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Ah, comme la neige a neigé !

Claudine Hébert|Publié le 27 Décembre 2022

Ah, comme la neige a neigé !

(Photo: 123RF)

Détenir un solide arsenal de canons à neige n’est plus un luxe. Ces équipements font désormais partie de la solution des stations pour faire face aux changements climatiques. 

Depuis la commercialisation du premier canon à neige dans les années 1950, l’accessoire a maintes fois servi d’outil marketing en Amérique du Nord. Grâce à leurs puissants canons, les stations Sommet Saint-Sauveur et Ski Saint-Bruno ont multiplié les ouvertures de saison les plus hâtives de la province au fil des ans. Or, depuis une quinzaine d’années, cette technologie est devenue un équipement capital pour assurer la rentabilité, pour ne pas dire la survie, de la majorité des destinations de glisse du Québec. 

 

De la neige pour le temps des fêtes 

Christian Dufour, directeur marketing du Groupe Les Sommets peut en témoigner. Depuis bientôt 20 ans, son entreprise investit de quatre à cinq millions de dollars (M$) annuellement afin d’améliorer les systèmes d’enneigement de ses cinq stations situées dans les Laurentides et en Outaouais. «Ce n’est plus seulement une question d’ouvrir le plus tôt dans la saison. Sans enneigement mécanique, il est devenu quasi impossible avec les aléas de la météo de garantir une couverture de neige suffisante pour nos stations lors de la plus rentable des périodes de la saison, celle des fêtes», soutient-il. Ces semaines de congé représentent aisément le quart, sinon plus du tiers du chiffre d’affaires annuel des stations de la province. 

De juteux revenus dont a malheureusement été privée la station de ski Mont-Béchervaise, à Gaspé, lors des deux dernières saisons. «Faute de neige naturelle (et mécanique), la station n’a pu accueillir de visiteurs avant le 20 janvier dernier. Le même scénario s’était produit l’année précédente à la suite des fortes pluies survenues les 25 et 26 décembre 2020. Nous avions perdu toute notre neige accumulée depuis l’automne», raconte Gaëlle Vivier, la nouvelle directrice générale de la destination. Une vive déception pour les quelque 800 abonnés de l’endroit. 

Bien que cette montagne gaspésienne reçoive en moyenne près de quatre mètres de neige par hiver, ces deux débuts de saison désastreux incitent l’organisation à but non lucratif à vouloir installer des canons à neige sur son domaine de 244 mètres de dénivelé, dit-elle. Mais les usagers devront être patients. «Un tel projet nécessite non seulement du financement, mais aussi l’obtention de permis environnementaux qui prennent entre 12 et 24 mois avant d’être accordés», avertit la gestionnaire Vivier. 

 

Les retombées des ouvertures hâtives 

Même si la neige a la réputation d’arriver tôt en saison au Saguenay, la direction de la station du Mont Édouard, à L’Anse-Saint-Jean, a décidé de ne pas prendre de risque. Il y a cinq ans, l’entreprise a investi près de 2 M$ pour automatiser son système d’enneigement sur huit de ses 32 pistes. Un geste purement financier. «Pourvu que la météo collabore, nos canons peuvent enneiger le quart du domaine dès le début du mois de novembre. Ce qui permet à la station d’accueillir les camps d’entraînement des équipes de skieurs et planchistes du Nord-est américain dès le 10 novembre», explique Frédéric Blouin, directeur général de la station.  

Le dirigeant de la montagne saguenéenne ne cache pas que la venue de cette centaine d’athlètes tôt en saison génère des revenus très satisfaisants pour le domaine skiable. Sans vouloir préciser ce que cet enneigement hâtif rapporte annuellement, il soutient que la totalité de l’investissement pour ces équipements est déjà remboursée. «Cette stratégie nous a permis de devancer l’ouverture de la station pour nos usagers dès le début du mois de décembre, soit de deux à trois semaines avant Noël. Ce qui a aidé à augmenter la vente des abonnements. Par conséquent, cet achalandage associé à la venue des camps s’est traduit par un retour sur l’investissement plus rapide que ce que l’on espérait», explique Frédéric Blouin. 

Les commerçants de la région apprécient, eux aussi, l’enneigement précoce de la station, souligne le dirigeant. D’après les échos, le passage des camps d’entraînement générerait près d’un demi-million de dollars en retombées tous les ans, dit-il. 

Même le Massif de Charlevoix, une montagne qui a l’habitude de recevoir près de 6,50 mètres de neige naturelle par année, a besoin d’un coup de main. Depuis deux ans, la station a investi plus de 7,5 M$ pour faire le plein d’une centaine de perches automatisées, annonce Nicolas Racine, directeur général de la station. Avec la présence du Club Med au pied de la montagne, dit-il, l’équipe de la montagne doit faire tout son possible pour ouvrir la station le 3 décembre.