Abitibi: une technologie d’extraction minière plus propre
La Presse Canadienne|Publié le 16 septembre 2020Le nouveau procédé permet des économies importantes pour les entreprises minières.
Le Centre technologique des résidus industriels (CTRI), relié au Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue, planche sur une nouvelle technologie qui rendrait l’extraction minérale plus propre. Divers partenaires gouvernementaux et l’entreprise privée suisse SELFRAG ont investi au total 1,53 M$ pour soutenir le projet.
L’innovation se situe à l’étape du concassage-broyage du minerai. Grâce à de l’électricité emmagasinée, il est possible, via des hautes puissances pulsées, de libérer les substances nobles de la roche plus facilement.
«En fait, c’est une technologie militaire utilisée en Russie dans les années 60, raconte le directeur du CTRI, Hassine Bouafif. L’entreprise suisse (SELFRAG) a expérimenté le procédé, mais pas dans le contexte minier. Ils sont donc curieux de voir les résultats.»
«Notre rôle est donc de pouvoir adapter l’usage de cette technologie dans le secteur minier, comme étant une alternative propre et plus économique aux procédés mécaniques conventionnels très énergivores», explique l’hydrométallurgiste au CTRI, Nassima Kemache, aussi membre du groupe de recherche sur les métaux stratégiques, Éléments 08.
Lithium et compagnie
Le nouveau procédé permet des économies importantes pour les entreprises minières, parce qu’il intervient plus tôt dans le processus d’extraction du minerai.
Ici, l’économie est double, souligne M. Bouafif. «Au Québec, on utilise l’hydroélectricité, qui est une énergie propre. On économise donc sur l’énergie fossile pour le concassage-broyage, et aussi sur la production même de l’électricité. Dans d’autres régions du monde, l’électricité est produite avec de l’énergie fossile, mais malgré tout, ce procédé permet des économies.»
Actuellement, les minières de l’Abitibi-Témiscamingue surveillent avec intérêt les travaux du CTRI. «Ils utilisent toujours les anciens procédés, et ils attendent de voir si le jeu en vaut la chandelle, souligne Hassine Bouafif. On évalue les économies d’énergie à environ 20% actuellement.»
Le nouveau procédé peut servir à tout type de minerai, mais il suscite encore plus d’intérêt pour les mines de lithium. «Le spodumène, à plusieurs endroits, est traité avec divers produits chimiques pour en extraire le lithium, explique M. Bouafif. Il s’agit donc de rendre cette première étape encore plus propre.»
L’enjeu est d’autant plus important que le lithium est devenu une substance en demande pour la fabrication de piles pour les voitures électriques. Cette technologie est aussi bonne pour le silicium, utilisé pour la fabrication de panneaux solaires.
L’électricité pulsée permet également un meilleur taux de récupération de la matière noble dans le minerai. «On a constaté une différence entre du minerai concassé mécaniquement et du minerai concassé par électricité pulsée, indique Hassine Bouafif. C’est surtout vrai dans le cas du procédé d’enrichissement du lithium.»
Le projet laisse entrevoir un éventuel partenariat entre Canadiens et Suisses. «Amener notre technologie à une échelle industrielle minière via la collaboration avec les partenaires miniers canadiens est pour nous une idée très excitante, a indiqué par voie de communiqué le directeur général de SELFRAG, Frédéric von der Weid. Nous espérons que cette collaboration évoluera vers un partenariat stratégique avec le CTRI et, pourquoi pas, avec le secteur minier du Canada.»
Texte de l’Initiative de journalisme local