La majorité de ces abolitions seront effectuées en Allemagne et en France.
Airbus a annoncé mardi la suppression d’environ 15 000 postes, soit 11 % de ses effectifs, dont le tiers en France, et n’exclut pas des licenciements secs pour faire face à la « crise sans précédent » subie par le secteur du transport aérien terrassé par le Covid-19, un plan aussitôt jugé « excessif » par le gouvernement français.
Environ 5 100 postes seront supprimés en Allemagne, 5 000 en France, 1 700 au Royaume-Uni, 900 en Espagne et 1 300 sur les autres sites du groupe dans le monde, a précisé mardi soir l’avionneur européen dans un communiqué.
Le groupe aux 135 000 salariés comptait fin 2019 49 000 collaborateurs en France, 45 500 en Allemagne, 12 500 en Espagne et 11 000 au Royaume-Uni.
« Nous devons faire face à la réalité que 40 % de notre activité dans le secteur des avions commerciaux a disparu et qu’il faudra très probablement beaucoup de temps pour remonter, nous devons donc prendre des mesures décisives maintenant », a expliqué le président exécutif d’Airbus, Guillaume Faury, lors d’une conférence téléphonique.
Si l’avionneur n’exclut pas des licenciements, il compte sur les départs volontaires, des mesures de retraite anticipée et sur les dispositifs de chômage partiel pour les limiter.
« Les départs contraints qui auront lieu devraient être au bout du compte bien plus limités que les chiffres annoncés aujourd’hui », a ajouté le dirigeant.
Les dispositifs de chômage partiel de longue durée en France et en Allemagne, en fonction de leurs « modalités précises », pourraient permettre de préserver « jusqu’à 1 000 emplois » en France, et 1.500 en Allemagne, a ensuite précisé M. Faury à l’AFP.
L’ampleur du plan a été immédiatement déplorée par le ministère français de l’Économie.
« Le secteur de l’aéronautique fait face à un choc massif, brutal et durable. Il est fort probable que la reprise sera progressive. Nous ne l’avons jamais caché », a-t-il réagi, rappelant le plan de 15 milliards d’euros adopté par la France en soutien au secteur aéronautique.
« Néanmoins, le chiffre de suppressions d’emplois annoncé par Airbus est excessif », a-t-il dénoncé, en demandant de « réduire au maximum les départs contraints ».
Guillaume Faury a concédé que ce plan était « sans précédent » dans l’histoire de l’avionneur et ne pas s’attendre « à beaucoup de soutien dans ce type de situation même si nous travaillons étroitement » avec les gouvernements concernés.
C’est « du jamais vu » chez Airbus, a affirmé à l’AFP Frédéric Romain, coordinateur de la CFTC du groupe, et opposé à l’instar des autres syndicats à tout départ contraint.
« Mode survie »
« Pour FO, la ligne rouge est de diminuer ce chiffre qui nous paraît excessif, et de mettre en place toutes les mesures possibles pour ne pas avoir à déplorer le moindre licenciement contraint », a réagi Dominique Delbouis, coordinateur FO du groupe.
Le syndicat britannique Unite a pour sa part dénoncé ce plan comme « un acte de vandalisme industriel et une terrible insulte à (l’)incroyable main-d’œuvre britannique ».
Les suppressions de postes annoncées mardi touchent exclusivement la branche aviation commerciale du groupe – également présent dans la défense, l’espace et les hélicoptères – ainsi que la filiale française Stelia Aerospace et l’allemande Premium Aerotec.
Ces 15 000 postes supprimés s’ajoutent aux 900 emplois que devait déjà éliminer Premium Aerotec en raison « d’un besoin d’adaptation identifié avant la crise Covid-19 » et aux 2 665 suppressions de postes annoncées en début d’année dans la branche Defense and Space, confrontée à un marché difficile.
Pour la France, le plan sera détaillé lors d’un comité de groupe Airbus France jeudi matin à Blagnac, siège de l’avionneur dans la banlieue de Toulouse, selon plusieurs sources syndicales. Selon la CFE-CGE, 3 488 suppressions de postes sont prévues dans la branche avions et 1.464 chez Stelia Aerospace.
Le grand rival, l’américain Boeing, a lui annoncé fin avril son intention de supprimer 10 % de ses effectifs, soit 16 000 personnes, via des départs volontaires et des licenciements.
Derrière Airbus, ce sont des milliers de fournisseurs, pour la plupart de petites et moyennes entreprises, qui sont touchés. L’équipementier Daher a ainsi déjà annoncé la suppression d’un maximum de 1 300 postes sur les 10 000 du groupe.
L’enjeu pour l’avionneur, comme pour l’ensemble de ses sous-traitants, est de surmonter la crise sans perdre les compétences d’une main-d’œuvre très qualifiée afin de pouvoir rebondir une fois que le marché redémarrera. « On est en mode survie tous ensemble », a résumé M. Faury.