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Récoltes abandonnées et profits grugés par manque de travailleurs

La Presse Canadienne|Publié le 13 août 2020

« Pas beaucoup de gens sont habitués au travail physique toute la journée », relève l’agriculteur.

Florence Lachapelle, 19 ans, compte parmi les centaines de Québécois qui se sont essayés à planter des semences et à procéder à la récolte cet été, en remplacement des travailleurs étrangers qui n’ont pas pu quitter leur pays à cause de la pandémie de COVID-19.

Mais malgré les efforts de recrutement menés par le gouvernement de François Legault en avril, trop peu de Québécois ont répondu à l’appel pour venir en aide au secteur agricole de la province.

Le manque de main-d’œuvre a forcé des agriculteurs à réduire leur production ou à l’abandonner dans les champs.

Florence Lachapelle est malheureusement tombée malade après deux mois sur la ferme de Francois D’Aoust, à Havelock, en Montérégie et elle est retournée chez elle à Montréal. Le travail était très exigeant, rapporte-t-elle, avec si peu de travailleurs étrangers en renfort.

« Ce sont des professionnels et on ne l’est tout simplement pas », fait-elle valoir. 

François D’Aoust dit avoir embauché une poignée de personnes qui étaient au chômage dans des secteurs comme celui des communications, du cinéma et de la restauration. Mais après la reprise, ils sont retournés à des emplois mieux rémunérés.

« Pas beaucoup de gens sont habitués au travail physique toute la journée », relève l’agriculteur.

M. D’Aoust et son épouse, Mélina Plante, embauchent année après années les mêmes quatre travailleurs guatémaltèques. Mais ils étaient coincés chez eux au début de la présente saison agricole en raison des restrictions de voyage imposées par leur pays pour limiter la propagation de la COVID-19.

Selon M. D’Aoust, il faut jusqu’à trois fois plus de temps aux Québécois inexpérimentés pour accomplir le même travail, ce qui a grugé ses profits.

M. D’Aoust a réduit de 60 % la production de sa ferme, Les Bontés de la Vallée. Deux travailleurs guatémaltèques ont finalement pu faire le voyage, mais le mal était fait d’un point de vue financier.

« Ce que nous espérons, c’est de pouvoir traverser cette période difficile sans trop de pertes et recommencer l’année prochaine. »

Michel Ricard, qui possède 60 hectares de terres agricoles à Saint-Alexis-de-Montcalm, dans Lanaudière, s’attend pour sa part à perdre environ 100 000 $ en concombres d’ici la fin août parce qu’il n’a personne pour les récolter.

« Les gens du Guatemala peuvent travailler de 6 heures du matin à 18 heures. Ce n’est pas un problème. Parfois, je dois les arrêter parce qu’ils veulent continuer, mais je dis “ça suffit pour aujourd’hui”. »

Les travailleurs locaux n’ont pas été d’une grande aide, déplore-t-il. Seulement huit sont venus lui prêter main-forte après un appel lancé sur Facebook.

L’Union des producteurs agricoles estime qu’il y a près de 2000 travailleurs étrangers de moins qu’à l’habitude sur les fermes québécoises cette saison. Et malgré sa campagne pour attirer une relève, un peu moins de 1400 nouveaux visages ont été affectés dans les champs.

Les travailleurs étrangers n’ont jamais réellement pu être remplacés, affirme le président de l’UPA, Marcel Groleau, qui croit que la Prestation canadienne d’urgence de jusqu’à 2000 $ par mois s’est avérée bien plus alléchante.