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Quel avenir pour l’épicerie en ligne, et pour GoodFood?

Olivier Schmouker|Publié le 18 novembre 2021

Quel avenir pour l’épicerie en ligne, et pour GoodFood?

GoodFood va offrir la livraison en une heure à Montréal. (Photo: Lesaffaires.com)

Délais de livraison trop longs, mauvais article reçu, politique de retour complexe… Deux Canadiens sur trois (64%) se disent aujourd’hui frustrés par leur expérience de magasinage en ligne, selon un récent sondage du cabinet-conseil KPMG.

Pis, la même proportion de Canadiens (65%) regrette d’avoir effectué des achats en ligne depuis le début de la pandémie. Et ils indiquent, dans un même souffle, regretter l’époque d’avant, où ils faisaient tous leurs achats en magasin.

Une donnée précise montre que les déçus du magasinage en ligne ne font pas que se plaindre, et passent à l’action, en se remettant à fréquenter les magasins : la chute brutale du titre boursier de Marché GoodFood (FOOD, 4,80$). Mercredi, l’action a perdu 26%, passant de 7,20$ à 5,30$. Et le lendemain, sa valeur est passée en dessous de la barre des 5$. À son sommet en janvier 2021, le titre de GoodFood valait 14,53$.

Il se trouve que l’entreprise montréalaise GoodFood est spécialisée dans les boîtes-repas, l’épicerie en ligne et les plats prêts-à-manger commandés par Internet, et que ses résultats financiers du dernier trimestre ont déçu les investisseurs. De fait, ses ventes nettes du quatrième trimestre terminé le 31 août ont été de 79,4 M$, alors que nombre d’analystes financiers avaient anticipé des ventes de 88 M$.

«L’été dernier, les Canadiens ont pu sortir plus qu’auparavant, grâce à la levée de restrictions sanitaires et au vaste déploiement de la vaccination, explique Jonathan Ferrari, le PDG de GoodFood. Le revers de la médaille pour nous, c’est qu’ils ont été moins enclins à magasiner en ligne.»

À cela s’ajoute le fait que la pénurie de main-d’œuvre a provoqué des dératés économiques dont ont pâti, entre autres, les entreprises de vente en ligne. «Chez nous comme ailleurs, on a parfois manqué de travailleurs, notamment de livreurs, si bien que nos services n’ont pas toujours été parfaits», reconnaît humblement Jonathan Ferrari.

Voyant venir le mur, GoodFood a sondé sa clientèle actuelle et sa clientèle potentielle à l’échelle du pays. Il en est ressorti deux données intéressantes :

— 85% des personnes sondées trouvaient que la rapidité de la livraison était déterminante à leurs yeux. Or, GoodFood livre, en général, dans un espace de cinq jours.

— 61% d’entre elles se disaient prêtes à changer d’épicerie en ligne si jamais un concurrent livrant plus vite apparaissait sur le marché.

Ni une ni deux, GoodFood a pris la décision de miser à fond sur la livraison rapide. Le 22 novembre, les Montréalais vont ainsi pouvoir être livrés… en moins d’une heure. Et ce, gratuitement durant les trois premiers mois, puis au tarif de 5,99$ par mois.

Le service est déjà offert à Toronto, depuis le 15 novembre : «Les premières statistiques montrent que notre temps moyen de livraison y est, très précisément, de 35,5 minutes. C’est pourquoi nous songeons à bientôt promettre un temps de livraison de non pas une heure, mais trente minutes», confie le PDG de GoodFood.

La livraison rapide présente deux avantages majeurs, estime Jonathan Ferrari. D’une part, ça simplifie la vie des clients, qui n’ont plus à ajuster l’heure de la livraison à leur agenda pour s’assurer que la caisse arrive chez eux à un moment où ils sont là. D’autre part, ça fait gagner du temps aux clients, une étude de GoodFood montrant que faire nos courses à l’épicerie nous prend, en général, «une bonne heure».

Outre la livraison rapide, GoodFood entend miser sur une autre corde sensible des consommateurs canadiens : l’empreinte écologique. L’entreprise a noué une entente de partenariat avec Plug In BC, un programme de l’organisme à but non lucratif Fraser Basin Council qui vise à électrifier les transports en Colombie-Britannique, afin de se doter des véhicules réfrigérés 100% électriques. Des tests sont actuellement menés à Vancouver. «Si les résultats sont positifs durant les quatre saisons, nous allons nous équiper d’une flotte de véhicules électriques à l’échelle du pays», affirme Jonathan Ferrari, en glissant qu’il devrait avoir les premiers résultats «dans les prochains mois».

Selon le PDG de GoodFood, tous ces efforts et ces investissements finiront par se révéler payants, car «l’avenir appartient au commerce en ligne». Avant la pandémie, «seulement 2%» des gens faisaient leur épicerie en ligne. Aujourd’hui, ce sont «5-6%». «Et dans 5 ans, ce sera 20%», dit-il. Et d’ajouter que son ambition est de voir GoodFood détenir alors «le tiers» du marché canadien, lequel devrait peser «pas moins de 25G$ en 2026».