Plusieurs entreprises convoitent Lithium Amérique du Nord
François Normand|Publié le 14 janvier 2021De trois à cinq entreprises pourraient présenter une offre d'achat, selon les informations colligées par Les Affaires.
Au moins trois entreprises convoiteraient les activités de Lithium Amérique du Nord, qui exploite la mine La Corne en Abitibi-Témiscamingue.
Lithium Amérique du Nord est sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, depuis mai 2019.
La société est contrôlée par le manufacturier chinois de batteries CATL et Investissement Québec, les deux actionnaires qui ont des créances garanties. La minière cherche un investisseur pour prendre la place de la chinoise Jien International Investment, qui avait racheté Québec Lithium avec IQ, mais qui a depuis fait faillite en Chine.
Actuellement à l’arrêt, la mine a déjà produit 180 000 tonnes de concentrés de lithium entre août 2017 et février 2019.
La minière a aussi des installations pour produire du carbonate de lithium (à partir de spodumène de lithium), un élément essentiel servant à fabriquer des équipements électroniques ou des batteries électriques.
Les entreprises intéressées à racheter les actifs de Lithium Amérique du Nord ont jusqu’à ce vendredi 15 janvier en fin de journée pour présenter leur offre d’achat auprès de Raymond Chabot, le syndic responsable du dossier.
Une minière australienne et québécoise
C’est connu, la minière Sayona Québec, une filiale de l’australienne Sayona Mining, spécialisée dans le secteur du lithium, souhaite racheter les installations de Lithium Amérique du Nord.
Le chef de la direction de Sayona Québec, Guy Laliberté, a confirmé dans un courriel à Les Affaires que son entreprise présentera d’ici vendredi en fin de journée une offre d’achat.
La minière a deux projets en Abitibi-Témiscamingue : le projet Authier Lithium (extraction et concentration de minerai contenant du lithium) et le projet Tansim, une propriété sur laquelle la société détient des titres miniers.
Le 11 janvier, l’australienne Piedmont Lithium, qui a une usine de concentrés de spodumène de lithium en Caroline du Nord, a pris une participation de 19,9% dans le capital de Sayona Mining, et 25% dans celui de Sayona Québec.
Piedmont Lithium s’est aussi engagée à acheter 50% de la production de concentré de spodumène de Sayona Québec.
En septembre, Piedmont Lithium a conclu un accord avec Tesla pour fournir au constructeur de voitures électriques du minerai de lithium de haute pureté pendant une période pouvant aller jusqu’à 10 ans, selon le site Mining.com.
Selon une source de l’industrie minière qui requiert l’anonymat, la minière québécoise Central America Nickel, dont le siège social est à Montréal, serait aussi un «candidat sérieux» pour présenter une offre d’achat pour faire l’acquisition de Lithium Amérique du Nord.
La direction de la société n’a pas répondu à notre demande d’interview afin d’avoir plus d’information à ce sujet.
Sur son site web, la minière se présente comme une société concentrée dans le traitement et la purification des métaux dits énergétiques comme le nickel, le cobalt et le cuivre. Elle indique aussi contrôler des «réserves substantielles» de ces métaux.
Des acheteurs potentiels chinois?
Une autre source de l’industrie qui préfère également garder l’anonymat affirme qu’il y a aussi possiblement au moins un «acheteur chinois potentiel» sur les rangs pour reprendre les activités de Lithium Amérique du Nord.
Cet acheteur chinois pourrait être basé en Chine (sans avoir de présence au Canada) ou avoir déjà des actifs dans l’industrie minière canadienne, selon cette source.
Chez le syndic Raymond Chabot, l’associé Benoit Fontaine, spécialisé en redressement et en insolvabilité d’entreprise, confirme qu’il y a «des entreprises intéressées» à racheter Lithium Amérique du Nord.
Selon nos informations, il pourrait y avoir de trois à cinq entreprises intéressées. «C’est dans ces eaux-là», confirme Benoit Fontaine, sans pouvoir en dire plus.
À compter de lundi, Raymond Chabot devra évaluer les offres d’achat qui lui auront été présentées afin d’évaluer laquelle est la meilleure pour assurer la pérennité de Lithium Amérique du Nord.
Investissement Québec aura aussi sans doute son mot à dire à ce sujet.
En août 2020, le premier ministre François Legault avait dit s’inquiéter que l’industrie du lithium au Québec ne passe aux mains d’intérêts exclusivement étrangers, rapportait le Journal de Montréal.
«Si on veut être capables de construire des batteries, ça commence par le lithium. Je ne voudrais pas que cette filière-là soit donnée aux Chinois ou à des entreprises étrangères», avait-il alors répondu au quotidien lorsque questionné sur la décision du gouvernement de s’impliquer dans le sauvetage de Nemaska Lithium.
Cette dernière avait dû elle aussi se mettre sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies.