L’industrie minière perd un autre siège social, selon Osisko
François Normand|Publié le 14 janvier 2019Ces dernières années, plusieurs fleurons miniers canadiens sont passés aux mains d'étrangers, selon Bryan A. Coates.
L’industrie minière au Canada vient de perdre un autre siège social à la suite de l’achat de Goldcorp par l’américaine Newmont Mining, et ce n’est pas une bonne nouvelle pour l’économie, affirme Bryan A. Coates, président de Redevances aurifères Osisko.
Newmont a annoncé ce lundi qu’elle avalait Goldcorp au coût de 10 milliards de dollars américains (13,2 G$CA). Au Québec, le producteur d’or de Vancouver exploite la mine Éléonore, à la Baie-James, qui emploie environ 1000 personnes.
Newmont n’était pas présente au Canada.
«On perd encore un leader canadien. Il y a eu Alcan, Falconbridge, Inco et Barrick Gold, et maintenant Goldcorp», laisse tomber au bout du fil Bryan Coates, dont l’entreprise investit dans les producteurs d’or.
En septembre, la canadienne Barrick Gold a acheté son concurrent britannique Rangold.
Par contre, des sources de l’industrie comme Pierre Lassonde, président de la torontoise Franco-Nevada, affirment qu’il y a un glissement du centre décisionnel de Barrick Gold à l’étranger, car des membres de la haute direction n’habitent même pas au Canada.
«Le siège social d’une entreprise est l’endroit où le PDG et le chef de la direction financière travaillent, et ils doivent travailler dans la même pièce. Sans cela, ce n’est pas de facto une entreprise canadienne», affirme Pierre Lassonde, cité par le Financial Post.
Par contre, il voit d’un bon oeil l’achat de Goldcorp.
«Je crois que c’est une très bonne affaire autant pour Newmont Mining que pour les actionnaires de Goldcorp. NEM a les deux choses qui manquaient à GG: des états financiers hors pair et une équipe qui peut livrer la marchandise et qui a livré depuis que Gary Goldberg est président», dit-il.
Selon lui, Goldcorp a un «excellent pipeline» de projets, mais elle n’a pas les moyens de les développer.
Par ailleurs, Pierre Lassonde minimise la disparition du siège social de Goldcorp.
«Oui, il disparait. Par contre, le bureau de Vancouver devient le bureau des opérations américaines de plus de 3 millions d’onces par année. Par conséquent, toute l’équipe technique reste en place et pourrait même être plus grosse», dit Pierre Lassonde.
Selon Bryan Coates, l’achat de Goldcorp provoque le départ d’un autre siège social important, même si la minière Newmont s’est engagée à implanter son siège social opérationnel pour ses activités nord-américaines à Vancouver et qu’elle continuera à faire de l’exploration au Canada
«En fin de compte, l’histoire, c’est la perte d’un autre siège social et d’un joueur important dans le secteur minier», déplore le patron de Redevances aurifères Osisko.
Les retombées positives d’un siège social
Outre le centre décisionnel, un siège social abrite aussi les plus hauts salaires dans une entreprise, fait-il remarquer.
Par conséquent, les retombées économiques locales (consommation, immobilier, etc.) sont plus élevées qu’un centre décisionnel, sans parler de l’écosystème gravitant autour des sièges sociaux, et ce, des avocats aux comptables en passant par la R-D.
Selon lui, ce type de nouvelle devrait alimenter une réflexion collective sur la façon de favoriser le développement et le maintien de leaders mondiaux de propriété canadienne au Canada.
Par ailleurs, en ce qui a trait aux impacts économiques sur le terrain au Québec, Newmont poursuivra vraisemblablement le développement de la mine d’or Éléore, estime le géologue André Gaumond, qui a découvert ce gisement au début des années 2000.
«Ce sera business as usual», dit le président du conseil d’administration de la junior Harfang Exploration et administrateur de Redevances aurifères Osisko.
À ses yeux, Newmont a tout intérêt à poursuivre le développement de la mine (entrée en production en 2014) et à lancer à terme une phase d’exploration dans les alentours de la mine d’Éléonore.
Goldcorp avait acheté le gisement de Mines Virginia en 2006.
André Gaumond affirme que l’arrivée de Newmont peut apporter de nouvelles idées et de nouvelles technologies pour exploiter la mine et peut-être même prolonger sa durée de vie évaluée à plus de 15 ans.
En avril 2017, un reportage de Les Affaires montrait que la région encerclant la mine d’or Éléonore a le potentiel de devenir un nouveau camp minier (un territoire ou une région où se trouvent plusieurs mines actives), selon divers spécialistes.
En fait, cette région serait l’espoir minier numéro un du Québec.