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Ottawa ratera sa cible de 2025, prévient l’industrie

Dominique Talbot|Mis à jour le 25 juin 2024

Ottawa ratera sa cible de 2025, prévient l’industrie

Les gouvernements fédéral et provincial devront aider les consommateurs s’ils veulent que tous les véhicules neufs vendus en 2035 soient électriques, disent les représentants de l’industrie automobile. (Photo:123RF)

À moins de donner un coup de pouce aux consommateurs, Ottawa ratera sa cible que tous les véhicules neufs commercialisés soient 100% électriques en 2035, préviennent les principaux acteurs de l’industrie automobile canadienne.

«La progression positive de l’adoption des véhicules à zéro émission que nous constatons au Canada est aussi en train de frapper le mur de la réalité, surtout par rapport aux préconditions nécessaires pour faire la transition des voitures à essence vers celles électriques», dit Tim Reuss, président et chef de la direction de la Corporation des associations de détaillants d’automobiles du Canada (CADA).

En compagnie de représentants de l’Association canadienne des constructeurs de véhicules et de Constructeurs mondiaux d’automobiles du Canada, la CADA a fait valoir mardi matin à Ottawa que le gouvernement fédéral devait prendre des mesures pour améliorer l’abordabilité des véhicules électriques, notamment en haussant les aides financières pour l’achat de ceux-ci, tout en investissant pour créer une infrastructure de recharge suffisante qui tient compte de la réalité géographique du pays.

«Ce n’est pas tout le monde qui vit dans un centre-ville densifié», fait valoir Tim Reuss, tout en rappelant que les distances de déplacements sont souvent très longues dans le pays.

«Ils (les gouvernements) doivent mettre les consommateurs au centre de leurs priorités», a-t-il ajouté.

Le président et chef de la direction de la CADA n’a d’ailleurs pas manqué de tacler les gouvernements du Québec et de la Colombie-Britannique, les deux provinces qui comptent le plus de véhicules électriques sur leurs routes, qui ont récemment annoncé une réduction progressive des aides financières accordées aux acheteurs.

«Les récentes décisions de certaines provinces sont un non-sens et sont contreproductives pour l’atteinte des cibles de 2035», a-t-il dénoncé.

Dans le cas du Québec, le programme «Roulez vert», qui offre encore cette année des subventions pouvant aller jusqu’à 7000 $, sera mis au rancart dès 2027, a annoncé le ministre des Finances, Eric Girard, lors de la présentation du budget en mars dernier.

«[Ces décisions] sont en déconnexion totale avec leurs ambitions. Cela va à l’encontre de leurs propres objectifs», a dit pour sa part Brian Kingston, président et chef de la direction de l’Association canadienne des constructeurs de véhicules.

«C’est un exemple de politiques publiques dysfonctionnelles à leur pire», a quant à lui exprimé David Adams, président de Constructeurs mondiaux d’automobiles du Canada.

En plus des aides financières, disent les trois organisations, les gouvernements doivent s’affairer rapidement à l’installation de bornes publiques de recharge. Selon leurs calculs, il faudrait en installer 114 par jour au cours des 11 prochaines années pour se préparer à un parc de véhicules neufs 100% électrique en 2035.

«Nous avons très peu de temps pour nous préparer. Il est urgent que le gouvernement fédéral pose des actions rapides pour y arriver», dit Brian Kingston.

Nouveaux frais de douane

La sortie des représentants de l’industrie intervient au lendemain d’une autre sortie remarquée, celle de la ministre des Finances du Canada, Chrystia Freeland. Lundi, cette dernière a accusé la Chine d’inonder le marché de véhicules électriques, tout en annonçant le lancement d’un processus pour l’imposition de nouvelles taxes à l’importation pour ceux qui y sont fabriqués.

«La Chine a intentionnellement créé une surcapacité et une offre excédentaire et les a exportées vers d’autres pays, a-t-elle déclaré. Cela ne respecte pas les règles du commerce mondial et le Canada ne le tolérera pas.»

La ministre a aussi affirmé qu’elle «n’excluait rien» parmi les mesures que le Canada pourrait prendre, y compris l’extension d’une surtaxe au-delà des seuls véhicules électriques à d’autres parties de la chaîne d’approvisionnement des véhicules électriques, comme les batteries et leurs composantes.

Du côté des États-Unis, le président Joe Biden a annoncé à la mi-mai que la taxe à l’importation sur les véhicules électriques chinois quadruplerait pour atteindre 100%, la taxe à l’importation sur les batteries pour véhicules électriques passant de 7,5% à 25%. Les deux augmentations sont prévues pour le mois d’août.

Environ 70% des batteries des véhicules électriques et 60% des véhicules électriques sont désormais fabriqués en Chine.

Rappelons que depuis les trois dernières années, l’Ontario, cœur de l’industrie automobile au Canada, et le Québec, ont investi massivement dans leur filière batterie respective.

En Ontario, ces investissements dépassent les 35 milliards de dollars alors qu’au Québec, la valeur des différents projets atteint 16 milliards.

Avec La Presse canadienne