Les pratiques de rémunération de Bombardier encore critiquées
La Presse Canadienne|Publié le 28 avril 2021(Photo: Paul Chiasson pour La Presse Canadiene)
Certaines pratiques de rémunération chez Bombardier continuent d’être pointées du doigt, au point où les deux principales agences de conseil aux actionnaires recommandent à ceux−ci de voter contre l’approche de l’avionneur en vue de son assemblée annuelle.
Glass Lewis a estimé que la politique de la multinationale était «globalement mal conçue», tandis que du côté de International Shareholder Services (ISS), certains éléments des mécanismes en place demeurent toujours «problématiques».
Les deux firmes ont récemment publié leurs rapports en vue du rendez-vous annuel de Bombardier qui doit se tenir le 6 mai.
ISS a notamment souligné que dans une année marquée par le déploiement de plusieurs mesures pour réduire les dépenses — dont l’élimination de milliers d’emplois — et améliorer les liquidités, le président et chef de la direction de Bombardier, Éric Martel, a néanmoins pu toucher une prime annuelle de 566 000$ US.
«En 2020, la société a été confrontée à la plus forte baisse du trafic ferroviaire et le taux d’utilisation des jets d’affaires est tombé à des niveaux bien pires que ceux observés lors de la crise financière de 2007-2008», fait valoir la firme dans son rapport.
La prime annuelle de M. Martel représente environ 90% de son salaire de base pour une année complète. En 2020, la rémunération globale — qui tient compte du salaire, des primes et autres avantages — de l’ex-président-directeur général d’Hydro-Québec avait été d’environ 3 millions $ US.
Indemnités de départ
De son côté, Glass Lewis a remis en question les nombreux paiements ponctuels consentis l’an dernier à d’ex−dirigeants ou d’autres cadres toujours en poste.
Bombardier avait déjà dévoilé qu’elle allait verser une indemnité de départ de 12,5 millions $US à son ancien président Alain Bellemare. Mais le ménage au sein de la haute direction s’est poursuivi en 2020 et l’avionneur a également dû verser au moins 3,4 millions $ US à son ancien chef de la direction financière John Di Bert, qui a perdu son poste à la fin novembre.
Plus de 2 millions $ US en paiements ponctuels ont également été versés à d’autres cadres, a également souligné Glass Lewis.
«La société continue d’afficher un penchant pour les versements discrétionnaires», est-il écrit dans le rapport de la firme, qui déplore également un pouvoir discrétionnaire «potentiellement excessif» du conseil d’administration en ce qui a trait aux cibles fixées pour le versement des incitatifs à court terme.
Dans l’ensemble, les cinq principaux dirigeants de Bombardier ont vu leur rémunération globale, qui tient compte du salaire de base, des primes et autres avantages, s’établir à 9,53 millions $ US l’an dernier. Sur une base comparable à l’année précédente et en excluant les traitements de MM. Bellemare et Di Bert, Bombardier a fait valoir que les émoluments de sa haute direction avaient fléchi de 60% en 2020.
L’obstacle Beaudoin-Bombardier
En dépit des questions soulevées par ISS et Glass Lewis, les recommandations figurant dans leurs rapports se butent à un important obstacle, puisque la famille Beaudoin-Bombardier contrôle environ 52% des droits de vote alors qu’elle ne détient qu’une fraction du total des actions en circulation.
Dans une déclaration envoyée par courriel, l’entreprise s’est montrée «déçue» des conclusions des deux firmes sur la question de la rémunération, soulignant qu’elles portaient «principalement sur d’anciennes mesures de rémunération (…) déjà prises sur la base d’obligations contractuelles».
«Les recommandations de vote ne tiennent pas compte des efforts faits par Bombardier pour ajuster la rémunération de ses hauts dirigeants pour tenir compte à la fois des circonstances exceptionnelles de la pandémie en cours et pour refléter la transition de Bombardier et sa nouvelle réalité comme entreprise de plus petite taille axée exclusivement sur les jets d’affaires», a fait valoir la société.
Par ailleurs, si elles recommandent aux actionnaires de ne pas appuyer la résolution consultative non contraignante de Bombardier en matière de rémunération de ses hauts dirigeants, les deux firmes se rangent toutefois derrière les 12 candidats qui sollicitent un siège au conseil d’administration.
La multinationale se concentre uniquement sur le segment des jets d’affaires depuis le 29 janvier dernier, lorsque la vente de Bombardier Transport à Alstom s’est concrétisée. Au début de l’année, la dette nette de Bombardier était évaluée à environ 4,7 milliards $ US, ce qui tient notamment compte du produit net de 3,6 milliards $ US récolté grâce à la cession de ses activités de matériel roulant.
Le plus récent plan quinquennal de la compagnie table sur des revenus de 7,5 milliards $ US en 2025, où elle devrait également générer un bénéfice d’exploitation de 1,5 milliard $ US.