Cargo: la COVID-19 a frappé plus fort que la crise financière
François Normand|Publié le 11 janvier 2022Les coûts d'expédition internationaux ont augmenté de 72,3 points de pourcentage, passant d'un creux de -22,0 % en dessous de la tendance au premier trimestre de 2020 à un sommet de 50,3 % au-dessus de la tendance au troisième trimestre de 2021. (Photo: 123RF)
On s’en doutait bien, mais une étude le confirme. La pandémie de COVID-19 a fait bondir les coûts de transport par cargo dans une proportion beaucoup plus élevée que durant la crise financière de 2008-2009, qui avait elle aussi grandement ébranlé l’économie mondiale.
C’est ce que révèle une analyse de la Réserve fédérale de Saint-Louis, publiée le 3 janvier et qui s’intitule The Dynamics of International Shipping Costs.
Pour faire cette comparaison entre les deux crises, les auteurs de l’analyse ont utilisé des données sur les coûts d’expédition et les volumes de commerce international pour les États-Unis de 2003 à 2021.
Par la suite, ils se sont concentrés sur les expéditions maritimes et ils ont mesuré les coûts d’expédition internationale des États-Unis, et ce, à l’aide d’un indice du coût de fret entre la Chine et les États-Unis.
Les coûts du transport maritime ont carrément décroché par rapport à l’activité réelle (les importations, dans ce graphique) durant la pandémie de COVID-19. (Source: Fed de St-Louis)
Ainsi, les auteurs ont observé que les frais de transport international ont augmenté de 41,0 points de pourcentage au lendemain de la crise financière mondiale, passant d’un creux de -26,8% inférieur à la tendance au troisième trimestre 2009 à un pic de 14,2% supérieur à la tendance au troisième trimestre 2010.
En analysant la crise actuelle, les auteurs s’attendaient à ce que les coûts d’expédition internationaux augmentent d’un montant similaire à mesure que l’économie se remet de la récession COVID-19.
Ils ont toutefois observé que les coûts d’expédition internationaux ont augmenté de 72,3 points de pourcentage, passant d’un creux de -22,0% en dessous de la tendance au premier trimestre de 2020 à un sommet de 50,3% au-dessus de la tendance au troisième trimestre de 2021.
Les auteurs ont même pu identifier la portion liée aux perturbations liées directement à la pandémie, qui a fait dérailler, elle, les chaînes d’approvisionnement.
«Nous concluons qu’un peu plus de la moitié de l’augmentation de 72,3 points de pourcentage des coûts d’expédition internationale à la suite de la récession COVID-19 est le résultat de forces de demande et d’offre standard, tandis que le reste est le résultat de perturbations dans l’expédition internationale», écrivent-ils.
La chaîne d’approvisionnement a déraillé
Quand le coronavirus s’est propagé à l’ensemble de la planète au printemps 2020, les gouvernements, les entreprises et les consommateurs se sont empressés d’acheter des équipements, des produits médicaux et des biens liés au télétravail.
La COVID-19 a ainsi interrompu la «chorégraphie» du transport de marchandises, car la demande normale de conteneurs (biens, composants, équipements, etc.) ne correspondait plus à l’offre en matière de quantité, de lieu et du moment requis, comme l’expliquait Les Affaires en septembre.
Les chaînes logistiques mondiales que les armateurs maritimes avaient mis des décennies à mettre en place — en s’adaptant graduellement à la demande mondiale, à la saisonnalité et aux cycles de productions de millions d’entreprises — se sont donc désynchronisées.
Le blocage du canal de Suez, au printemps 2021, n’a fait qu’aggraver la situation.
Comment rendre infaillible son approvisionnement? Manque de main-d’œuvre, enjeu climatique, blocage d’un canal, port à l’arrêt, ces enjeux sont si grands qu’il semble impossible qu’une PME puisse parvenir à sécuriser son approvisionnement dans une chaîne mondialisée.