La sécheresse a fait en sorte de réduire de 5% le PIB du secteur agricole entre août 2020 et mars 2022. (Photo: La Presse Canadienne)
L’augmentation du nombre d’événements météorologiques extrêmes risque d’aggraver l’inflation des denrées alimentaires tandis que les conséquences du réchauffement climatique perturbent les activités agricoles.
C’est l’une des mises en garde d’un rapport sur l’«inflation verte», soit l’augmentation des prix liée au réchauffement climatique et à la transition énergétique, rédigé par l’économiste au Mouvement Desjardins Marc-Antoine Dumont.
«Les catastrophes naturelles sont plus fréquentes et plus sévères, explique l’économiste en entrevue. Ça a des conséquences de plus en plus dangereuses pour l’économie dans le sens que plus la planète se réchauffe, plus l’impact économique est important.»
Les conclusions surviennent au moment d’une remontée de l’inflation sans précédent au Canada. En mai, l’inflation a atteint 7,7% au pays, selon Statistique Canada. Il s’agit de la plus forte augmentation depuis janvier 1983, selon les données de l’agence fédérale.
Avec les effets des perturbations de la chaîne d’approvisionnement et de l’invasion russe en Ukraine, il devient impossible de déterminer quelle part joue l’«inflation verte» dans la situation actuelle, précise M. Dumont. «C’est quelque chose qui est très difficile à évaluer dans un contexte de guerre en Ukraine et c’est difficile de faire la part des choses [et de dire] quelle pression provient de quoi.»
Dans son étude, l’économiste souligne que le nombre de catastrophes naturelles répertoriées est trois fois plus élevé qu’il y a 50 ans. Ces événements ont un impact négatif sur la production agricole, ce qui entraîne une réduction de l’offre et une augmentation des prix.
Il cite en exemple la sécheresse qui frappe le centre du Canada depuis août 2020. La sécheresse a fait en sorte de réduire de 5% le produit intérieur brut réel (PIB) du secteur agricole entre août 2020 et mars 2022. Cela représente une perte cumulée de 63,1 milliards $ pour l’industrie.
«Or, ce n’était pas la seule sécheresse dans le monde à ce moment, écrit l’économiste. D’autres frappaient aux États‑Unis et en Asie, limitant l’offre mondiale pour plusieurs denrées agricoles, comme le maïs, dont le prix s’est apprécié de 109% entre août 2020 et mai 2021.»
Un virage vert inflationniste
La transition énergétique est également un facteur d’inflation tandis que la production de biens et services nécessaires à la transition énergétique peine à suivre la forte demande.
Au Québec, par exemple, le nombre de véhicules électriques vendus a augmenté de 34% entre 2020 et 2021, comparativement à une baisse de 4% pour les voitures à essence, selon des données de Dealertrack citées dans l’étude du Mouvement Desjardins.
Cet engouement, qui ne se limite pas au Québec, a un effet sur le prix du lithium, qui entre dans la composition de la batterie électrique. Il a grimpé de 600% depuis le début de la pandémie.
La question doit encore être creusée pour trouver des solutions, mais les gouvernements et les banques centrales doivent donc tenir compte de cette distorsion dans leurs politiques, plaide M. Dumont.
L’idée est de trouver des solutions pour que l’offre et la demande évoluent avec le plus de synchronisme possible. «Lorsqu’on a une demande qui s’accroît, par exemple pour une voiture électrique, il faut être capable d’avoir quelque chose qui va permettre à l’offre d’accompagner cette croissance.»