Glencore espère que la transaction, sujette à approbation règlementaire, sera finalisée au troisième trimestre 2024. (Photo: 123RF)
Zurich — Le géant du négoce des matières premières Glencore a fini par décrocher une participation dans le charbon de Teck Resources après un féroce bras de fer avec le groupe canadien, moyennant 6,93 milliards de dollars américains (G$US) pour s’en emparer.
Le groupe suisse va obtenir une participation de 77% dans Elk Valley Resource (EVR), qui regroupe le charbon de Teck Resources, au côté du sidérurgiste japonais Nippon Steel Corporation qui prendra 20% des parts, annonce-t-il mardi dans un communiqué.
«Nous sommes heureux d’être parvenus à un accord», a déclaré Gary Nagle, son directeur général, cité dans le communiqué, assurant que Glencore entend veiller à ce que «la transaction soit bénéfique pour le Canada».
Les visées de Glencore sur Teck Resources avaient fait des remous dans les milieux politiques au Canada. Glencore s’est donc efforcé de vanter les mérites de la transaction: elle n’entraînera pas de suppressions nettes d’emplois et le siège d’EVR restera à Vancouver. De plus, l’entreprise continuera d’engager des dépenses d’investissements au Canada.
Glencore espère que la transaction, sujette à approbation règlementaire, sera finalisée au troisième trimestre 2024.
L’action gagnait 3,18% à 444,15 pence alors que le FTSE100, l’indice de la Bourse de Londres, où Glencore est coté, perdait 0,38%.
Avec cette vente, Teck Resources pourra se concentrer sur les minéraux critiques comme le cuivre, explique de son côté Jonathan Price, le PDG du groupe canadien dans un communiqué séparé. L’accord valorise ses activités dans le charbon à 9 milliards de dollars.
Teck Resources, un des plus grands groupes miniers au Canada, avait lancé un projet de scission de ses activités de charbon et de métaux. Mais en avril, Glencore avait dévoilé une offre complexe et controversée, lui proposant d’abord de mettre en commun leurs activités dans le charbon et les métaux, puis de les scinder dans un deuxième temps.
Introduction en Bourse à venir
Teck Resources avait fermement rejeté son offre, malgré une tentative de Glencore pour l’améliorer. Le groupe canadien était soutenu par ses deux plus gros actionnaires, dont Norman Keevil, le patriarche de la famille qui détient une grande partie des actions assorties de davantage de droits de vote.
Mais l’offre de Glencore avait séduit d’autres actionnaires de Teck Resources, au point que son projet de scission avait capoté. Quelques heures avant une assemblée générale, il avait fini par y renoncer.
Dans le communiqué publié mardi, Norman Keevil, s’est rallié à cet accord, estimant qu’il permet à Teck Resources de poursuivre sa croissance tout «en préservant les emplois» dans les mines de charbon.
Contrairement à plusieurs concurrents qui se désengagent du charbon, Glencore continue de défendre cette matière première, disant vouloir gérer ses mines de manière responsable jusqu’à ce qu’elles s’épuisent, ce qui lui vaut de vives critiques, y compris de la part de ses actionnaires.
Durant l’assemblée générale en mai, des investisseurs — dont les sociétés de gestion d’actifs britannique Legal & General Investment Management et HSBC Asset Management — s’étaient mobilisés dans un vote de défiance pour forcer Glencore à fournir des informations sur sa stratégie dans le charbon.
Glencore s’offre des activités charbonnières «tout en maintenant ses promesses climatiques. Les prédateurs ont leur propre logique», a réagi sur X (ex-Twitter) Adrià Budry Carbó, membre de Public Eye, une ONG suisse très critique de Glencore.
Dans un commentaire de marché, Russ Mould, directeur des investissements chez AJ Bell, souligne qu’à l’heure «où la plupart des sociétés minières se détournent du charbon», «Glencore semble doubler la mise sur cette énergie fossile».
Pourtant, la transaction a un sens, selon lui, l’objectif étant d’introduire séparément en Bourse les activités de charbon sidérurgique de Teck Resources et de charbon thermique de Glencore dans les deux années suivant leur intégration.
Si Glencore parvient à mettre en œuvre ce projet, le reste de ses activités «sera débarrassé de la mauvaise odeur du charbon», argumente-t-il, ouvrant la porte à de nouveaux investisseurs.
Depuis 2020, le fonds souverain norvégien, le plus gros investisseur au monde, a placé Glencore sur sa liste d’exclusion.