Des cavernes de sel peuvent jouer un rôle clé pour la transition vers l’énergie verte
La Presse Canadienne|Publié le 16 août 2024Une section de l'installation Strategic Petroleum Reserve à West Hackberry, en Louisiane, le mercredi 9 septembre 2020. (Photo: HO-U.S. Department of Energy via The Associated Press)
Julie Lemieux, présidente et cheffe de la direction de Triple Point Resources, veut faire comprendre l’importance du dôme de sel de Fischell, une formation géologique sur la côte ouest de Terre-Neuve qui, selon elle, pourrait jouer un rôle clé dans la transition vers l’énergie verte.
Le dôme est un épais monticule ou une colonne de dépôts de sel naturels, entouré de couches de roche. Si le sel est dissous et que la colonne est creusée et remplie d’hydrogène, a déclaré Julie Lemieux, elle pourrait devenir l’une des plus grandes installations de stockage d’énergie verte de l’est de l’Amérique du Nord.
«La caverne que nous pourrions construire pourrait être aussi grande que l’Empire State Building», a affirmé la présidente.
«Le modèle que nous avons montré illustre qu’elle peut être encore plus grande que cela.»
La société dirigée par Julie Lemieux, qui cherche à développer le site de Fischell pour le stockage d’hydrogène, est l’une des nombreuses entreprises canadiennes qui se sont tournées vers les cavernes de sel souterraines alors que l’intérêt mondial pour les sources d’énergie plus vertes prend de l’ampleur.
Le concept n’est pas nouveau: l’industrie pétrolière utilise depuis longtemps des cavités souterraines pour l’entreposage sécuritaire des hydrocarbures. En Alberta, par exemple, plus de 100 cavernes de sel sont utilisées comme réservoirs de stockage de gaz naturel depuis 50 ans.
Au sud de la frontière, la Réserve stratégique de pétrole des États-Unis détient des stocks de pétrole brut d’urgence dans d’immenses cavernes de sel situées le long de la côte du golfe du Mexique.
Mais l’intérêt s’amplifie désormais pour l’utilisation de structures souterraines naturelles similaires pour stocker l’hydrogène, une source de carburant propre qui pourrait contribuer à remplacer les combustibles fossiles alors que les pays du monde entier cherchent à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.
L’hydrogène peut être utilisé comme carburant pour les transports, dans les environnements industriels et pour l’électrification. Bien que la majeure partie de l’hydrogène utilisé aujourd’hui soit produit à partir de gaz naturel, il peut également être produit à l’aide de sources d’énergie propres telles que l’éolien et le solaire.
Ottawa a mis en place une stratégie nationale visant à ce qu’un tiers de la consommation énergétique du Canada provienne d’hydrogène propre d’ici 2050. Le gouvernement a également signé un accord avec l’Allemagne visant à accélérer les exportations à échelle commerciale du Canada vers le marché allemand.
Provinces de l’Atlantique
Bien qu’il en reste encore beaucoup à faire pour accroître la production d’hydrogène au pays, la côte est a été identifiée comme un pôle potentiel pour ce secteur en plein essor. Plusieurs projets sont proposés dans les provinces de l’Atlantique qui visent à produire de l’hydrogène propre à partir de parcs éoliens massifs, et Julie Lemieux a déclaré que si ces projets se concrétisent, ils auront besoin de capacités de stockage.
«Cette structure géologique est étudiée depuis les années 60 (…) les gens savaient qu’il y avait une structure de sel à cet endroit», a expliqué Julie Lemieux, ajoutant que des tests ont révélé que le dôme de sel de Fischell pourrait avoir le potentiel de stocker plus de 35 millions de mètres cubes d’hydrogène, soit l’équivalent de 180 000 tonnes.
«Ce n’était tout simplement pas le bon moment, et maintenant, le moment est venu avec l’importance de l’hydrogène.»
«Avec toute la demande d’hydrogène à l’échelle mondiale, et si tous ces projets se concrétisent sur la côte est, il y aura une demande importante de stockage pour tout le monde», a déclaré Paul Sparkes, président et chef de la direction de Vortex Energy, une autre entreprise canadienne qui travaille au développement de cavernes de stockage de sel d’hydrogène à Terre-Neuve.
Hassan Dehghanpour, chercheur en génie pétrolier à l’Université de l’Alberta, étudie la faisabilité du stockage de l’hydrogène dans des cavernes de sel souterraines. Selon lui, le stockage souterrain est plus judicieux que la méthode traditionnelle de stockage de l’hydrogène dans des réservoirs en surface.
«L’avantage des cavernes est que nous pouvons stocker des quantités d’hydrogène beaucoup plus importantes.»
«L’autre avantage est la sécurité. Si vous souhaitez stocker de grandes quantités d’hydrogène dans des installations de surface, il y aura toujours un risque d’explosion, tandis que les cavernes, elles se trouvent à plus de deux kilomètres sous la surface de la Terre, donc elles sont beaucoup plus sûres.»
Hassan Dehghanpour a déclaré que le coût initial de développement d’une caverne de sel individuelle pour le stockage de l’hydrogène — le dôme de sel de Fischell peut accueillir plusieurs cavernes — pourrait être d’environ 20 millions de dollars, mais une fois qu’elles seront opérationnelles, les coûts à long terme seront minimes.
Julie Lemieux a affirmé que l’hydrogène avait le potentiel d’être utilisé à l’échelle nationale pour alimenter le réseau électrique, ou qu’il peut être converti en ammoniac pour être expédié vers les marchés d’exportation. Dans les deux cas, la présence de cavernes de sel naturelles rend le développement d’une industrie de l’hydrogène beaucoup plus pratique.
Par Amanda Stephenson