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Un projet de loi américain pourrait favoriser les MCS au Québec

François Normand|Publié le 05 août 2020

Le National Defense Authorization Act inclut une provision pour accroître l’autonomie des États-Unis pour ces minéraux.

La Chambre des représentants a récemment adopté un projet de loi (National Defense Authorization Act / FY21 NDAA) qui comprend une provision pour accroître l’autonomie des États-Unis en minéraux critiques et stratégiques (MCS), incluant les terres rares. Cette mesure pourrait favoriser à terme le Québec, car les Américains veulent augmenter leur autonomie en s’appuyant notamment sur le Canada.

Les MCS sont utilisés dans une foule de secteurs. Des industriels s’en servent pour fabriquer des batteries pour les ordinateurs portables et les téléphones intelligents, les voitures électriques et le stockage d’énergie. Des entreprises utilisent aussi des éléments du groupe du platine pour fabriquer les disques durs d’ordinateurs, de même que des terres rares pour manufacturer des aimants permanents des moteurs électriques.

Dans un courriel à Les Affaires, un porte-parole du House Armed Services Committee (HASC) de la Chambre des représentants à Washington souligne que les alliances et les partenariats «sont essentiels» à la sécurité nationale des États-Unis.

«Le Canada est le membre le plus ancien de la National Technology and Industrial Base des États-Unis, et la NDAA FY21 prend des mesures pour tirer parti de cette importante alliance afin d’atténuer les lacunes et les vulnérabilités comme celles de la chaîne d’approvisionnement des terres rares», écrit le porte-parole.

La valorisation des MCS au Québec est une priorité depuis quelques années. Cette priorité s’est accentuée avec la pandémie de la Covid-19 qui a fait prendre conscience à plusieurs gouvernements dans le monde de l’importance de réduire leur dépendance aux marchés étrangers, comme l’expliquait en mai à Les Affaires le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Jonathan Julien.

La Chambre des représentants -contrôlé par les démocrates- a adopté le projet de loi le 21 juillet avec 225 voix en pour et 125 voix contre, rapporte le magazine Resource World. Le Sénat -contrôlé par les républicains- devra à son tour bientôt voter sur ce projet de loi.

Mais puisque cet enjeu est bipartisan, son adoption devrait se faire sans problème. De plus, peu importe le résultat de l’élection présidentielle de novembre, le locataire de la Maison-Blanche devrait aussi donner son aval à ce projet de loi, estiment des spécialistes.

Deux économies de plus en plus intégrées

Malgré des tensions sur certains enjeux économiques, les États-Unis et le Canada sont des alliés fidèles depuis plus d’un siècle. Leurs économies sont de plus en plus intégrées, à commencer par l’industrie de l’extraction, de la transformation et de la production de minéraux.

Ainsi, l’autonomie américaine souhaitée par ce projet de loi en matière de MCS s’inscrit également dans une vision plus large pour accroître l’autonomie de l’Amérique du Nord.

Ainsi, dans un possible scénario, il pourrait y avoir par exemple davantage d’extraction minière au Canada (où les gisements sont concentrés en Amérique du Nord) et davantage de transformation (2e et 3e) aux États-Unis étant donné la taille des industries américaines et des marchés de consommation des MCS.

Depuis 2019, le Canada et les États-Unis ont d’ailleurs des discussions afin de réduire leur dépendance mutuelle en terres rares à l’égard de la Chine. Dans leur réflexion, les députés de la Chambre des représentants avaient cet enjeu en tête, car ils recherchent un approvisionnement «fiable et sûr de ces matériaux» pour l’économie américaine, souligne le source du House Armed Services Committee.

«Pour nous aider à évaluer les options politiques pour atteindre cet objectif, le comité a chargé le ministère de la Défense d’analyser la chaîne d’approvisionnement des terres rares et de fournir un rapport sur l’importance économique de ces métaux rares, de leur disponibilité et de la nature des risques pour la chaîne d’approvisionnement. Cette contribution nous permettra de prendre des décisions éclairées sur la réponse la plus efficace.»

La Chine est principal producteur de terres rares dans le monde, avec une production qui a totalisé à 120 000 tonnes (71% de la production mondiale) en 2018. C’est beaucoup plus que l’Australie (20 000) et les États-Unis (15 000). Le Canada n’en produit pas, mais son sol regorge de ces minéraux stratégiques.

Pour sa part, la Chine contrôle 40% des réserves mondiales de terres rares.