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Commetta, une comète à longue traîne

Philippe Jean Poirier|Édition de la mi‑octobre 2024

Commetta, une comète à longue traîne

Nathalie Rivière, présidente de l'agence Commetta (Photo: courtoisie

B CORP: REDÉFINIR LA PERFORMANCE. Après avoir inclus le libellé B Corp dans l’incorporation de son entreprise en 2015, l’agence montréalaise Commetta vient tout juste d’obtenir sa certification officielle cette année, après un périple de près de dix ans. Retour sur le parcours de cette B Corp atypique.

Commetta est une agence de marketing numérique qui a toujours fait une grande place à la diversité, étant trilingue et travaillant avec des collaborateurs espagnols, français et anglais. De plus, elle s’allie à des causes sociales, par l’entremise de clients OSBL qui veulent « changer le monde ». Elle croit aussi au bénévolat, puisqu’elle a cofondé Fuckup Nights Montréal, une série de conférences sur le thème de l’échec professionnel qu’elle gère depuis huit ans. La présidente, Natalie Rivière, a d’ailleurs toujours été inspirée par les valeurs du mouvement B Corp. C’est pourquoi elle a inclus le libellé de B Corp dès le jour 1, lors de l’incorporation de son entreprise.

Lorsque l’entrepreneuse montréalaise a officiellement ouvert son dossier sur la plateforme du B Impact Assessment (BIA), il y a trois ans, elle avait déjà plusieurs éléments en place pour atteindre les 80 points demandés. Pourtant, il y avait un grain de sable dans l’engrenage : Commetta n’a pas d’employés. L’agence est bâtie sur un modèle « entrepreneurial » où tous les collaborateurs sont indépendants. Or, le modèle de B Corp repose sur le fait d’avoir des employés. « J’ai dû avoir plusieurs discussions avec les analystes de B Corp pour savoir comment remplir le formulaire. À certains moments, je devais répondre comme si j’avais des employés. Et à d’autres moments, non. Pour finaliser le processus, il a fallu que j’ajuste des choses à l’intérieur de l’entreprise, d’un point vu structurel et financier. »

Au cours des discussions, Natalie Rivière a compris que B Lab Global songeait à apporter des modifications à leur propre processus pour faciliter le parcours d’entreprises comme Commetta, basées sur un modèle d’entrepreneurs et de collaborateurs. Puis, en juillet dernier, Natalia Rivière a eu le bonheur d’apprendre que sa candidature était acceptée avec un score final de 89,1, plus de 9 points au-dessus du seuil de passage. Au total, il s’est écoulé un an entre le moment de déposer le dossier et celui d’obtenir le verdict. Malgré la longueur et la difficulté du processus, Natalie Rivière y voit une expérience « positive ». « Ça me donne une crédibilité et ça démontre mon cheminement. »

Le simple fait de s’être joint au mouvement, il y a dix ans, l’a beaucoup aidée à développer son réseau d’affaires. « B Corp est une certification internationale qui a commencé aux États-Unis, rappelle-t-elle. Quand on ne connaît pas toutes les subtilités d’une culture locale, le mouvement B Corp est quelque chose qui aide à réseauter. Ça facilite les conversations avec des clients ou des collaborateurs internationaux qui partagent les valeurs B Corp. » Natalie Rivière soupçonne d’ailleurs une des membres de son CA, qui est elle-même coach en certification B Corp auprès de plusieurs entreprises, d’avoir accepté de se joindre à Commetta en raison de « valeurs partagées ».

La prochaine étape ? L’entrepreneuse montréalaise veut maintenant ouvrir le processus au reste de ses collaborateurs. Car, de son propre aveu, elle a porté seule le flambeau jusqu’ici. « J’ai géré personnellement toute l’application en ligne. Maintenant, j’ai très hâte d’impliquer mon équipe dans le processus pour qu’on puisse grandir et progresser ensemble de manière organique. Je veux que mon équipe ait une visibilité sur tout ce que ça veut dire pour nous, d’être B Corp. Aussi, je veux que chacun puisse participer à maintenir et à améliorer notre statut. » Natalie Rivière comptait aborder ce sujet — tout en « célébrant » la nouvelle — lors d’une retraite d’équipe en septembre dernier.

Rien de mal à prendre son temps

Pour Aurelia Talvela, présidente de B Local Québec, il n’y a rien de surprenant à ce qu’une entreprise puisse mettre plusieurs années à finaliser la certification. « Il y a environ 8000 entreprises certifiées aujourd’hui dans le monde. Or, il y a plus de 50 000 entreprises qui ont commencé à entamer le processus, mais qui n’ont pas fini », note-t-elle. D’ailleurs, rien n’oblige une entreprise à finir ni à soumettre le questionnaire, précise-t-elle. Plusieurs dirigeants utilisent le BIA pour se guider en interne dans leur feuille de route ESG ou de développement durable. « Ces entreprises se fixent des objectifs à plus long terme et y vont à leur rythme. La plateforme leur donne des idées de petites améliorations à implémenter dans leur organisation. »