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Mer Rouge: les expéditeurs canadiens affectés par les tensions

La Presse Canadienne|Publié le 15 janvier 2024

Mer Rouge: les expéditeurs canadiens affectés par les tensions

Les bateaux arrivent au port d'Halifax avec plus d'une semaine de retard et les tarifs des conteneurs montent en flèche. (Photo: La Presse Canadienne/Darren Calabrese)

Les expéditeurs canadiens commencent à ressentir la pression des attaques contre les cargos dans la mer Rouge, alors que les tarifs des conteneurs augmentent et que les bateaux tardent à arriver sur la côte est.

Des données du port d’Halifax montrent que 57 des 87 navires — près des deux tiers — qui devaient arriver au port au cours des quatre prochaines semaines sont maintenant attendus avec au moins une journée de retard sur le calendrier, certains avec quelques semaines de retard.

Selon le cabinet d’études Drewry, le prix moyen des conteneurs maritimes a doublé depuis la mi-décembre, lorsque les militants houthis au Yémen ont intensifié leurs attaques contre des bateaux commerciaux pour protester contre la campagne militaire israélienne dans la bande de Gaza.

Vendredi, les États-Unis ont mené des frappes aériennes contre les rebelles houthis dans une intervention qui comprenait un soutien à la planification de la part des Forces armées canadiennes. 

Les rebelles houthis ont tiré lundi un missile qui a touché un navire américain, moins d’un jour après que le même groupe a lancé un missile de croisière antinavire vers un destroyer américain dans la mer Rouge. 

L’ampleur du conflit a incité les principaux transporteurs de conteneurs à éviter la route qui passe par le canal de Suez, optant plutôt pour un itinéraire contournant le cap africain de Bonne-Espérance, qui peut rallonger le voyage d’une à deux semaines et augmenter les coûts liés au carburant, à l’équipage et aux assurances.

«L’industrie du transport maritime à l’échelle mondiale est touchée par la situation dans la mer Rouge, et nous commençons à constater des retards alors que les compagnies maritimes utilisent des itinéraires de rechange autour de l’Afrique», a affirmé Paul MacIsaac, vice-président principal du port d’Halifax, dans un communiqué.

Le chef de la direction de la Fédération maritime du Canada, Chris Hall, affirme que les retards ont poussé les importateurs à se démener, les stocks en difficulté étant toujours en route vers les côtes et les étagères canadiennes.

«Le nombre de navires qui ont été détournés est stupéfiant. Ce changement ajoute du temps et des coûts au produit final, a-t-il déclaré. Quelqu’un doit s’en charger.

 

Le calendrier du port de Montréal largement inchangé

Mais des experts ont mis en garde contre une surestimation de l’impact, car les horaires du port de Montréal et de la côte ouest restent largement inchangés jusqu’à présent. 

«Étant donné que la mer Rouge/canal de Suez est une route commerciale qui dessert en grande partie l’Europe et la côte est de l’Amérique du Nord, les longueurs de transit transpacifique ne devraient pas être affectées par la situation actuelle», a déclaré Alex Munro, porte-parole de l’Administration portuaire Vancouver-Fraser. 

Des effets d’entraînement, notamment des impacts sur les prix, pourraient encore se produire.

Les tarifs sur les transports de l’Asie de l’Est vers la côte ouest des États-Unis ont bondi de 56% d’un mois à l’autre jeudi, selon la société d’analyse du fret Xeneta.

Mais la capacité excédentaire dans le secteur signifie que les transporteurs peuvent s’adapter à des délais d’expédition plus longs et que les tarifs se stabiliseront probablement bien en dessous des sommets pandémiques, selon le Global Shippers Forum, qui représente les propriétaires de marchandises. 

«Il n’y a pas de pénurie chronique de capacité de transport comme c’était le cas pendant la pandémie de COVID, et de nouvelles capacités substantielles devraient être livrées tout au long du premier semestre 2024», a déclaré l’organisation dans une mise à jour aux membres vendredi.

Les itinéraires plus longs signifient que les ports devront apporter une modification «ponctuelle» aux horaires au cours des prochaines semaines, mais les modèles de service devraient revenir à la prévisibilité par la suite, a-t-on soutenu.

Les expéditeurs confrontés à des renouvellements de contrat dans un contexte de coûts croissants peuvent inclure des dispositions leur permettant de payer moins une fois que les taux au comptant baisseront à nouveau, a souligné le groupe.

Par ailleurs, la demande d’espace de chargement à bord reste stable ou en légère baisse, selon les experts.

«Il y avait une forte inflation, il y avait la gueule de bois de la COVID et les gens dépensaient tout l’argent de la PCU pour des téléviseurs grand écran; ils n’en avaient pas besoin d’un autre», a déclaré John Corey, qui dirige l’Association canadienne de gestion de fret. Le trafic de conteneurs via la côte ouest a chuté d’environ 9% l’année dernière, a-t-il déclaré.

 

Une sécheresse en Amérique centrale 

Néanmoins, une sécheresse en Amérique centrale a encore amplifié l’impact de la zone interdite de la mer Rouge.

La sécheresse a vidé le canal de Panama de l’eau qui est utilisée pour monter et descendre les navires à une douzaine d’écluses, ce qui a incité les autorités à réduire le nombre de bateaux qu’elles laissent passer par la voie navigable.

La diminution du nombre de places a augmenté les péages et provoqué des goulots d’étranglement au niveau du canal commercial critique entre les océans Atlantique et Pacifique et a poussé certains pétroliers et porte-conteneurs à éviter les embouteillages en empruntant des itinéraires plus longs et plus coûteux – généralement via le canal de Suez.

Aujourd’hui, la crise de la mer Rouge ajoute à ces coûts de transport. Depuis la mi-décembre, les tarifs ont augmenté de 153% pour le fret expédié de l’Asie de l’Est vers l’Europe du Nord, selon Xeneta. 

Mis à part les retards d’arrivée des produits, les impacts sur les deux canaux pourraient ne pas être immédiats pour les Canadiens.

«Je pense qu’il faudra plus de temps pour que cela affecte le Canada, a déclaré John Corey. Mais, oui, ce sera le cas.»