Logo - Les Affaires
Logo - Les Affaires

La possibilité d’un arrêt de travail au CN et au CPKC inquiète la FCEI

La Presse Canadienne|Mis à jour le 19 août 2024

La possibilité d’un arrêt de travail au CN et au CPKC inquiète la FCEI

Le CPKC et le CN ont tous deux suspendu les expéditions en prévision d'un éventuel arrêt de travail. (Photo: LA PRESSE CANADIENNE/Darryl Dyck

La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) prévient qu’un éventuel arrêt de travail chez les deux principales compagnies ferroviaires du pays, qui pourrait survenir dès cette semaine, serait dévastateur pour les petites entreprises.

«La perturbation des activités ferroviaires pourrait avoir un effet dévastateur pour les PME, leurs employés et leurs communautés», a dit le vice-président aux affaires nationales, Jasmin Guénette, dans un communiqué.

«De nombreuses PME dépendent des services ferroviaires pour expédier et recevoir des biens, des produits et des matériaux essentiels. Plus l’arrêt de travail durera longtemps, plus les impacts seront importants en raison des retards d’expédition ou de livraison», a-t-il ajouté.

La FCEI estime que l’arrêt de travail pourrait également perturber les transports en commun et les déplacements vers les grandes villes comme Montréal ou Toronto.

Le Canadien Pacifique Kansas City (CPKC) et la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) risquent tous deux un arrêt de travail à compter de jeudi s’ils ne parviennent pas à conclure une entente avec les 9300 travailleurs représentés par la Conférence ferroviaire de Teamsters Canada (CFTC).

Les travailleurs du CPKC ont déposé un préavis de grève qui les verrait quitter le travail à compter de 00h01, heure de l’Est, jeudi. De son côté, le CN a l’intention de mettre en lock-out ses travailleurs au même moment, à moins qu’une entente ou un arbitrage exécutoire ne soit conclu d’ici là.

Le CN, après avoir interdit vendredi les importations de conteneurs en provenance de chemins de fer partenaires américains, prévoit cesser de charger les 40 000 conteneurs qu’il transporte chaque semaine, quelle que soit leur origine, à compter de mercredi, selon les horaires de l’entreprise. 

L’interdiction de tout nouveau chargement de marchandises au Canadien Pacifique entrera en vigueur mardi matin, a annoncé l’entreprise la semaine dernière. 

Ces mesures font suite à l’arrêt des matières dangereuses ainsi que des expéditions qui nécessitent des températures plus fraîches, comme la viande et les médicaments, pour éviter que les chargements bloqués ne se gâtent en cas d’arrêt de travail. 

Ottawa appelle les parties à «faire le travail nécessaire»

Le ministre fédéral du Travail, Steven MacKinnon, a appelé les parties dans le conflit à «faire le travail nécessaire pour conclure des ententes à la table de négociation et éviter un arrêt de travail complet».

«Ces négociations collectives n’appartiennent qu’au CN, au CPKC et aux CFTC, mais leurs effets seront ressentis par tous les Canadiens. (…) Les Canadiens attendent des parties qu’elles soient à la hauteur de la confiance qui leur a été accordée», a écrit le ministre sur le réseau X, lundi.

Jeudi dernier, le ministre MacKinnon avait rejeté une demande du CN d’imposer un arbitrage exécutoire, affirmant qu’il souhaitait que la compagnie négocie de bonne foi.

La Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) a demandé lundi au ministre de revoir sa décision de refuser des arbitrages exécutoires afin d’éviter les «répercussions majeures qu’entraînerait l’arrêt de travail».

Au Québec, une paralysie de cette chaîne pourrait avoir des «conséquences désastreuses, notamment pour l’approvisionnement alimentaire, des biens essentiels et matériaux», a fait valoir la FCCQ, soulignant qu’il s’agit «du troisième conflit de travail en cinq ans dans le secteur ferroviaire».

En point de presse, lundi, le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, a exhorté le gouvernement libéral à éviter toute ingérence dans le dossier.

«Trop souvent, on a vu les libéraux et les conservateurs s’ingérer dans ces dossiers et ça favorise les grandes entreprises. Et ça nuit aux efforts des travailleurs d’avoir de bons salaires et des conditions sécuritaires au travail», a déclaré Jagmeet Singh.

Le chef du NPD a ajouté avoir vu «depuis le début de cette situation que les employeurs ne travaillent pas de bonne foi».

«Donc on veut voir des négociations qui sont libres et sans l’ingérence du gouvernement fédéral», a-t-il conclu.

Le ministre du Travail du Québec, Jean Boulet, a dit suivre la situation de près. «Nous sommes extrêmement préoccupés par les conséquences d’un conflit de travail sur l’approvisionnement en biens et marchandises pour les citoyens et les entreprises du Québec. Il est primordial que les parties puissent conclure une entente pour renouveler les conventions collectives de travail dans les meilleurs délais», a écrit Jean Boulet sur le réseau X.

Rupture de la chaîne d’approvisionnement.

Pour l’instant, les 6500 wagons qui transportent chaque semaine du grain en vrac à travers le pays roulent toujours. 

«Il n’existe pas de “plan B”, puisqu’il n’y a pas de concurrence ou d’alternatives, de sorte que les gens de partout en souffriront», a déclaré Wade Sobkowich, qui dirige la Western Grain Elevator Association, dans un communiqué. 

Bruce Burrows, président et chef de la direction de la Chambre de commerce maritime, a soutenu qu’environ 27% du fret maritime transporté au Québec et en Ontario dépend du CN et du CPKC. 

«On dit souvent qu’une chaîne n’est jamais plus solide que son maillon le plus faible et un arrêt de travail dans le domaine des chemins de fer de classe I au Canada entraînera effectivement une rupture de la chaîne d’approvisionnement pour les Canadiens et pour bien des gens autour du monde», a déclaré Bruce Burrows.

L’effet dans les ports

Les ports sont sur le point de voir les conteneurs s’empiler sur leurs quais si l’impasse se prolonge, les effets d’entraînement de la fermeture progressive du rail se faisant déjà sentir. 

L’Administration portuaire Vancouver Fraser a déclaré avoir demandé aux navires en route vers le plus grand port du pays d’«ajuster leurs heures d’arrivée» en ralentissant pour éviter une congestion supplémentaire, a indiqué le porte-parole Alex Munro. 

Environ les deux tiers de toutes les marchandises entrant et sortant du port de Vancouver se déplacent par train, dont 90% des exportations, a-t-il souligné. Le port s’attend à des perturbations dans les expéditions de conteneurs, de céréales, de carbonate de potasse et d’autres marchandises clés. 

Au port de Montréal, environ 45% du fret qui y transite emprunte les voies du CN ou de la CPKC. 

La porte-parole Mélanie Nadeau a indiqué dans un courriel que l’Administration portuaire de Montréal entend redoubler d’efforts pour permettre à davantage de camions d’utiliser ses terminaux, tout en ajoutant qu’il est certain que certains marchés desservis par Montréal seront confrontés à des défis majeurs, notamment l’Ontario et la région du Grand Toronto. 

Environ 60% des expéditions de conteneurs via le port d’Halifax se font par train, a déclaré la porte-parole Lori MacLean.

«Les portes d’entrée canadiennes ont déjà connu une réduction des volumes en raison de l’incertitude entourant les opérations ferroviaires», a-t-elle indiqué dans un courriel.

Par Christopher Reynolds avec des informations d’Émilie Bergeron à Ottawa