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Ottawa veut imposer une surtaxe sur les VÉ chinois

La Presse Canadienne|Mis à jour le 24 juin 2024

Ottawa veut imposer une surtaxe sur les VÉ chinois

La ministre fédérale des Finances, Chrystia Freeland (Photo: La Presse Canadienne)

Ottawa — Le Canada a accusé la Chine de porter atteinte aux règles du commerce mondial et d’inonder le marché de véhicules électriques alors que la ministre fédérale des Finances, Chrystia Freeland, a annoncé lundi le lancement d’un processus pour imposer de nouvelles taxes à l’importation sur les véhicules électriques fabriqués en Chine.

Cette décision intervient quelques semaines après que les États-Unis et la Commission européenne ont décidé d’imposer leurs propres nouveaux droits d’importation sur les véhicules électriques chinois, invoquant des subventions injustes visant à remplacer les véhicules plus chers fabriqués en Europe et en Amérique du Nord.

S’exprimant dans une usine de fabrication de pièces automobiles à Vaughan, en Ontario, Mme Freeland a déclaré qu’une consultation de 30 jours débuterait le 2 juillet pour enquêter sur les pratiques commerciales déloyales de la Chine liées aux véhicules électriques.

Mais il semble clair que la ministre fédérale des Finances dispose déjà des preuves dont elle a besoin.

«La Chine a intentionnellement créé une surcapacité et une offre excédentaire et les a exportées vers d’autres pays, a-t-elle déclaré. Cela ne respecte pas les règles du commerce mondial et le Canada ne le tolérera pas.»

Ottawa a réalisé des investissements massifs dans son secteur automobile au cours des quatre dernières années dans le but de consolider la position du Canada en tant que leader mondial dans la chaîne d’approvisionnement des véhicules électriques.

Depuis octobre 2020, le Canada a attiré plus de 46 milliards de dollars (G$) d’investissements pour 13 projets de fabrication de véhicules électriques, de batteries et de composants de batteries. Le Canada et les provinces offrent jusqu’à 53 G$ pour ces projets, notamment sous forme de crédits d’impôt, de subventions à la production et d’investissements en capital.

Contrer la domination chinoise

Le Canada travaille également en étroite collaboration avec les États-Unis pour tenter de contrer la domination de la Chine dans le domaine des véhicules électriques et d’autres technologies propres.

Ces efforts ont permis au Canada de prendre la première place, devant la Chine, pour la première fois cette année dans le classement annuel de la société de recherche BloombergNEF sur le potentiel des pays dans la chaîne d’approvisionnement des batteries lithium-ion.

Les discussions sont lancées en vertu de l’article 53 du Tarif des douanes, qui permet l’imposition d’une surtaxe sur les marchandises importées en réponse à des pratiques qui nuisent à l’industrie canadienne.

Il s’agit du même article utilisé en 2018 lorsque le Canada a imposé une surtaxe de représailles sur les produits d’aluminium et d’acier importés des États-Unis après que le président de l’époque, Donald Trump, a imposé de nouveaux tarifs sur ceux d’origine canadienne.

Mme Freeland a déclaré qu’elle «n’excluait rien» parmi les mesures que le Canada pourrait prendre, y compris l’extension d’une surtaxe au-delà des seuls véhicules électriques à d’autres parties de la chaîne d’approvisionnement des véhicules électriques, comme les batteries et leurs composantes.

La consultation examinera non seulement les dommages économiques causés au Canada, mais également les risques pour la sécurité nationale ainsi que les normes environnementales, du travail et des droits de la personne.

«Je pense qu’il existe de bonnes raisons de dire que la Chine n’est pas à la hauteur dans ces domaines», a soutenu Mme Freeland.

Outre une surtaxe sur les importations, la consultation évaluera les restrictions supplémentaires en matière d’investissement et déterminera si le Canada devrait modifier les voitures admissibles au programme d’incitatifs pour les véhicules zéro émission.

La remise s’élève actuellement à 5000$ pour les véhicules électriques jusqu’à un certain niveau de prix.

À l’heure actuelle, les seuls véhicules électriques fabriqués en Chine importés au Canada proviennent du géant américain de la technologie Tesla. Ils sont fabriqués à l’usine de l’entreprise à Shanghai. Aucun véhicule électrique de marque chinoise n’est vendu ou importé au pays pour le moment.

Les véhicules Tesla sont soumis à un droit d’importation de 6 %, le taux qui serait actuellement appliqué à tous les véhicules fabriqués en Chine, mais la plupart des modèles sont admissibles à la remise de 5000$.

Réactions positives

Les constructeurs automobiles et les syndicats de l’automobile du Canada ont exprimé leurs inquiétudes quant à la possibilité d’un afflux de voitures chinoises bon marché, alors que ce pays est devenu l’acteur dominant de l’industrie des véhicules électriques à l’échelle mondiale.

La présidente d’Unifor, Lana Payne, a salué lundi la décision canadienne aux côtés de Mme Freeland.

«Une vague d’importations de véhicules électriques à bas prix en provenance de Chine sapera tout ce qui est fait actuellement pour reconstruire et développer une industrie automobile forte et véritablement nationale», a mis en garde Mme Payne.

David Adams, président de Constructeurs mondiaux d’automobiles du Canada, a affirmé lundi dans un communiqué qu’il soutenait également cette décision: «il est important que le gouvernement canadien offre des conditions de concurrence équitables pour notre secteur et nous attendons avec impatience les consultations à cet égard».

Le porte-parole conservateur en matière de commerce, Kyle Seeback, a pour sa part écrit dans un communiqué que la protection des emplois des travailleurs canadiens était la priorité de son parti. «Le Canada ne devrait pas permettre le dumping de produits chinois bon marché dans notre pays qui menacent les emplois manufacturiers canadiens.»

M. Seeback a également exprimé ses inquiétudes concernant les subventions du Canada aux usines de batteries pour véhicules électriques, qui permettent aux travailleurs étrangers de remplacer les Canadiens.

Environ 70 % des batteries des véhicules électriques et 60 % des véhicules électriques sont désormais fabriqués en Chine.

La Commission européenne a lancé une enquête antisubventions sur les véhicules électriques chinois l’automne dernier après que la part de marché chinoise en Europe est passée de moins de 1 % à plus de 8 %, et ce, en moins de quatre ans.

L’Europe a annoncé il y a environ deux semaines son intention d’imposer, à partir du 4 juillet, entre 17 % et 38 % de droits de douane supplémentaires sur les importations chinoises, en plus des droits de douane existants de 10 %. Cependant, au courant du week-end, la Chine et l’Union européenne ont accepté de négocier, ce qui pourrait modifier ou retarder cette décision.

La Chine a menacé de riposter contre les produits européens si les droits de douane étaient appliqués comme prévu.

Le président américain Joe Biden a déclaré à la mi-mai que la taxe à l’importation sur les véhicules électriques chinois quadruplerait pour atteindre 100 %, la taxe à l’importation sur les batteries pour véhicules électriques passant de 7,5 % à 25 %. Les deux augmentations sont prévues pour le mois d’août.

 

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