Si Boeing ne reçoit pas la certification pour le MAX-10 d’ici la fin de l'année, ou une dérogation de la part du Congrès, le constructeur devra donc modifier le cockpit de l’appareil.(Photo: 123RF)
New York — Accusé par le gendarme américain des marchés financiers (SEC) d’avoir émis publiquement plusieurs messages affirmant, après deux accidents aériens mortels, que le 737 MAX ne présentait pas de risque, Boeing a accepté jeudi de verser 200 millions de dollars.
Responsable à l’époque de ces messages, l’ancien directeur général de l’entreprise, Dennis Muilenburg, a pour sa part accepté de payer un million de dollars de pénalités.
C’est principalement un problème sur un logiciel de vol, le MCAS, qui a conduit un 737 MAX de Lion Air en octobre 2018 puis un appareil similaire d’Ethiopian Airlines en mars 2019 à piquer du nez sans que les pilotes ne parviennent à les redresser. Les écrasements ont fait 346 morts et entraîné l’immobilisation du 737 MAX pendant vingt mois.
«Après le premier écrasement, Boeing et Muilenburg savaient que le MCAS posait un problème de sécurité, mais ont néanmoins assuré au public que le 737 MAX était +aussi sûr que tout avion ayant jamais volé dans le ciel+», remarque la SEC dans un communiqué.
«Plus tard, à la suite du deuxième accident, Boeing et Muilenburg ont assuré au public qu’il n’y avait eu aucun dérapage ni aucune lacune dans le processus de certification du MCAS, bien qu’ils aient eu connaissance d’informations contraires», ajoute l’agence.
Boeing avait déjà reconnu en janvier 2021 que deux de ses employés avaient induit en erreur un groupe de l’autorité américaine de l’aviation responsable de préparer la formation des pilotes au logiciel MCAS.
Le géant de l’aéronautique avait alors accepté de verser plus de 2,5 milliards de dollars pour solder certaines poursuites — dont une amende pénale de 243,6 millions, 1,77 milliard d’indemnités aux compagnies aériennes ayant commandé le 737 MAX et 500 millions pour un fonds destiné à indemniser les proches des victimes.
Obligation élémentaire
La SEC a estimé de son côté que Boeing et M. Muilenburg avaient enfreint les lois boursières en induisant en erreur les investisseurs.
S’ils ont accepté de verser une pénalité, le groupe comme l’ex-responsable n’admettent ni ne démentent les conclusions de l’agence, précise le communiqué.
«En temps de crise et de tragédie, il est particulièrement important que les entreprises cotées en Bourse et leurs dirigeants fournissent des informations complètes, justes et véridiques aux marchés. La société Boeing et son ancien patron, Dennis Muilenburg, ont manqué à cette obligation la plus élémentaire», a commenté le président de la SEC, Gary Gensler, dans le communiqué.
La SEC reproche notamment à Boeing d’avoir diffusé un mois après l’accident de Lion Air un communiqué, annoté et approuvé par M. Muilenburg, ne mettant en avant que certains passages d’un rapport des autorités indonésiennes suggérant que le pilote et une mauvaise maintenance étaient à blâmer.
Le document omettait par ailleurs de mentionner une évaluation faite en interne estimant que le MCAS posait bien «un problème de sécurité aérienne» et que Boeing avait déjà commencé à travailler sur des modifications pour y remédier.
Six semaines après l’écrasement de l’avion d’Ethiopian Airlines, M. Muilenburg a par ailleurs affirmé à des analystes et des journalistes qu’il n’y avait eu aucune surprise dans le processus de certification du MCAS et que Boeing avait bien vérifié avoir suivi toutes les étapes réglementaires.
Des documents ont, plus tard, montré que Boeing avait déjà identifié des problèmes dans le processus.
L’accord passé avec la SEC «fait partie des efforts plus larges de l’entreprise visant à résoudre de manière responsable les questions juridiques en suspens liées aux accidents du 737 MAX d’une manière qui serve au mieux les intérêts de nos actionnaires, employés et autres parties prenantes», a indiqué un porte-parole de Boeing.
Le groupe a, depuis 2019, «fait de grands et profonds changements» afin de «solidifier les processus de sécurité et la supervision des questions de sécurité», a-t-il ajouté.