L’avionneur Boeing est scruté depuis un incident le 5 janvier sur un 737 MAX 9 d’Alaska Airlines, livré en octobre, dont une porte-bouchon s’est détachée en vol. (Photo: Getty Images)
New York — Le régulateur américain de l’aviation civile, qui supervise étroitement le 737 fétiche de Boeing depuis janvier, enquête aussi sur le 787 Dreamliner et le 777, dont l’intégrité des structures a été remise en cause par un ingénieur de l’avionneur, qui a rejeté ses accusations.
Ces révélations interviennent au moment où le groupe traverse de fortes turbulences du fait d’une succession de problèmes de production et d’exploitation de ses avions depuis plus d’un an.
Les régulateurs ont identifié des problèmes de «non-conformité» concernant la famille du 737, et pris des mesures contraignantes pour que le constructeur y remédie.
Ce sont désormais trois des quatre modèles d’avions commerciaux actuellement fabriqués par le groupe américain qui sont officiellement visés par une enquête de l’Agence américaine de régulation de l’aviation civile (FAA).
Une audience est prévue au Sénat américain le 17 avril, intitulée «Examen de la culture sécuritaire brisée de Boeing: récits de témoins directs».
Il s’agira d’aborder les «défaillances de production alarmantes et dangereuses» signalées par le lanceur d’alerte appelé à témoigner, ont indiqué les sénateurs démocrate Richard Blumenthal et républicain Ron Johnson, dans un communiqué commun.
À la fermeture de la Bourse de New York, l’action Boeing reculait de 1,89%.
Sam Salehpour, un ingénieur qualité de Boeing, a accusé le constructeur «d’avoir, de manière répétée, ignoré des inquiétudes graves concernant la sécurité et le contrôle qualité dans la construction des 787 et des 777″, selon un courrier du 17 janvier, adressé par ses avocates au patron de la FAA, Mike Whitaker.
«Notre client a identifié d’importants points de préoccupation en matière de sécurité et a fait tout son possible pour attirer l’attention des responsables de Boeing», indiquent les avocates Debra Katz et Lisa Banks, dans ce courrier rendu public après des informations publiées à la mi-journée par le New York Times.
«Nous enquêtons de manière approfondie sur tous les signalements», a indiqué la FAA, sans commenter ce dossier spécifiquement, dans une déclaration transmise à l’AFP.
«Pressions»
Dans son alerte lancée auprès du régulateur, Sam Salehpour explique avoir constaté des «raccourcis» dans le processus d’assemblage du Dreamliner qui ont notamment provoqué une «déformation des matériaux composites (…), pouvant altérer les performances d’usure sur le long terme».
D’après lui, plus d’un millier de Dreamliner en service pourraient présenter ce problème situé à «deux jonctions importantes».
Et, concernant le 777, il affirme que de «nouvelles procédures d’assemblage» mises en œuvre sans procéder «à la nécessaire reconception des pièces concernées ont entraîné un mauvais alignement des pièces».
Selon lui, «les ingénieurs de Boeing ont subi des pressions pour fermer les yeux» alors que cela «constitue également un grave risque sécuritaire».
Selon le New York Times, cet ingénieur, chez Boeing depuis plus de dix ans, affirme que des tronçons du Dreamliner «sont incorrectement attachés ensemble et pourraient se dissocier les uns des autres en plein vol après avoir effectué des milliers de vols».
Boeing a rejeté ces accusations, affirmant avoir «toute confiance dans le 787 Dreamliner», sans faire à ce stade de commentaire sur le 777.
«Ces affirmations sur l’intégrité de la structure du 787 sont infondées et ne représentent pas le travail approfondi que Boeing a accompli pour assurer la qualité et la sécurité à long terme de l’appareil», a-t-il indiqué dans un communiqué.
«Les problèmes signalés ont fait l’objet d’un examen d’ingénierie rigoureux sous surveillance de la FAA», a poursuivi le groupe, assurant qu’ils ne présentaient «aucune inquiétude sécuritaire et (que) l’avion sera(it) opérationnel pendant plusieurs décennies».
Les livraisons du 787 Dreamliner ont été suspendues pendant presque deux ans, en 2021-2022, à cause de problèmes opérationnels.
Boeing a assuré mardi que le 787 était conçu pour 44 000 cycles de pressurisation — les plus exigeants pour le fuselage—, soit 44 000 vols, mais avoir été testé jusqu’à 165 000 cycles «sans signe de fatigue».
Le plus ancien, entré en service en 2012, cumule actuellement environ 16 500 vols, a précisé Boeing.
L’avionneur est scruté depuis un incident le 5 janvier sur un 737 MAX 9 d’Alaska Airlines, livré en octobre, dont une porte-bouchon s’est détachée en vol.
L’accumulation des incidents a eu raison du patron Dave Calhoun, qui va partir fin 2024, et d’une partie des dirigeants du groupe.
M. Calhoun avait été nommé pour redresser Boeing après l’écrasement de deux 737 MAX 8, à cause de défauts de conception, en 2018 et en 2019 (346 morts).
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