux lumineux clignotent de manière stroboscopique à l’approche d’un fantôme tandis que des rais multicolores zèbrent la forêt noire entourant l’écran géant. Chacun se sent plongé dans le film, en plein coeur des scènes cauchemardesques pour, au fond, son plus grand bonheur.
«Notre objectif, c’était de tirer du positif de la crise actuelle, d’en profiter pour imaginer et présenter le ciné-parc du futur, raconte François Pradella, le nouveau copropriétaire du Ciné-Parc Orford. Avec Moment Factory, on a créé un spectacle audiovisuel immersif afin d’offrir une toute nouvelle expérience culturelle aux spectateurs. Vu les réactions des gens, je pense qu’on peut d’ores et déjà dire que l’opération est une réussite…»
Les chiffres corroborent cette impression : en dépit d’une météo peu clémente, 713 véhicules ont été enregistrés lors de la première semaine d’exploitation, si bien que le ciné-parc compte en attirer le double, les semaines suivantes.
Avec «Ghostbusters» au Ciné-Parc Orford, l’objectif de Moment Factory « était de tirer du positif de la crise actuelle, d’en profiter pour imaginer et présenter le ciné-parc du futur », raconte François Pradella, le nouveau copropriétaire du Ciné
«À Moment Factory, nous valorisons l’expérience collective par-dessus tout. Ce qui explique notre enthousiasme pour ce projet : il s’agit d’une activité culturelle locale qui met en valeur les talents d’ici et qui vise à faire vivre une expérience inédite au public», dit le producteur Daniel Jean.
Une centaine de personnes ont contribué à la conception du spectacle et à la préparation du site, en pleine période de confinement. Sur place, il a fallu aménager le champ et ses installations électriques, et même créer un parcours en forêt parsemé de drôles de personnages, de créatures étranges et de jeux de lumière intrigants, histoire de mettre le public dans l’ambiance avant d’assister au film. Comme quoi, la crise peut avoir du bon, à condition d’apprendre l’art du rebond.
L’art du rebond ? Il concerne cette capacité que nous avons tous de donner un coup de pied au moment même où nous touchons le fond et d’ainsi nous propulser vers la surface. Notre faculté à nous adapter à l’imprévu, à saisir l’occasion qui se présente à nous, à attraper les cheveux du dieu Kairos qui volent au vent, comme disaient les Grecs.
Des employés mis au vert
Cet été, Republik a mis ses employés au vert. L’agence montréalaise de communication a ouvert un bureau éphémère dans le vieux village de Mont-Tremblant, dans les Laurentides, et a loué un chalet dans les environs afin qu’une poignée d’employés puissent y travailler quelque temps, à tour de rôle.
«L’idée nous est venue en remarquant des gens qui avaient le privilège de vivre leur confinement à l’extérieur de la métropole, pour qui les bienfaits de la nature se manifestaient de façon tangible, dit Martin Bertrand, responsable de la culture à Republik. Nous étions 100 % opérationnels en télétravail, mais nous avions le sentiment que les employés avaient le désir secret de se retrouver entre eux pour mieux créer et innover. Nous avons pensé qu’un bureau éphémère en pleine nature leur permettrait de changer d’air, et ainsi de combiner efficacité et bonheur au travail.»
Autrement dit, Republik a su rebondir grâce à un nouveau concept de bureau. Elle s’est inoculé son propre «vaccin» managérial contre la crise et sa morosité, avec la ferme conviction que cela embellirait le quotidien de ses équipes, et par suite, dynamiserait ses propres affaires.
D’autres entreprises ont recours à des «vaccins» distincts, dans l’espoir qu’ils répondront aux problèmes spécifiques qu’elles rencontrent :
1. Adaptation
Nombre de commerces éprouvent des difficultés à remettre en marche leurs opérations et à adapter leurs espaces dans le respect des directives de santé publique. Voilà pourquoi l’organisme Architecture sans frontières Québec a lancé le Guide d’adaptation anti-COVID pour les petits commerces, qui regorge de conseils pratiques à ce sujet. Celui-ci présente, entre autres, l’idée du restaurant La Prunelle, qui offre maintenant une formule de repas pique-nique dans le parc avoisinant, grâce à l’utilisation de boîtes à lunch réutilisables pour transporter nourriture et ustensiles. Ou encore celle de la librairie La Livrerie, qui invite les clients à sortir par la porte arrière, où un agréable coin lecture a été aménagé dans la ruelle.
2. Connexion
L’agence montréalaise de recherche en marketing Lanla a lancé la plateforme numérique RestezOuverts.com, destinée aux bars et aux resto-bars. Sa mission : devenir le point de connexion entre les propriétaires d’établissements, leurs employés et leur clientèle pour savoir en temps réel si un lieu est sécuritaire ou pas. L’objectif, c’est que chaque personne malade fasse preuve de civisme et y indique les bars et resto-bars qu’elle a fréquentés juste avant d’avoir contracté la COVID-19.
«L’utilisation de cette plateforme dans toutes les rôtisseries St-Hubert nous permettra de joindre rapidement nos clients si nous avions à faire face à une éclosion du virus. Nous croyons que ce service est un grand avantage pour les clients et restaurateurs, en plus de constituer une mesure de sécurité supplémentaire, et ce, sachant que les données ainsi recueillies serviront exclusivement à assurer une traçabilité en cas d’infection déclarée», dit Richard Scofield, président du Groupe St-Hubert.
3. Confiance
On le voit bien, tout vaccin ne pourra se montrer efficace qu’à une condition : la confiance. Oui, il est impératif pour notre avenir commun que la confiance revienne entre nous tous, a fortiori entre les différents acteurs économiques.
«La confiance jouera un rôle charnière dans la capacité des organisations à se rétablir et à se reconstruire à court terme, et à prospérer à long terme», note une récente étude du cabinet-conseil Deloitte sur l’avenir des entreprises, en particulier les commerces, dans la «nouvelle normalité» qui est aujourd’hui la nôtre. À ses yeux, cette confiance doit reposer sur quatre piliers :
> Un espace sécuritaire
> Une prise en compte des besoins émotionnels de chacun
> Une protection sans faille des données numériques
> Une prise en compte des intérêts financiers de chacun
Et l’étude de souligner : «Les gouvernements et les autorités de santé publique doivent faciliter et favoriser cette confiance entre les entreprises et les consommateurs. Les entreprises, quant à elles, doivent s’assurer qu’elles se concentrent sur l’établissement d’un lien de confiance avec tous les membres de leur écosystème : les actionnaires, les employés, les clients, etc.»
Adaptation, connexion et confiance. Tels sont donc les éléments secrets du vaccin de demain. Celui qui nous permettra de renouer avec une économie plus saine, pour ne pas dire plus sereine. Une économie où – qui sait ? – l’inattendu pourra enfin muter en l’inespéré.