Six nations autochtones veulent bloquer un projet d’Hydro-Québec
La Presse Canadienne|Publié le 04 Décembre 2020Ils affirment qu’ils n’ont pas été consultés avant de se lancer dans ce projet.
Six nations autochtones du Québec et du Labrador ont décidé de faire front commun contre Hydro-Québec, pour bloquer un projet de vente d’électricité de la Société d’État vers la Nouvelle-Angleterre.
Les nations du Québec et celle du Labrador ont adressé des mémoires distincts à la Régie de l’énergie du Canada pour tenter de contrecarrer le projet d’Hydro, affirmant qu’ils n’ont pas été consultés avant de se lancer dans ce projet.
Des Innus de Pessamit (Côte-Nord), des Atikamekw de Weimotaci (Haute-Mauricie), et des Anishinabeg de Lac-Simon, Pikogan et Kitcisakik (Abitibi), ont joint leurs voix à celle de la Nation Innu du Labrador pour s’opposer à la construction d’un corridor de transport d’électricité vers les États-Unis.
« On va continuer à mettre de la pression pour être écoutés, affirme le porte-parole de la communauté Anishinabe de Lac-Simon, Lucien Wabanonik. Aujourd’hui, Hydro-Québec veut exporter de l’électricité aux États-Unis, mais contrairement à l’Ontario qui s’acquitte de ses obligations constitutionnelles, le Québec ne manifeste aucune volonté de compenser nos communautés pour l’ennoiement et la destruction de nos territoires traditionnels. »
Selon M. Wabanonik, Hydro-Québec utilise 36 % du territoire des communautés pour ériger ses barrages et ses autres infrastructures.
C’est notamment le cas du Réservoir Dozois, situé au beau milieu du village de Kitcisakik, dans la Réserve faunique La Vérendrye, où ironiquement les résidants n’ont ni électricité, ni eau courante depuis des années.
Du côté de Weimotaci, le chef François Neashit dénonce le fait qu’avec ses nombreux barrages, Hydro-Québec empêche sa communauté de se nourrir. « Nos grands-parents se nourrissaient des poissons pêchés dans la rivière Saint-Maurice, mais maintenant, cela n’est plus possible, dit-il. De grandes parties de notre territoire sont détruites et le pire, c’est que tout cela s’est fait sans que personne ne daigne nous consulter. »
Les représentants des six nations estiment que le premier ministre Justin Trudeau a une belle occasion de démontrer que son projet de loi en lien avec la Déclaration des Nations-Unies sur les droits des peuples autochtones est sérieux.
« Si le premier ministre Trudeau est sérieux quant à cet engagement, cela pourrait forcer Hydro-Québec à mettre en veilleuse son projet d’exportation vers les États-Unis, tant et aussi longtemps que des compensations pour le saccage de nos terres ancestrales n’auront pas été négociées avec nos Premières Nations », affirme la Grande Cheffe adjointe de la Innu Nation, Mary Ann Nui.
La transition retarde le processus
Les autochtones ont aussi déposé leur mémoire au Congrès américain, pour les sensibiliser à leur cause. Mais l’élection du 3 novembre dernier retarde quelque peu le processus, souligne Lucien Wabanonik. « C’est sûr que la transition (Trump-Biden) crée des délais. Mais malgré tout, plusieurs acteurs dans le dossier sont toujours en poste. Le travail se poursuit auprès d’eux. »
La coalition estime que les agissements d’Hydro-Québec démontrent leur mépris envers les Premières-Nations.
« Les indicateurs de bien-être pour nos communautés continuent d’être comparables à ceux de pays du tiers-monde, phénomène se traduisant par la création et le maintien de deux classes de citoyens, affirment les chefs des six nations dans un communiqué. Comble de l’indécence, on nous demande aujourd’hui de contribuer au mieux-être de citoyens américains sans même songer à nous dédommager pour les torts causés à nos territoires ancestraux depuis le début du XXe siècle. La réponse est non. »