Pour atteindre les clients, les entreprises doivent dorénavant maîtriser tous les canaux de communication.
Aujourd’hui, les consommateurs naviguent entre Web, applications mobiles, médias sociaux, magasins… Une vague de fond qui modifie totalement le commerce au détail. Pour atteindre les clients, les entreprises doivent dorénavant maîtriser tous les canaux de communication. Bienvenue dans l’univers de l’omnicanal.
Il y a quelques années, Guru a décidé d’augmenter sa présence à San Francisco. Un territoire de prédilection pour cette PME québécoise qui brasse des boissons énergisantes composées d’ingrédients naturels et biologiques. Objectif ? Attirer des clients chez Whole Foods pour acheter leurs boissons, à l’aide d’une promotion deux pour un.
« Nous avons utilisé différents canaux, notamment des publications ciblées sur Facebook basées sur le profil des utilisateurs ainsi que sur leur géolocalisation », indique Carl Goyette, vice-président, Vente et marketing. Une première stratégie « drive-to-store » qui a permis une augmentation des ventes de 25 %.
Loin de l’omnicanal ? Au contraire, explique M. Goyette. « Pour illustrer ce type de stratégie, on pourrait dessiner un bonhomme entouré d’un cercle symbolisant tous les points de contact entre le consommateur et l’entreprise, que ce soit médias sociaux, publicités, courriels, commandites ou même l’interaction avec le conducteur de la camionnette distribuant des échantillons. » Autant de moyens de bâtir la fidélité avec la marque et la convertir en ventes.
Guru utilise aussi ce genre de stratégie au Québec, en ciblant notamment les étudiants universitaires en fin de session, en combinant médias sociaux, affichages dans les dépanneurs, promotions directement sur l’application de Couche-Tard, etc. « L’important, pour réussir, c’est de parler d’une même voix partout. De notre côté, notre message, c’est que nous proposons une bonne énergie bio », ajoute-t-il.
Une tendance lourde
L’exemple de Guru est loin d’être unique. « L’omnicanal, ce n’est pas une simple mode. Cette pratique s’inscrit directement dans la transformation numérique qui a permis de se centrer sur le client, une tendance lourde et inévitable », affirme Daniel Ouellet, vice-président, Stratégie et design d’expérience chez Cossette.
Ainsi, personne n’échappe au mouvement, alors que les consommateurs multiplient les interactions avec les marques avant d’acheter. « Il faut donc s’assurer d’offrir un message cohérent, unifié. »
D’ailleurs, toutes les sociétés de commerces au détail devraient s’y mettre pour s’armer contre la concurrence de sites comme Amazon ou Kijiji, explique Patrick Grenier, conseiller d’affaires à la Banque de développement du Canada. « Au Canada, pour les articles de petits formats, deux dollars sur trois s’achètent maintenant en ligne. Si je prends l’exemple d’un bijoutier ayant uniquement une boutique, les chances sont minces qu’il survive à long terme. »
L’objectif derrière la stratégie omnicanale est très simple. Il s’agit d’offrir une expérience client exceptionnelle pour fidéliser sa clientèle, explique Yany Grégoire, professeur à HEC Montréal et titulaire de la Chaire en marketing des services et expérience client.
Et les entreprises rivalisent d’originalité pour y arriver. « Certains concessionnaires, par exemple, permettent aux clients de s’entraîner pendant la réparation de leur voiture. » Autres exemples : Starbucks permet de payer en secouant sa carte de points, alors que L’Oréal a développé une application de réalité augmentée pour tester son maquillage.
Personnaliser le message
Les solutions omnicanales peuvent aussi être simples et à la portée des petites entreprises. « Dans plusieurs cas, on utilise les médias sociaux qui sont gratuits et bien adaptés pour ces dernières. Pas besoin de mettre des millions si c’est bien fait », soutient M. Grenier. L’important est de sélectionner les meilleurs canaux pour atteindre sa clientèle type et les gens qui les influencent, ajoute-t-il. Et personnaliser le message.
C’est le cas chez Mountain Equipment Coop (MEC), qui envoie des infolettres différentes à ses membres selon qu’ils sont adeptes de ski, de camping, de vélo, etc. « Cela nous permet de leur fournir de l’information pertinente selon leurs intérêts, mais également de cibler le micromoment pour le faire », indique Bernard Côté, directeur des communications et du marketing pour MEC au Québec. Ainsi, la coopérative effectue une veille, notamment sur Google, pour déterminer quand les gens commencent à magasiner pour le kayak, par exemple.
Mountain Equipment Coop envoie des infolettres différentes à ses membres selon qu’ils sont adeptes de ski, de camping, de vélo, etc. (Photo: Facebook – MEC)
Il s’agit d’une analyse qui permet aussi de déceler les tendances et de s’y adapter. De même, MEC scrute les commentaires en ligne sur son site web et s’ajuste en conséquence, précise M. Côté. « Nous transférons les critiques sur les articles de la marque maison au groupe de design, qui évalue s’il faut apporter des correctifs. Nous offrons également un service à la clientèle par téléphone, clavardage, sur les réseaux sociaux, etc. »
C’est une façon de maintenir un dialogue constant avec les consommateurs, ce qui constitue une autre clé pour réussir, à une époque où le anywhere, anytime prévaut, ajoute M. Ouellet. D’où l’importance de relier les différents canaux, pour qu’une personne ayant envoyé un courriel ne reparte pas de zéro si elle appelle le service à la clientèle, cite-t-il en exemple. Ou de pouvoir commander en ligne, mais rapporter en magasin. Une intégration qui se révèle souvent un défi. « Pour y arriver, il faut briser les silos. »
L’omnicanal revêt donc de multiples formes. « Il faut constamment se renouveler, être à l’affût des tendances pour ne pas se laisser dépasser », explique M. Côté. Chaque entreprise doit donc trouver la formule qui lui convient et ne pas perdre de vue l’objectif : offrir la meilleure expérience pour créer une relation avec ses clients et s’assurer de leur fidélité.