«La hausse des taux d'intérêt pourrait présenter des défis pour les entreprises et États fortement endettés», a affirmé la Banque centrale européenne dans son rapport semestriel sur la stabilité financière. (Photo: 123RF)
Francfort — Les hausses de taux d’intérêt qui se profilent au cours des prochains mois en zone euro risquent de constituer un «défi» pour les États et entreprises très endettés, a prévenu mercredi la Banque centrale européenne.
«La hausse des taux d’intérêt pourrait présenter des défis pour les entreprises et États fortement endettés», a affirmé l’institution dans son rapport semestriel sur la stabilité financière.
Avec à la clé des «spreads» plus élevés, mesurant les écarts très surveillés entre les taux d’emprunt de divers pays en zone euro et ceux considérés comme «sûrs» comme l’emprunt allemand «Bund» à 10 ans, ainsi qu’entre emprunteurs privés, le tout pouvant amener «une fragmentation financière croissante».
Après une décennie de baisse de taux en zone euro, l’inversement du cycle doit se produire dans un contexte de forte reprise des prix aggravés par la guerre en Ukraine.
Ce conflit a déjà «accru les risques pour la stabilité financière en raison de son impact sur pratiquement tous les aspects de l’activité économique et des conditions de financement», commente Luis de Guindos, vice-président de la BCE, dans le rapport.
Ce document cite un ensemble de «vulnérabilités» déjà perçues avant l’invasion russe en Ukraine, concernant notamment les prix sur le marché immobilier comme la rentabilité en berne des banques.
Et dans l’ensemble «la situation a empiré par rapport à celle il y a six mois», a résumé M. de Guindos lors d’une conférence téléphonique.
Dans ce contexte, une remontée trop abrupte des taux d’intérêt peut comporter «des risques, en particulier si la dynamique de croissance sous-jacente est atone», note le document.
La fin de l’argent facile présente aussi le risque d’un déséquilibre pour la zone euro à partir du moment où certains pays, particulièrement endettés, commencent à inquiéter les investisseurs et les marchés.
Outil anti-fragmentation
«La viabilité de la dette des entreprises et des gouvernements» ayant accumulé un stock important de dettes «peut se détériorer» en cas de hausse des coûts de (re) financement, prévient déjà la BCE.
Avec pour tous, le souvenir encore frais de la crise de la dette qui avait paralysé le continent européen au début de la décennie 2010.
Les taux dits souverains se sont tendus pour l’Espagne ou l’Italie ces derniers temps, mais «la situation actuelle n’est pas comparable à celle qu’on avait en 2011 ou 2012», selon M. de Guindos.
Il n’empêche que «nous devrions être prêts à intervenir au besoin pour neutraliser toute réponse non linéaire du marché» sous la forme d’une fragmentation financière «qui pourrait découler d’une hausse des taux», a déclaré mercredi Fabio Panetta, membre du directoire, lors d’un discours à Francfort.
Le conseil des gouverneurs est «ouvert» à cette question, mais n’a encore discuté «d’aucun détail concret» concernant ce type d’instrument, a précisé de son côté M. de Guindos.
La BCE devrait décider en juin d’arrêter ses rachats nets de dette ayant jusqu’à présent permis d’aplanir le niveau des taux sur les marchés. Puis elle devrait commencer un cycle de hausse des taux directeurs en juillet, le débat entre banquiers centraux allant dès lors porter sur la vitesse et l’ampleur à donner à cette remontée du loyer de l’argent.