Christian Tremblay, conseiller en efficacité opérationnelle/chaîne d’approvisionnement chez Développement PME, dit que plusieurs entreprises avec lesquelles il travaille qui souhaitent réduire leurs importations n’arrivent tout simplement pas à trouver de fournisseurs locaux. (Photo: courtoisie)
Un nombre grandissant d’entreprises manufacturières veulent s’approvisionner davantage au Québec, et cette stratégie peut être rentable si l’on tient compte de tous les coûts.
«Il y a une prise de conscience, et ce n’est pas ponctuel, ça va rester», affirme Stéphane Drouin, vice-président, achat québécois et développement économique, chez Investissement Québec (IQ).
Le téléphone ne dérougit pas chez IQ , qui a d’ailleurs développé un calculateur du coût réel d’importation pour établir l’écart de prix réel entre les produits importés et les produits fabriqués au Québec.
«On reçoit de 3 à 4 demandes par jour d’entreprises qui sont à la recherche de fournisseurs au Québec, et nous avons plus de 300 dossiers ouverts actuellement», dit Stéphane Drouin.
En fonction de leur taille et de leur secteur d’activité, les entreprises qui souhaitent s’approvisionner davantage au Québec ont grosso modo trois options.
Trois options pour réduire les importations
La première est la substitution des importations, soit de trouver un fournisseur québécois qui fait la même chose qu’un fournisseur asiatique, par exemple. Plusieurs PME privilégient cette approche.
La deuxième option est la diversification, c’est-à-dire de trouver une alternative au Québec afin de réduire le poids des approvisionnements en Asie dans une chaîne de valeur. Cette stratégie est prisée par les entreprises de taille moyenne.
Par exemple, si une entreprise québécoise a un fournisseur stratégique en Chine (100% de ses approvisionnements pour des composants), elle essaiera de réduire cette proportion à 65-70% afin de combler le reste avec un fournisseur local (30-35%).
La troisième option est de déménager une usine ici, une stratégie qui est surtout à la portée de grandes entreprises québécoises ou étrangères établies au Québec, présentes dans les industries à valeur ajoutée.
Par exemple, une société qui a deux usines en Asie peut en fermer une afin de transférer sa production au Québec en raison de la pénurie de conteneurs, sans parler de l’explosion des prix des boîtes métalliques (de 3000$US à 25 000$US en deux ans).
Un fabricant de meubles choisit le Québec
Stéphane Drouin souligne que les entreprises sous-estiment souvent tous les coûts associés à l’importation.
Il donne l’exemple d’une simulation effectuée récemment avec un fabricant de meubles du Québec (IQ ne révèle pas son identité) dont certaines composantes sont importées de la Chine.
Pour calculer l’écart de prix entre l’importation et l’approvisionnement local, cette entreprise tenait compte du coût d’achat total, du frais de fret et des assurances de transport. Avec ces paramètres, l’écart de prix était de 25,39 % en faveur de la Chine.
En revanche, si on inclut d’autres coûts ignorés (coût de manutention du débarquement à l’entrepôt, coût de stock de sécurité en raison des délais d’approvisionnement, coût pour auditer le fournisseur en Chine), l’écart est de seulement 3,95 %.
Eh bien, cette simulation a convaincu ce fabricant de meubles de s’approvisionner graduellement au Québec, affirme Stéphane Drouin.
Manque de capacités et de main-d’oeuvre
Christian Tremblay, conseiller en efficacité opérationnelle/chaîne d’approvisionnement chez Développement PME (DPME), en Chaudière-Appalaches, connaît le calculateur d’IQ et il appuie la hausse des approvisionnements au Québec.
Mais en même temps, il affirme que plusieurs entreprises avec lesquelles il travaille et qui souhaitent réduire leurs importations n’arrivent tout simplement pas à trouver de fournisseurs locaux.
«Non seulement il y a un manque de capacités au Québec pour répondre à cette demande, mais il y a aussi un problème de pénurie de main-d’oeuvre», déplore-t-il.
Pour autant, Christian Tremblay affirme que les entreprises ont tout intérêt à faire cet exercice de comparaison de prix, en attendant qu’il y ait une meilleure adéquation entre l’offre et la demande pour des approvisionnements locaux.