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Hydro-Québec investit dans l’énergie solaire

La Presse Canadienne|Publié le 04 février 2019

Le but est de se familiariser avec l’énergie solaire afin d’être en mesure de «positionner» sur la question en 2021-2022

Hydro-Québec se prépare à tester la production d’énergie solaire par l’entremise d’un investissement pouvant atteindre 40 millions $, mais qui ne devrait pas faire grimper les tarifs de ses clients, assure la société d’État.

Un « parc expérimental » de 36 000 panneaux solaires répartis sur deux vastes terrains situés à La Prairie et Varennes, en banlieue sud de Montréal, devrait être mis en service l’an prochain. Sa capacité de production serait d’environ 10 mégawatts (MW) — un volume suffisant pour alimenter environ 600 résidences.

Au moment où de plus en plus de particuliers se tournent vers la photovoltaïque, l’objectif de la société d’État ne consiste pas à déployer une production à grande échelle, mais plutôt de se familiariser avec l’énergie solaire afin d’être en mesure de « positionner » sur la question en 2021-2022, selon le président de sa division production, David Murray.

« Nous voulons voir comment cette technologie s’intègre sur notre réseau, a-t-il expliqué, au cours d’une entrevue avec La Presse canadienne. Aux États-Unis, le coût de production est de 15 ou 16 cents par kilowattheure. Cela va diminuer et on doit tester cette technologie. »

Actuellement, la production d’un kilowattheure coûte entre deux et trois cents à la société d’État.

M. Murray a assuré que les clients d’Hydro-Québec ne financeraient pas cette nouvelle aventure par l’entremise des tarifs d’électricité qu’ils payent. Les deux parcs relèveront de la division de la production, qui exploitera les parcs. Cela est différent du cas de la filière éolienne, alors qu’Hydro-Québec Distribution doit acheter de l’énergie auprès de producteurs privés, ce qui se reflète dans ses demandes tarifaires envoyées à la Régie de l’énergie.

Hydro-Québec détient déjà un terrain sur lequel se trouvent des panneaux photovoltaïques dans le Nord-du-Québec afin d’alimenter le village de Quaqtaq, où se trouve également une centrale thermique.

Deux formules

La société d’État a opté pour deux terrains qui lui appartiennent en banlieue sud de Montréal puisqu’ils se trouvent à proximité de son institut de recherche, qui se chargera d’effectuer les tests et les analyses.

Une demande sera envoyée au ministère de l’Environnement afin d’être en mesure d’effectuer les travaux et les premiers appels d’offres — donc ceux entourant l’achat de panneaux — devraient être lancés en mars ou en avril.

Hydro-Québec exploitera un parc de 7,5 MW afin d’analyser sa performance en matière de production alors que le deuxième site, d’une puissance installée de 2,5 MW, servira de laboratoire pour effectuer des essais.

« Il existe des panneaux bifaces, qui permettent par exemple de capter la lumière reflétée par la neige », a dit M. Murray.

Il y aura également des enjeux entourant l’installation, car les panneaux devront, par exemple, être installés à une distance suffisamment élevée du sol afin de ne pas être ensevelis par la neige en période hivernale.

La société d’État table sur ce projet depuis le dépôt de son dernier plan stratégique, qui vient à échéance en 2020. Un objectif de 100 MW a déjà circulé, mais cela a depuis été révisé à la baisse par les ingénieurs à l’interne.

Interrogé, M. Murray a expliqué que le volume d’environ 10 MW était suffisant afin de déterminer s’il valait la peine ou non d’aller plus loin au terme des analyses, défendant au passage la facture de 30 millions $ du projet.

« Tous les pays effectuent cette démarche, a-t-il affirmé. Est-ce que des (parcs solaires) pourraient être complémentaires à des endroits où il y a des limites pour notre réseau ? Il faut l’évaluer. »

Pas convaincu

S’il salue les initiatives de recherche chez Hydro-Québec, Pierre-Olivier Pineau, titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie à HEC Montréal, se demande toutefois si ce projet est nécessaire.

« Certainement, cela n’a aucun sens pour les cinq prochaines années, a-t-il expliqué, au cours d’un entretien téléphonique. C’est bien de voir Hydro-Québec développer une certaine expertise, mais cela est démesuré par rapport à ce que je perçois comme besoins en matière de recherche et de développement. »

Selon l’expert, ce projet émane plutôt d’un « désir politique » dans la foulée du plan d’action de la politique énergétique 2030 où l’on veut « démontrer que l’on fait des choses » dans le secteur solaire.

Ce document gouvernemental prévoit que la société d’État soit en mesure de bâtir son expertise « sur la production centralisée d’électricité de source solaire en réalisant un projet pilote de parc solaire ».

« Il y a des acteurs québécois qui exploitent des parcs solaires au Québec, a rappelé M. Pineau. Alors est-ce que c’est nécessaire pour Hydro-Québec d’investir pour acquérir cette expérience ? Ils auraient pu embaucher des consultants. »