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B Corp, bientôt de nouveaux standards

Philippe Jean Poirier|Édition de la mi‑octobre 2024

B Corp, bientôt de nouveaux standards

Michele Musci, stratège d’impact de l’agence Republik (Photo: courtoisie)

B CORP: REDÉFINIR LA PERFORMANCE. Le mouvement B Corp est porté par l’idée qu’une entreprise ne devrait pas uniquement chercher à enrichir ses actionnaires, mais aussi bénéficier à l’ensemble de la communauté, d’où l’appellation « B » pour « Benefit For All ». La manière de mesurer ce bénéfice, elle, demeure en constante évolution. Comme en fait foi l’annonce de B Lab Global de présenter une grille d’évaluation entièrement renouvelée en 2026.

L’annonce date de 2020, moment où B Lab Global a lancé sa consultation tout en dressant sa feuille de route menant à 2026. « C’est un important changement de paradigme, annonce Michele Musci, stratège d’impact de l’agence Republik. Les entreprises devront atteindre un pointage minimal dans chaque domaine d’évaluation pour être en mesure de se qualifier. Par exemple, en environnement, il y aura l’obligation de mesurer les GES. Dans le système actuel, une entreprise qui est extrêmement bonne dans un domaine, mais moins dans un autre, peut quand même obtenir sa certification cumulant 80 points. Ce ne sera plus le cas dans la prochaine version. »

Pour remettre cette annonce en contexte, Michele Musci rappelle que le processus d’évaluation, loin d’être « figé dans le béton », a toujours une dimension « évolutive ».

Le stratège parle d’expérience, puisque son agence a déjà obtenu une certification en 2015 et deux recertifications en 2018 et en 2021. D’une certification à l’autre, Michele Musci constate que B Lab Global place la barre toujours plus haut. « Si tu ne mets pas de nouvelles mesures en place, ton score diminue », résume-t-il. Les concepteurs du B Impact Assessment ont en outre la réputation d’affiner leurs questions d’année en année, pour mesurer avec toujours plus de précision l’effet global d’une entreprise. Sur le site de B Lab Global, l’entreprise rappelle d’ailleurs être passée au travers de six « révisions » de sa grille d’évaluation.

Lors de son annonce, l’entreprise américaine s’est dite particulièrement préoccupée par « la crise climatique [qui] s’intensifie » et « les inégalités sociétales [qui] se creusent ». « Nous devons faire évoluer les standards B Corp pour répondre à l’ampleur du défi qui nous attend, dit Michele Musci. Les nouveaux standards apporteront plus de clarté aux entreprises, en encourageant les activités commerciales les plus impactantes. »

Place aux indicateurs

Autre changement majeur, évoqué par Thomas Ferland-Dionne, cofondateur de l’entreprise Boite Pac : une entreprise va devoir mesurer les répercussions de ses initiatives par des indicateurs de performance. « En ce moment, ça donne des points, mais ce n’est pas obligatoire, précise-t-il. Avec les nouveaux standards, une entreprise devra trouver une manière de mesurer chacun des cinq piliers, à partir d’un tableau Excel ou d’un autre outil.»

« L’objectif du mouvement B Corp est de mettre sur le même pied d’égalité la maximisation des profits et le bien-être de ses collaborateurs », rappelle le cofondateur de Boite Pac. B Lab Global veut que les entreprises soient profitables, tout en se souciant de l’effet qu’elles ont sur la communauté, leurs équipes et la planète. Les indicateurs de performance rendront cette intention beaucoup plus concrète aux yeux des dirigeants d’une entreprise. « Quand un dirigeant veut savoir comment s’est passé son trimestre, oui, il va certainement regarder les profits, les bénéfices, les ventes. Mais il va aussi regarder aussi la satisfaction des employés, l’implication dans la communauté et son bilan carbone. »

En quête de polyvalence

D’une certaine manière, le nouveau cadre d’analyse amènera les entreprises vers un engagement plus polyvalent. Les entreprises à mission « sociale » ou « environnementale » ne pourront plus se contenter de miser sur leur « modèle d’affaires » pour cumuler les 80 points donnant accès à la certification. Inversement, les entreprises qui ont un modèle d’affaires « non durable » ne pourront plus se rabattre sur leur politique de diversité et leur code d’éthique pour sauver la mise. « Une B Corp, c’est une entreprise qui s’engage à vouloir créer de la valeur non seulement pour les actionnaires, selon l’approche classique en économie des entreprises, mais qui s’engage aussi à créer de la valeur pour toutes ses parties prenantes », insiste Michele Musci. Une logique qui tient la route, si on considère que nous partageons « toutes » et « tous » la même planète.